Veolia veut redonner la barre de la SNCM à l'Etat

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  719  mots
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Selon nos informations, Veolia demande une modification du pacte d'actionnaires pour lui permettre de céder sa participation de 66% dans la SNCM à l'Etat. Qui refuse.

L'avenir de la SNCM est à nouveau menacé. Début avril, Veolia Environnement avait annoncé sa volonté de reprendre en direct sa participation dans la SNCM de Veolia-Transdev, sa filiale transports détenue à parité avec la Caisse des Dépôts. Une opération visant à délester Veolia-Transdev de cet actif encombrant, et faciliter ainsi son projet de cession, rendu public fin 2011. Elle ne signifie pourtant rien que Veolia veuille conserver sa participation de 66% au capital de la société de ferries qui va affronter au cours des prochains mois toute une série de vents contraires, avec une nouvelle restructuration à la clé.

La date butoir du 16 mai

Bien au contraire, selon des sources gouvernementales, « Veolia souhaite que la SNCM, retourne dans le giron dans l?Etat », actionnaire à hauteur de 25% (les salariés possèdent 9%). Veolia invoque une clause du pacte d?actionnaires signé lors de la privatisation de la SNCM en 2006. Confidentielle, celle-ci précise qu?en cas de décision de Bruxelles d?ici au 16 mai 2012, aboutissant  à l'obligation pour la compagnie de rembourser des aides d?Etat obtenues dans le passé, l' Etat doit reprendre à Veolia sa participation dans la SNCM. «Veolia fait valoir à l?Etat le risque d?une décision allant de ce sens après mai 2012, et demande une modification du pacte d?actionnaires dans le but de repousser la date d?expiration de cette clause, conformément, selon le groupe, à l?esprit du pacte», explique à La Tribune, une source proche du dossier. En effet, la décision de Commission européenne sur les fonds versés par l?Etat à la SNCM entre 1990 et 2006 n?est pas attendue avant cet été. Si ces fonds étaient assimilés à une aide d?état, la SNCM devra rembourser entre 30 et 50 millions d?euros. Dans ce dossier, la direction de la SNCM soutient Veolia.

L'Etat ne veut pas renégocier et demande une vision à long terme sur l'avenir de la SNCM

Le Gouvernement en place ne l?entend pas de cette oreille. Au motif que l?accord a laissé suffisament de temps aux tribunaux pour trancher cette question, il refuse de renégocier la clause. « La reprise de la SNCM par l?Etat comme le souhaite Veolia en cas de décision négative de Bruxelles ne ferait que compliquer le sauvetage et la restructuration de la SNCM car tout ce que pourrait faire l?Etat serait assimilé à une aide supplémentaire », explique une source ministérielle. « Une augmentation de capital auprès de l?Etat destinée à rembourser les aides serait refusée par Bruxelles qui aurait du mal à y voir un investissement avisé», renchérit un observateur. « Cela ressemblerait au scénario SeaFrance », estime t-il. Selon nos informations, l?Etat demande à Veolia de réfléchir à une vision à long terme pour la SNCM et se dit prêt à jouer son rôle d?actionnaire hauteur de 25%.

Une victoire de Hollande changerait-elle la donne?

Une victoire de la gauche à la présidentielle le 6 mai, juste avant de la date d?expiration de la clause peut-elle changer la donne ? Difficile à dire. D?autant qu?une telle reprise des parts de Veolia s?accompagne d?une contrainte budgétaire. « Si l?Etat reprend la participation de Veolia, il devra rembourser le prix d?achat de cette participation,  soit environ 150 millions d?euros », explique une source informée. Plus généralement, il n?est pas sûr qu?une nouvelle majorité souhaite prendre l?entière responsabilité de la gestion de ce dossier explosif.

Car la réduction probable de la délégation de service public dont la SNCM bénéficie sur le trafic entre le continent et la Corse pourrait entraîner la perte de 800 emplois, soit la moitié des eeffectifs de l?entreprise. « Il nous faut trouver une voie d?avenir. Et s?il doit y avoir moins d?emplois, alors qu?on le fasse sans désespérance en agissant de manière convenable », avait déclaré le 6 avril à la Provence le président du conseil de surveillance de la SNCM, Gérard Couturier. Un mois plus tôt, il avait jeté un pavé dans la marre en offrant à la Collectivité territoriale de Corse de lui céder la SNCM pour un euro symbolique afin de faciliter la création d?une compagnie régionale.