Touche pas à ma Sécu !

Par Ivan Best  |   |  497  mots
A écarter le social de ses thèmes de campagne, François Fillon prend des risques. Déjà, il dévisse dans l'électorat populaire, notamment à cause de ses projets concernant la sécurité sociale

Comment François Fillon, ancien ministre des Affaires sociales, a-t-il pu ? Comment a-t-il pu s'attaquer à la sécu, brisant avec l'inconscience fougueuse d'un pilote automobile amateur, un tabou absolu ? L'ex premier ministre de Nicolas Sarkozy aura beau répéter qu'il a été mal compris, qu'il remet l'ouvrage sur métier, concernant toute la partie de son projet touchant à l'assurance maladie, le mal est fait, électoralement parlant.

« François Fillon dévisse très nettement dans les milieux populaires » souligne le politologue Jérôme Fourquet. Du coup, il passe derrière Marine Le Pen dans les intentions de vote pour le premier tour de l'élection présidentielle,  chutant de 28 à 24%, selon dernier sondage Ifop.

Ne plus rembourser le petit risque

Il divise quasiment par deux son score au sein de l'électorat modeste (de 19% à 11%) et perd même des soutiens chez les retraités, colonne vertébrale de l'électorat de droite (-3 points à 38%). En cause, principalement : son programme concernant la sécurité sociale, mis au jour à la fin des débats de la primaire. La plupart des Français, aux revenus élevés, qui se sont déplacés pour cette primaire,  n'en ont cure. Mais d'autres sont prêts à le sanctionner pour cette prise de position. Elle n'avait pourtant rien de révolutionnaire : clarifier le partage des rôles entre assurance maladie et mutuelles, voilà un thème évoqué de longue date. Mais les électeurs attachés à leur "sécu" ont retenu que François Fillon voulait exclure du remboursement par l'assurance maladie le « petit risque », dont on sait mal où il s'arrête. Cette remise en cause d'une vache sacrée, ils n'en veulent évidemment pas.

François Fillon voudrait passer à autre chose, il a effacé de son programme officiel ce passage sur la sécu, mais la gauche socialiste, pourtant mal en point, insiste, et joue sur du velours sur ce sujet. Les proches de François Fillon ont beau répéter que leur candidat a été caricaturé, ils sont inaudibles. Et le pourtant très libéral Emmanuel Macron en profite pour annoncer sa volonté de rembourser à 100% les lunettes et les prothèses auditives. Lui a bien compris l'importance, aux yeux des Français, de notre système d'assurance maladie. Les électeurs acceptent donc qu'on leur parle de réforme, de remises en cause douloureuses, François Fillon fait de très bons scores parmi les fonctionnaires qu'il veut pourtant rudoyer, mais à entrer dans le vif du sujet, celui du social, et plus particulièrement la sécu, il y a beaucoup à perdre.

Le candidat des Républicains récuse tout "zig-zag". Droit dans ses bottes, il tient fermement à son projet. Mais quand viendra le temps de la confrontation, saura-t-il se faire comprendre des Français? A feindre de croire que le scrutin se jouera sur le régalien, sur le thème du redressement de la France, et non sur le social,  François Fillon risque quelques déconvenues...