What's else ? Nespresso !

Par Pierre Angel Gay  |   |  363  mots
Par Pierre Angel Gay, directeur adjoint de la rédaction de La Tribune

C'est une histoire suisse. Une leçon de marketing, qui se traduit par la création de 230 emplois industriels dans un des pays au coût de main d'oeuvre les plus élevés au monde. L'inauguration ce mercredi, dans le canton de Vaud, d'une usine Nespresso couronne un savoir-faire exceptionnel, allant bien au-delà du désormais incontournable slogan publicitaire "What else" susurré par George Clooney.

Transformer un produit de masse, somme toute banal, en un "Louis Vuitton du café", pour reprendre l'expression d'un dirigeant de la société, était osé. Se passer, pour le vendre, des circuits classiques de la grande distribution au profit de l'Internet et d'un réseau minimaliste de boutiques-bar, était tout aussi hardi.

Ne pas vendre un Arabica à un client, mais un "crû" à un "membre du club", a définitivement fait entrer Nespresso dans l'univers du luxe, où le prix - la dosette de café est vendue trois à quatre fois plus cher qu'au kilo - ne compte plus. L'acheteur se croit élu. Il est, en réalité, prisonnier. Il s'inscrit dans ce que les Anglo-saxons appellent le "lock in". Autrement dit, il entre dans un système propriétaire. Impossible, en effet, d'utiliser une cafetière Nespresso sans y introduire les capsules du même nom.

Et de la cafetière, la société helvétique ne connaît que son design, soigné il est vrai. La fabrication, elle, est sous-traitée. C'est la capsule de café, la dosette qui fait 90% du chiffre d'affaires d'une des plus belles pépites de Nestlé : plus de 30% de croissance par an et une rentabilité à faire pâlir. Sur ce point, le groupe de Vevey n'a pas innové. Le "lock in", l'américain Gillette le pratique depuis des décennies avec ses rasoirs, à prix bradés, et ses lames hors de prix, à renouveler.

La méthode a, toutefois, ses exigences. Le système ne marche que si le consommateur est content de se faire piéger. Pour son dernier rasoir, Fusion, Gillette a investi pas loin de 2 milliards de dollars et déposé plus de 70 brevets. Pour protéger sa capsule des copies, Nespresso a fait mieux encore, avec 1.200 brevets. De l'excellence industrielle.