La peur des compagnies aériennes françaises de disparaître comme le transport maritime

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  751  mots
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La Fédération nationale de l'aviation marchande a envoyé aux candidats à la présidentielle 10 propositions pour redynamiser le pavillon français qui perd 1 point de parts de marché par an depuis dix ans.

En présentant ce jeudi les 10 propositions de la fédération nationale de l'aviation marchande (Fnam) pour réformer le transport aérien français, son président, Lionel Guérin, a tiré la sonnette d'alarme. « Le pavillon français perd 1 point de parts de marché chaque année depuis 10 ans, pour représenter aujourd'hui 48% du trafic français, et seulement 30% sur le réseau moyen-courrier. Si la pente continue, le pavillon français disparaîtra. Nous ne voulons pas devenir comme le transport maritime. Nous avons bien vu que quand on s'en est occupé, il était trop tard. Il était complètement délocalisé. C'est pourquoi, nous prenons les devants ». Un cri d'alerte alors que les compagnies sont en difficultés avec un prix du baril très élevé et un marché touristique atone.

Baisser le coût du travail

Envoyés à tous les candidats à la présidentielle, ces propositions ont comme thème fort la compétitivité des compagnies françaises. «Nous sommes en concurrence avec des transporteurs qui n'ont pas le même niveau de charges sociales et fiscales », déplore Pascal de Izaguirre, PDG de Corsair et de TUI France. « Il faut baisser le coût du travail », insiste t-il. La Fnam prône ainsi « un déplacement de l'assiette des cotisations sociales sur d'autres prélèvements fiscaux (par exemple dans certains pays en effet la protection sociale est financée par l'impôt, ndlr) par un dispositif d'abattement des charges patronales, notamment pour les travailleurs mobiles, les navigants ». « En contrepartie, nous engageons à développer l'activité et donc l'emploi », assure Pascal de Izaguirre, en rappelant que le transport aérien pèse 133 000 emplois directs et même 341 000 en incluant l'industrie aéronautique, et 600.000 emplois indirects. « Ce sont des emplois non délocalisables », rappelle t-il.

"L'âne croule sous les taxes"

La Fnam demande aussi le maintien de l'exonération des charges pour les embauches de personnes de moins de 26 heures « pour favoriser l'insertion des jeunes », et insiste sur la baisse du poids des taxes, notamment celles concernant la sûreté et la sécurité « afin de se rapprocher des bonnes pratiques européennes en la matière ». Pour Pascal de Izaguirre, « il faut arrêter de charger l'âne qui commence à crouler sous les taxes diverses ».

Meilleurs accès des aéroports et maintien des vols de nuit

Outre la compétitivité, l'autre grand thème tourne autour de la volonté de faire de la France « la porte d'entrée de l'Europe ». «Il faut préserver la capacité de croissance des aéroports français et maintenir les vols de nuit, en corrélation avec la poursuite des politiques de réductions des nuisances sonores », explique la Fnam. « Aujourd'hui, il n'y a pas de problème mais à l'horizon 2030, 39 aéroports européens devraient être congestionnés », explique Pascal Personne, directeur de l'aéroport de Bordeaux. Un meilleur accès aux aéroports parisiens est également recommandé.

Les mesures environnementales doivent apporter des gains de productivité

Enfin, la Fnam demande à ce que les mesures environnementales se traduisent par des gains de compétitivité. C'est-à-dire, précise Bertrand Lebel, directeur général adjoint organisation et développement durable que « le produit du système d'échanges de quotas d'émissions de CO2 soit réinvesti dans la performance environnementale du secteur ». La Fnam demande enfin un investissement «dans la recherche et le développement des biocarburants de nouvelle génération ».

Seul François Hollande a répondu

Les compagnies seront-elles plus entendues aujourd'hui qu'il y a cinq ans? « La grande différence c'est qu'à l'époque Air France allait mieux. En 2007, on nous disait, vous perdez certes 1 point de parts de marché par an, mais le pavillon français se porte bien », explique Lionel Guérin. Ce dernier espère pouvoir travailler avec le prochain gouvernement. Pour l'heure, seul François Hollande a répondu à la Fnam. Sur le coût du travail, il a notamment indiqué. « Je me suis engagé à favoriser la production et l'emploi en France en orientant les financements, les aides publiques et les allègements fiscaux vers les entreprises qui investiront sur notre territoire qui y localiseront leurs activités et qui seront offensives à l'exportation. Le transport aérien français me semble rentrer largement dans ce périmètre. Toutefois, il est clair que les évolutions à venir devront respecter l'impératif d'équilibre de nos comptes sociaux ». Une réponse qui semblait convenir aux représentants de la Fnam.