L'Europe, le marché maudit de General Motors

Par Alain-Gabriel Verdevoye  |   |  705  mots
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Au premier trimestre, GM a encore affiché un déficit en Europe. Il y perd de l'argent depuis dix ans. Et ça ne s'améliore pas.

Rien n'y fait. GM est chroniquement déficitaire en Europe. Le groupe automobile américain a encore perdu au premier trimestre 256 millions de dollars (200 millions d'euros) sur le Vieux continent. Il ne faut pas attendre de mesures radicales en Europe mais "une série d'avancées, ce sera graduel", a affirmé le Directeur financier du groupe de Detroit, Dan Amman, interrogé sur la chaîne ce jeudi CNBC. Des fermetures d'usines au sein des filiales européennes Opel et Vauxhall sont attendues. Le dirigeant a ajouté qu'il était encore "trop tôt pour dire" si le pire avait été atteint en Europe. Il s'est d'ailleurs refusé à dire si le groupe redeviendrait rentable cette année de ce côté de l'Atlantique. Cela fait plus de dix ans que le consortium du Michigan perd de l'argent en Europe. 

Toujours des pertes

GM avait déjà  enregistré une perte avant impôts de 700 millions (540 millions d'euros) en Europe l'an passé, après 2 milliards  l'année précédente. La filiale allemande Opel (et sa marque soeur britannique Vauxhall) ne parvient pas à enrayer la chute de ses parts de marché en Europe (7,3 % en 2011 hors utilitaires à 989.260 unités, contre plus de 10 % il y a dix ans) et se trouve toujours en surcapacités, malgré des plans de restructuration à répétition, dont la récente fermeture de l'usine belge d'Anvers. GM avait tenté vainement de marier Opel avec Fiat au début des années 2000, puis de vendre sa filiale germanique à l'équipementier canadien Magna allié à des intérêts russes en 2009... avant de sa raviser in extremis.

Régression en Allemagne

En forme dans les années 90, Opel a tout d'abord souffert d'une brutale politique de réduction des coûts (déjà !) menée par le "gourou" industriel de l'époque, l'espagnol Jose Ignacio Lopez de Arriortua. Celui-ci a notamment réduit brutalement les prix d'achat des composants auprès des fournisseurs, ce qui s'est immédiatement traduit par une dégringolade de la qualité. Opel, marque allemande, s'est dans le même temps mondialisée, avec des équipes d'ingénierie "globales", afin de fournir notamment des véhicules à Chevrolet (GM) pour les pays émergents comme le Brésil. Avec des problèmes de fiabilité, une perte d'identité et des retards technologiques cumulés faute d'argent frais (diesels, boîtes automatiques... ), Opel s'est mis à régresser brutalement sur son marché intérieur allemand, où il avait initialement profité de l'ouverture de l'ex-RDA après la chute du Mur.

Déficit d'image

Concurrencé ensuite au sein même de GM par les équipes d'ingénierie, plus productives, de la filiale coréenne GM Daewoo (marque Chevrolet), Opel a dû mal à trouver aujourd'hui sa place. Il est pris en tenaille entre la montée en puissance en Europe de la marque Chevrolet avec des produits moins chers et, d'un autre côté, l'offensive de Volkswagen et des nouveaux entrants comme le groupe coréen Hyundai-Kia. Opel se retrouve donc avec des coûts de production élevés, puisque sa base industrielle est pour une bonne part située en Allemagne, alors même que la firme ne peut vendre ses produits au prix de ceux de Volkswagen, à cause de son déficit d'image. Opel fabrique notamment une partie de ses petits véhicules Outre-Rhin, quand Volkswagen assemble par exemple sa Polo en Espagne.

Salut attendu de... PSA

 

Désormais, le salut passe... par PSA. L'alliance nouée fin février entre GM et le constructeur français, dont l'américain détient 7% du capital, est en effet centrée essentiellement sur l'Europe. Les deux partenaires affirment attendre beaucoup des futures plates-formes  communes et des synergies. Mais les deux firmes, toutes deux mal en point, se retrouvent face à de fortes surcapacités. Ils sont également en concurrence frontale avec des produits directement concurrents. De toutes façons, les vraies synergies n'arriveront pas avant... 2016.  La firme de Detroit a annoncé ce jeudi un bénéfice net au niveau du groupe divisé par trois sur un an au premier trimestre à cause de ce déficit européen. Le profit net mondial est ressorti à un milliard de dollars (750 millions d'euros), pour un chiffre d'affaires en progression de 4,4% à 37,8 milliards de dollars (29 milliards d'euros).