Fin du bonus sur les hybrides : mais à quoi joue l'État ?

Par Nabil Bourassi  |   |  724  mots
En photo: une voiture hybride rechargeable. Celle-ci dispose d'une batterie rechargeable sur secteur qui permet une meilleure autonomie qu'une hybride normale, qui elle, se recharge uniquement en roulant.
À partir du 1er janvier, les voitures hybrides ne seront plus du tout subventionnées. Il y a un an déjà, leur bonus était passé de 2.000 à 750 euros, provoquant une baisse des ventes. L'État veut promouvoir la voiture électrique tout en garantissant l'équilibre financier de son dispositif de Bonus Malus...

Il ne vous reste plus que quelques jours pour bénéficier du bonus sur l'achat d'une voiture hybride. À partir du 1er janvier, cette technologie ne sera plus éligible au bonus écologique. Cela ne devrait pas changer grand-chose puisque le bonus était de seulement 750 euros, contre 2000 euros jusqu'en 2015. Le gouvernement considère que toute hybride qu'elles soient, ces voitures (prétendument) écologiques restent des émettrices de CO2 et de particules fines puisqu'une motorisation thermique subsiste. Et peu importe qu'elles consomment de 10 à 50% moins de carburant (en fonction de l'usage et du modèle).

L'hybride rechargeable reste subventionnée

Le gouvernement conserve néanmoins une prime sur l'hybride rechargeable. Celle-ci dispose d'une batterie rechargeable sur secteur qui permet une meilleure autonomie qu'une hybride normale, qui elle, se recharge uniquement en roulant.

La subvention sur hybride rechargeable s'élève à 2.000 euros. Pas de quoi pavoiser lorsqu'on sait que pour passer d'une Toyota Prius hybride à sa version rechargeable, il faudra abonder son budget de près de 15%... Ajoutons que cette prime était de 4.000 euros jusqu'au 1er janvier dernier.

La baisse conséquente de la subvention sur l'hybride en janvier dernier avait envoyé un mauvais signal au marché. Les ventes ont baissé sur les onze premiers mois de l'année en France, selon les chiffres du CCFA. La part de marché des voitures hybrides est passée de 3,19% à 2,82%. La part des rechargeables a, en revanche, légèrement augmenté de 0,28 à 0,37%. Sur 51.404 immatriculations hybrides en 2016, 6.685 étaient rechargeables...

En réalité, le gouvernement a voulu concentrer son dispositif d'aide sur la voiture électrique. Celle-ci s'est vue attribuer une subvention de 10.000 euros pour qui abandonnera une voiture diesel. Sauf que les ventes de voiture électriques ont subi un frémissement, mais restent encore anecdotiques. Avec 19.000 immatriculations sur les onze premiers mois de l'année, contre 15.000 l'année précédente, la voiture électrique représente à peine 1% du marché.

La disparition totale du bonus sur la voiture hybride doit également permettre d'instituer en 2017 une aide sur l'achat de deux roues électriques.

Le cas précédent du GPL

Il ne faut pas négliger l'influence de ces dispositifs de subvention sur le marché. La disparition du bonus sur les GPL a ainsi largement contribué à sa chute en France. En 2008, le GPL bénéficiait d'un bonus d'achat de 2.000 euros. En deux ans, 100.000 voitures équipées d'un moteur GPL ont été vendues. L'alignement du GPL avec le diesel a totalement anéanti les parts de marché de cette motorisation. En 2015, les ventes de GPL n'ont pas dépassé les 1.500 unités en France. Il s'agit d'une véritable distorsion du marché puisque le GPL représente un parc de 14 millions de voitures en Europe (+40% en 5 ans) tandis qu'en France, ce parc n'est que de 262.000 voitures en circulation.

Pour les constructeurs automobiles, les politiques publiques en matière de motorisations sont beaucoup trop volatiles. Elles changent du tout au tout en l'espace d'un an, alors qu'ils ont besoin de 4 à 5 ans de développement pour un moteur, avec de lourds investissements qu'ils doivent amortir sur plusieurs années.

Un nécessaire équilibre financier

L'État, de son côté, gère ce dispositif pas seulement sur des critères environnementaux. Il a le souci de mener une gestion équilibrée. Le dispositif du Bonus Malus est à l'équilibre depuis 2014. Mais jusqu'en 2013, il accusait un lourd déficit. Les ajustements sur les modèles avaient donc été rendus nécessaires pour des questions de comptes publics équilibrés. En mai 2016, la Cour des comptes avait toutefois reproché aux pouvoirs publics de mal anticiper les comportements d'achats. Les sages de la rue Cambon en avaient conclu que certaines motorisations étaient surestimées, tandis que d'autres étaient minorées. Ainsi, en 2015, le dispositif a dégagé un bénéfice de 100 millions d'euros grâce à des recettes 25% supérieures aux projections, à 301,5 millions d'euros.

La Cour des comptes a découvert que l'écart en 2015 s'expliquait notamment de ventes d'hybrides supérieures aux attentes, et d'hybrides rechargeables décevantes. Les voitures électriques avaient également déçues. Il fallait donc dégager des moyens financiers pour faire passer son bonus à 10.000 euros.

Autrement dit, l'équilibre financier du dispositif et la conversion du parc automobile vers des technologies plus vertes impliquent des chemins divergents. L'arbitrage entre les deux est éminemment politique, là où les constructeurs réclament plus de visibilité à long terme...