L'appétit des Français pour la propriété est-il intact ?

Par Mathias Thepot  |   |  635  mots
Entre 2006 et 2013, le taux de ménages propriétaires en France n'a progressé que de 57,2 % à 57,9 % selon la dernière étude sur le Logement de l'Insee.
Le taux de propriétaires immobiliers plafonne en France depuis 2006, d'après une étude de l'Insee. Un taux plafond a-t-il été atteint ? Il faudra attendre la prochaine reprise économique pour le savoir.

Les Français perdraient-ils leur appétit pour la propriété ? Entre 2006 et 2013, le taux de ménages propriétaires en France n'a en effet progressé que de 57,2 % à 57,9 % selon la dernière étude sur le Logement de l'Insee.

Le début du 21e siècle n'est d'ailleurs pas propice à l'accession à la propriété pour les ménages français puisque la part de propriétaires en 2001 était déjà de 56%. Cette faible évolution est, à première vue, étrange car on entend souvent les acteurs de l'immobilier répéter à qui veut l'entendre que les Français ont "une brique dans le ventre". Une façon, certes, d'acculturer la population à la nécessité d'acheter ou de vendre un bien immobilier, leur cœur de métier.

Ainsi, il se dit que le fait de devenir propriétaire est un marqueur social et de réussite. Une situation que les professionnels du secteur s'attèlent à préserver au maximum, puisqu'elle est la condition sine qua non de la pérennité de leurs profits.

Un taux plafond atteint ?

Pourtant, la baisse tendancielle des taux d'intérêts de crédits immobiliers, ainsi que l'instauration de dispositifs de soutien à l'accession, comme le prêt à taux zéro (PTZ), n'ont pas permis de dépasser le taux de 60% de propriétaires en 2013. De fait, on peut se demander si l'accession à la propriété n'a pas atteint un plafond. N'y aurait-il pas un taux structurel approchant les 40% de locataires et les 60 % de propriétaires en France ?

Jean-Claude Driant, professeur à l'Institut d'urbanisme de Paris, n'en est pas convaincu:

"Je ne crois pas que nous soyons arrivés à un taux plafond en matière d'accession à la propriété. Déjà, parce que ce n'est pas la première fois que l'on se pose ce genre de questions. Et qu'il a suffi, par le passé, d'une reprise économique et/ou d'un plan d'aides publiques visant les accédants pour que l'accession à la propriété reparte à la hausse."

LA folle augmentation des prix

Il faut aussi dire que les 15 dernières années ont été marquées par une folle augmentation des prix de l'immobilier, qui ont plus que doublé en France, alors que les revenus n'ont crû que d'environ 30% sur cette même période. Ce qui a mécaniquement exclu un grand nombre de jeunes du marché de l'accession.

Ces derniers veulent-ils réellement acheter, plutôt que louer ? Oui, selon un sondage CSA / Guy Hoquet immobilier. Leur enquête rapporte que 88% des moins de 40 ans souhaitent devenir propriétaire, par souci de fierté.

Le niveau des prix élevés et la conjoncture économique difficile ont, en fait, provoqué de la retenue chez un certain nombre de ménages souhaitant accéder à la propriété. Ils sont dans une position d'attente. Et "lorsque la conjoncture économique repartira, il est possible qu'il se produise une explosion des demandes à l'achat", pense Jean-Claude Driant. "L'accession à la propriété est un engagement sur vingt ans et suppose de la stabilité et de la sécurité financière", ajoute-t-il.

Un potentiel pour plus de propriétaires ?

En outre, la France se situe en dessous de la moyenne européenne (65%) de ménages propriétaires. Des pays voisins comme l'Espagne (plus de 80%) ou le Royaume-Uni (environ 70%) ont une part plus grande de propriétaires qu'en France. Dans l'absolu, il existe donc un potentiel de hausse.

En fait, seuls les pays germaniques (Allemagne, Autriche, Pays-Bas, Suisse), qui ont un faible appétit pour la propriété immobilière, ont une proportion plus élevée de locataires qu'en France. "Mais on a quand même l'impression que les Français sont encore majoritairement dans l'envie de devenir propriétaire", concède Jean-Claude Driant. Reste désormais à attendre une reprise économique dans l'Hexagone pour avoir une réponse limpide à ce mystère.