Le conseiller agriculture de François Hollande retenu par la Confédération paysanne

Par Tiphaine Honoré  |   |  841  mots
Les militants protestaient depuis hier soir contre la garde à vue (prolongée) de 5 de leurs membres, dont leur porte-parole Laurent Pinatel. (Photo : Twitter Confédération paysanne)
Des membres du syndicat agricole retiennent depuis vendredi midi Philippe Vinçon, conseiller agriculture de François Hollande. Cette action intervient suite aux gardes à vue de militants de la Confédération paysanne, après le démontage de la salle de traite de la ferme des "Mille vaches" dans la Somme.

Philippe Vinçon est retenu à Rodez depuis ce midi, où il avait rendez-vous avec la Confédération paysanne dans la matinée. Il accompagnait le chef de l'Etat à l'inauguration du musée Soulages. Sur son compte Twitter, l'organisation indique que son trésorier et l'un de ses porte-paroles "entendent en ce moment le conseiller de Hollande en GAV symbolique" :

Au cœur de la protestation : la ferme des "Milles vaches"

Les militants protestaient depuis hier soir contre la garde à vue (prolongée) de 5 de leurs membres, dont leur porte-parole Laurent Pinatel.

Ces derniers ont été interpellés mercredi après le démontage d'une salle de traite sur le chantier de la ferme dite des "Mille vaches" à Drucat (Somme). Vendredi matin, des sympathisants écologistes et EELV manifestaient toujours devant le tribunal d'Amiens pour demander leur remise en liberté comme l'indiquait le compte Twitter de la Confédération paysanne :

Une "usine à lait"

Des adhérents du syndicat agricole s'étaient donné rendez-vous mercredi pour manifester dans les locaux de cette "usine à lait", comme ils la dénoncent. Une cinquantaine d'entre eux étaient venus de toute la France mercredi pour manifester contre ce projet "d'industrialisation de l'agriculture". 

"A quelques semaines de la première traite", les militants de la Confédération paysanne ont entrepris "le démontage de la salle de traite, énorme machine destinée à traire trois fois par jour les 1.000 vaches que cette usine doit accueillir", a indiqué Judith Carmona, secrétaire nationale du syndicat.

Les militants condamnent la "répression syndicale"

La Confédération paysanne condamne aujourd'hui la "répression syndicale" et les méthodes d'interpellations. Venu soutenir les quatre militants gardés à vue, le porte-parole de la Confédération paysanne Laurent Pinatel, a été plaqué au sol et arrêté en gare d'Amiens par les services de sécurité de Stéphane Le Foll avant d'être à son tour placé en garde à vue. 

En soutien aux cinq militants, des rassemblements ont eu lieu jeudi soir à Paris et en Aquitaine pour réclamer leur libération. Dans la capitale, une cinquantaine d'agriculteurs se sont retrouvés devant le Tribunal de Paris, accompagnés de représentants d'Attac et du Front de gauche. 

"Les paysans ne sont pas des bandits: ils ont des fermes et des vaches qui les attendent, ils ne vont pas s'enfuir ! ", a déclaré à l'AFP Judith Carmona, à Paris, dénonçant une "mesure exagérée". 

"On est considéré comme de dangereux criminels", s'est indignée auprès de l'AFP, Michèle Roux, une responsable de l'organisation en Dordogne. "Si on laisse passer ce projet, il y en aura partout ! On a hésité à appeler au rassemblement parce que c'est un jour férié, mais on s'est dit qu'on ne pouvait plus attendre" pour protester, a-t-elle ajouté. 

Le député européen EELV José Bové, soutien des opposants au projet et habitué à ce genre d'interpellations, a exprimé jeudi soir sa solidarité avec les militants via un communiqué :

"Cette répression syndicale est complètement inacceptable. Je demande la libération immédiate des personnes gardées à vue. Il est plus que temps de tourner le dos à ce modèle agricole productiviste qui détruit emplois et environnement. Stéphane Le Foll et Ségolène Royal doivent entendre l'opposition et  arrêter le projet au plus vite".  

La profession divisée sur sa conception de l'agriculture

Il était reproché aux interpellés la dégradation, le vol et le recel aggravé, a indiqué le procureur de la République, Bernard Farret. Les militants ont en effet démonté des pièces de la salle de traite qu'ils ont apportées au ministre de l'Agriculture. 

"La Confédération paysanne s'est une nouvelle fois introduite illégalement sur le chantier (...) pour non pas y démonter, mais bel et bien y saccager, la salle de traite", avait réagi le concepteur du projet. Il a dit avoir porté plainte, estimant que les dégâts dépasseraient "vraisemblablement les 100.000 euros".

Un arrêté préfectoral a limité à 500 le nombre de vaches laitières sur le site, tant que la surface d'épandage des boues résiduelles ne serait pas suffisante. Les adversaires du projet, opposés à une "agriculture qui fera disparaître les paysans", estiment que les dimensions de la ferme, et du méthaniseur qui y est associé, n'ont pas été changées. Selon eux, la ferme abritera à terme plus de 1.000 vaches, à l'image des "feed lots" américains pour la production de viande bovine. Décriées aux Etats-Unis pour les traitements infligés aux bovins, ces fermes intensives regroupent dans des espaces très réduits un grand nombre de bovins afin d'augmenter la productivité.