Florange suspendu au projet Ulcos, lui-même très incertain

Par Dominique Pialot  |   |  490  mots
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Lors de son bras de fer avec Mittal, l'Etat français a obtenu de l'industriel indien qu'il maintienne les hauts-fourneaux dans un état de veille compatible avec la mise en oeuvre du projet de captage et stockage de CO2, Ulcos. Celui-ci doit y être déployé à partir de 2016, à condition qu'il soit sélectionné par le programme européen NER 300, le 13 décembre. Or rien n'est moins sûr, si l'on en juge par un premier classement publié par Bruxelles en juillet dernier.

En juillet dernier, Ulcos (Ultra-Low Carbon Dioxide Steelmaking, ou production d'acier à faibles émissions de carbone) se classait à la huitième et dernière place d'une première sélection de projets de captage et/ou stockage de CO2 présentée par Bruxelles dans le cadre de son programme NER 300, qui ne devrait in fine n'en financer que deux ou trois. Ce programme consiste à financer des technologies décarbonées à partir de la vente de 300 millions de permis d'émissions de CO2. Les 1,5 milliard d'euros rapportés par une première tranche de 200 millions de permis vendus doivent financer les projets qui seront sélectionnés d'ici à la fin de l'année.

Depuis juillet, Ulcos a mécaniquement regagné plusieurs places suite au désistement de quatre projets britanniques mais rien ne garantit qu'il fasse partie des premiers. Pour le savoir, il faudra attendre le 13 décembre, date à laquelle Bruxelles examinera à nouveau les dossiers, avant de rendre sa décision la 20.

240 millions d'euros attendus de Bruxelles

Ce projet, qui réunit les près de 50 industriels européens de la sidérurgie derrière le chef de file ArcelorMittal, consiste à capter le CO2 en sortie du haut-fourneau pour le compresser puis l'injecter dans des aquifères salins de 1500 à 2000 mètres de profondeur, pour lequel ArcelorMittal a obtenu des permis de recherche et d'exploration exclusifs signés par le ministre de l'Industrie de l'époque, Eric Besson, en octobre 2011.

La France, qui a promis pour sa part d'investir 150 millions d'euros dans Ulcos dans le cadre du grand emprunt, sur un coût total de 700 millions, a déposé auprès de Bruxelles une demande pour 240 millions d'euros. Outre une réduction de 50% des émissions de CO2 liées à la fabrication de l'acier, l'une des activités les plus émettrices qui soient, la technologie devrait permettre de diminuer de 25% la consommation de coke, tout en augmentant la productivité des réacteurs. Evidemment, l'effondrement du cours du carbone, qui plafonne ces jours-ci entre 6 et 7 euros la tonne alors que le captage et stockage de CO2 ne peut être rentabilisé en deçà de 30 à 50 euros, n'améliore pas l'équation économique.

Capter du CO2 en sortie d'un haut-fourneau à l'arrêt...

Mais tout cela n'a de sens que si les fourneaux fonctionnent, et si la chaîne de captage et stockage de CO2 dans son intégralité est prête à entrer en service au 1er janvier 2016. Le calendrier prévoit aussi que le captage débute fin 2013/début 2014, ce qui suppose que le haut-fourneau fonctionne... Une situation qui ressemble fort à un cercle vicieux... et risque de ne pas beaucoup séduire à Bruxelles. A moins que la France ne parvienne d'ici là à y faire valoir le rôle du projet dans l'avenir de la sidérurgie lorraine... Et dans le cas inverse, que deviendra Florange si Ulcos ne faisait pas partie des projets choisis par Bruxelles le 13 décembre? Les engagements de Mittal deviendront-ilsaussitôt caduques?