"Le.taxi" : quand l'Etat permet aux taxis d'uberiser Uber

Par Mounia Van de Casteele  |   |  868  mots
Concrètement, le piéton devra télécharger sur son smartphone l'une des quatre applications partenaires: Zaléou, MonAppliTaxi, Paris Taxis, Triperz, ou encore TedyCab, développée par Transdev. Alain Vidalies en a fait la démonstration mard, à Paris.
La plateforme regroupe les données des exploitants de taxis agréés (Opendata) et permet de mettre en relation, via diverses applications pour smartphones, des personnes cherchant un taxi et les 6.000 chauffeurs ayant adhéré, à ce jour, à ce service de "maraude électronique" lancé en mars, mais manquant peut-être de médiatisation.

Place à la pratique ! En commandant lui-même un taxi via une application de téléphone portable, le secrétaire d'Etat aux Transports Alain Vidalies a lancé officiellement mardi à Paris la plateforme "le.taxi", qui permet de héler un véhicule par smartphone. "Voilà, il doit arriver dans 2 minutes", a constaté mardi le secrétaire d'Etat, penché sur l'écran d'un téléphone où s'affichait le trajet du taxi, commandé quelques secondes plus tôt et répertorié dans la plateforme électronique développée par l'Etat. "Il fallait une infrastructure numérique pour cette profession artisanale et fragmentée", a estimé le secrétaire d'Etat devant la presse et des représentants du secteur.

Maraude électronique

Pour rappel, "le.taxi" était prévue par la loi Thévenoud du 1er octobre 2014. La plateforme regroupe les données des exploitants de taxis agréés (Opendata) et permet de mettre en relation, via des applications pour smartphones, des personnes cherchant un taxi et les 6.000 chauffeurs ayant adhéré, à ce jour, à ce service de "maraude électronique" mis en place le 22 mars dernier, dans la ville de Montpellier d'abord, puis à Marseille, Aix-en-Provence, La Rochelle, Rennes et Paris.

Depuis, quelque 20.000 commandes ont été réalisées au niveau national, assure Alain Vidalies. Concrètement, il s'agit pour un client de e-héler un véhicule, au lieu d'en arrêter un physiquement dans la rue. C'est-à-dire que le client signale son besoin via l'une des applications de la plateforme (Zaléou, Triperz, MonTaxi, TaxiProxi, ou encore TedyCab) qui va alors "piocher" dans l'Opendata pour afficher - et solliciter - tous les taxis présents dans la zone. Le chauffeur intéressé accepte ensuite (ou non) la course en direct.

Aucun frais d'approche

Cependant, quelle différence y-a-t-il pour le consommateur entre e-héler un taxi de cette manière, ou à effectuer une "commande immédiate" via une application existante de taxis comme celles de Taxis Bleus ou de G7 par exemple ? Car il y en a effectivement une. Et pas des moindres. Outre le fait de permettre à l'usager de noter la course, comme cela se fait déjà sur Taxis Bleus ou G7, le client ne paie aucun frais d'approche, alors que via les applications de taxis précédemment évoquées, le passager payerait des frais d'approche - plafonnés à 4 euros pour les commandes immédiates et à 7 euros pour les réservations à l'avance.

"Aujourd'hui c'est le client qui décide"

"La plate-forme permet de se mettre sur un pied d'égalité en termes de tarif par rapport à Uber, pour ne pas le citer, pour la course d'approche par exemple", a assuré Isadora Verderesi, qui représentait TedyCab, l'une des applications de la plateforme dédiée aux passagers, développée par Transdev. Et de poursuivre: car "aujourd'hui c'est le client qui décide malheureusement avec la digitalisation".

"L'opendata est un outil pour contrecarrer la concurrence déloyale que nous subissons depuis 3 ans", a renchéri le représentant d'Alpha Taxi, un opérateur de taxis. D'où l'enjeu, désormais de convaincre un maximum de chauffeurs d'adhérer au service. "Les clients attendent qu'il y ait suffisamment de chauffeurs inscrits tandis que ceux-ci attendent qu'il y ait suffisamment de clients", note à cet égard Isadora Verderesi.

L'Union fait la force

"La question étant : comment les personnes vont s'en emparer. (...). Je ne vois pas ce qui peut empêcher le succès de l'opération, mais il faut monter en puissance", a déclaré le secrétaire d'Etat aux Transports, évoquant une nécessaire médiatisation de l'initiative: "il faut que le public soit au courant". D'où cette conférence de presse d'ailleurs...

La Fédération nationale des artisans du taxi a déjà démarché "dans différents départements" pour inciter un maximum de chauffeurs à télécharger gratuitement le service. Mais certains chauffeurs regrettent la multiplicité des applications (différentes pour les passagers et pour les chauffeurs) donnant accès à la plateforme. "Ils auraient dû créer une seule application nommée le.taxi qui aurait été la même pour les clients et pour les chauffeurs", estime ainsi un artisan présent à l'inauguration, qui regrette également la non-gratuité des applications pour les chauffeurs. "Cela varie entre 1 euro la journée sur Mon appli taxi (l'app d'Alpha Taxis) et jusqu'à trois euros la course pour certains", assurait un porte-parole d'Alpha Taxi. Selon lequel, les chauffeurs y gagneront tout-de-même par rapport aux cotisations mensuelles acquittées par les chauffeurs affiliés aux centrales de réservation, qui flirtent selon lui avec les 5.000 euros par an.

Concernant la lisibilité potentiellement affaiblie par la diversité des applications, du côté de la "start-up d'Etat" qui a développé le.taxi, on estime au contraire, que "si l'Etat avait été seul, il n'aurait pas eu les moyens de ses ambitions. D'où l'idée de multiplier les partenaires", pour la réalisation de ce projet qui a coûté 250.000 euros au contribuable et dont les frais de fonctionnement sont évalués à 500.000 euros par an.