Vos traces numériques intéressent diablement les banquiers

Par Christine Lejoux  |   |  529  mots
Les retraits et paiements par carte, une des nombreuses sources d'information des banques sur leurs clients / Reuters
S'il permet aux banques de mieux comprendre leurs clients pour leur proposer des produits adaptés à leurs besoins, le big data facilite aussi la gestion de risques tels que l'insolvabilité des emprunteurs.

S'il est un secteur qui regorge de données sur ses clients, c'est bien la banque. Il ne se passe pas une journée (ou presque) sans qu'un client ne soit en contact avec sa banque, ne serait-ce que via ses paiements par carte. Un acte qui, s'il est analysé, permet par exemple à celle-là de s'apercevoir que tel client se rend moins souvent que de coutume au restaurant et fréquente davantage des magasins à bas prix. Ce qui peut laisser penser qu'il va au-devant de difficultés financières. Une intuition qui peut être corroborée par le décryptage de données externes, comme ses états d'âme sur Facebook ou Twitter.
Le big data, c'est-à-dire l'analyse de ces monceaux de données provenant non seulement des systèmes d'informations des banques, mais également des réseaux sociaux, des forums de discussions sur Internet, etc., permet d'établir des profils de clients beaucoup plus précis qu'à l'aide de « simples » statistiques. Si bien que la banque est alors en mesure de proposer à son client un produit véritablement adapté à sa problématique actuelle.

Un facteur de différenciation

« Bien qu'elles détiennent un très grand nombre d'informations personnalisées sur leurs clients, les banques les avaient jusqu'à présent moins exploitées que d'autres secteurs comme la distribution, frappée plus tôt que le secteur bancaire par une forte pression économique », explique Bruno de Saint-Florent, responsable du département services financiers chez Oliver Wyman. Mais, avec les accords de Bâle III et le renforcement des fonds propres des banques, ainsi que l'engouement des clients pour les services bancaires en ligne, « la taille du bilan financier et l'étendue du réseau d'agences, qui conditionnaient auparavant la création de valeur dans le secteur bancaire, sont aujourd'hui sous contraintes. L'utilisation de l'information devient un actifcentral, qui, dans un environnement stagnant, différenciera demain les acteurs en croissance de ceux qui seront en perte de vitesse », affirme Bruno de Saint-Florent. « La plupart des banques américaines estiment que le big data est nécessaire pour être compétitif aujourd'hui. D'où une course à celle qui analysera le plus vite et de la manière la plus précise ces masses de données », renchérit Marc Atallah, directeur au sein du cabinet Deloitte.

Les banques n'utilisent pas seulement le big data à des fins de marketing, mais aussi pour se protéger contre certains risques, comme l'insolvabilité d'un emprunteur. Alors que le traditionnel credit scoring est basé sur une quinzaine de critères seulement, la société ZestFinance, cofondée par un ancien de Google, exploite les milliers de données disponibles sur un client. Ce qui permet d'estimer si finement les risques de défaut de paiement que ZestFinance se prévaut d'un taux de défaut inférieur de 50 % à celui des meilleurs acteurs du crédit à court terme, aux États-Unis. Dans la même veine, Crédit mutuel Arkea a développé une application calculant les ratios de solvabilité de la totalité de sa clientèle en moins d'un quart d'heure, contre deux jours pour un simple échantillon de clients avec les traditionnelles méthodes statistiques.