Pourquoi l'incroyable hausse du marché automobile en août est un trompe-l'oeil

Par Nabil Bourassi  |   |  642  mots
Les ventes ont augmenté de 46% en août, mais elles correspondent à des déstockages massifs. (Crédits : Fabian Bimmer)
Les immatriculations ont explosé de plus de 46% en août. L'entrée en vigueur de la norme WLTP a poussé les constructeurs automobiles à déstocker massivement des modèles non-conformes et donc invendables après le 1er septembre. Les constructeurs français, eux, restent dans leur trajectoire...

Non, ce n'est pas un bug informatique... Les immatriculations en France ont bel et bien explosé au mois d'août de plus de 46% d'après les chiffres divulgués par le Journal de l'Automobile, et qui seront confirmés samedi 1er septembre par les chiffres officiels du  Comité des constructeurs français d'automobiles (CCFA).

Cette hausse incroyable est la conséquence de l'entrée en vigueur des normes WLTP à partir du 1er septembre 2018. Les constructeurs ont massivement destockés des modèles qui n'étaient plus autorisés à la vente à partir de cette date. Le phénomène avait déjà été constaté en juillet avec une progression de 19% des immatriculations.

+300% pour Porsche

Le Journal de l'Automobile révèle ainsi que certaines marques ont enregistré des progressions de plus de 200% comme Jaguar, Porsche (+300%), Mitsubishi mais également Nissan. Pour booster leurs ventes, ces marques ont consenti à d'importantes remises.

Les marques automobiles françaises, elles, se sont tenues plus sagement. Renault a bien enregistré une hausse de 72%, mais les marques du groupe PSA s'inscrivent dans la même trajectoire que celle enregistrée depuis le début de l'année. A noter qu'Opel va jusqu'à enregistrer une baisse de ses immatriculations sur ce mois pourtant incroyable. Le groupe automobile français explique ne pas avoir eu besoin de recourir à des déstockages puisque son catalogue est entièrement conforme à la nouvelle norme WLTP. Au salon de Genève en mars, Gilles Le Borgne, le patron de la R&D chez PSA, n'était pourtant pas certain d'être dans les temps sur les exigences du WLTP. « Je pense que nous serons dans les clous », nous avait-il dit non sans prudence.

Cela n'a pas été le cas pour tout le monde. En juillet, le puissant groupe Volkswagen mettait en garde sur la possibilité de ne pas disposer d'une gamme totalement conforme. D'après Les Echos, la marque allemande est parvenue à certifier seulement la moitié de sa gamme, et attend celle de sa Golf dans les prochains jours. Jürgen Stackmann, directeur des ventes de la marque Volkswagen, avait alors prévenu qu'après un bon premier semestre « la deuxième partie de l'année serait nettement plus difficile », justement pour ces raisons réglementaires.

WLTP, une norme créée à la suite du Dieselgate

La norme WLTP a été lancée pour remplacer le protocole précédent, jugé pas assez représentatif de la réalité. Ce problème était apparu au grand jour au lendemain du dieselgate lorsque les consommateurs ont découvert l'immense écart entre les consommations réelles et celles annoncées par les constructeurs automobiles.

L'arrivée de cette nouvelle norme a été un véritable casse-tête pour les constructeurs automobiles. Ils reprochent aux autorités d'avoir donné un délai trop serré entre la définition du protocole (juillet 2017) et son entrée en vigueur. Car la nouvelle norme bouleverse toute la mécanique d'une voiture, des réglages moteur en passant par le calibrage des rapports de l'embrayage aux seuils de température des systèmes anti-pollution. Un travail d'ingénierie titanesque, à réaliser voiture par voiture, mais également entre chaque niveau de motorisation... Il fallait ensuite ajouter la procédure d'homologation qui peut parfois être longue.

Nouvelle échéance: les nouveaux barèmes fiscaux

Mais les constructeurs n'ont pas fini de suer d'angoisse... Ils attendent désormais l'application de la norme WLTP dans les barèmes fiscaux. Ceux-ci sont effectivement calqués sur l'ancienne norme. Or, avec le WLTP, ces barèmes devront nécessairement être revus. Les nouveaux seuils retenus auront alors une incidence notoire sur le bonus-malus, mais également sur la TVS (taxe sur les véhicules de société). Ces deux éléments déterminent l'essentiel des politiques d'achat des flottes d'entreprises, soit plus de la moitié du marché neuf français.