Le pape Benoit XVI pour la séparation des banques ?

Par latribune.fr  |   |  540  mots
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Le pape Benoit XVI vient de donner une leçon au monde entier en décidant à la surprise général de renoncer à son pontificat, pour raison de santé. Cet intellectuel rigoureux a publié en juillet 2009 une Encyclique, « Caritas in veritate » sur le développement humain intégral dans la charité et la vérité. Un texte qui tentait de tirer les leçons de la crise financière de 2007-2008 et qui s'efforçait, quarante ans après « Populorum progressio » écrite en 1967 par Paul VI au début du Concile de Vatican II, de refonder la doctrine sociale de l'Eglise, face aux mutations considérables provoquées par la mondialisation et les nouvelles technologies. Il comporte des paragraphes assez visionnaires sur les défis de l'interdépendance entre les peuples et les économies, notamment en ce qui concerne l'environnement et le gaspillage des ressources. Enfin, comme vous pourrez le lire en lisant l'extrait ci-dessous (paragraphe 65 dans le chapitre V sur « La collaboration de la famille humaine »), le pape Benoit XVI y dénonce les « spéculations scandaleuses » et demande aux opérateurs financiers de « redécouvrir le fondement véritablement éthique de leur activité ». A relire, ainsi que l'Encyclique dans son entier, à l'heure où la France après les Etats-Unis et le Royaume-Uni s'interroge sur la réglementation des activités des banques sur les marchés.

CARITAS IN VERITATE

Chapitre V : la collaboration de la famille humaine (paragraphe 65)

Il faut enfin que la finance en tant que telle, avec ses structures et ses modalités de fonctionnement nécessairement renouvelées après le mauvais usage qui en a été fait et qui a eu des conséquences néfastes sur l'économie réelle, redevienne un instrument visant à une meilleure production de richesses et au développement. Toute l'économie et toute la finance, et pas seulement quelques-uns de leurs secteurs, doivent, en tant qu'instruments, être utilisés de manière éthique afin de créer les conditions favorables pour le développement de l'homme et des peuples. Il est certainement utile, et en certaines circonstances indispensable, de donner vie à des initiatives financières où la dimension humanitaire soit dominante. Mais cela ne doit pas faire oublier que le système financier tout entier doit être orienté vers le soutien d'un développement véritable. Il faut surtout que l'objectif de faire le bien ne soit pas opposé à celui de la capacité effective à produire des biens. Les opérateurs financiers doivent redécouvrir le fondement véritablement éthique de leur activité afin de ne pas faire un usage abusif de ces instruments sophistiqués qui peuvent servir à tromper les épargnants. L'intention droite, la transparence et la recherche de bons résultats sont compatibles et ne doivent jamais être séparés. Si l'amour est intelligent, il sait trouver même les moyens de faire des opérations qui permettent une juste et prévoyante rétribution, comme le montrent, de manière significative, de nombreuses expériences dans le domaine du crédit coopératif.


Une réglementation de ce secteur qui vise à protéger les sujets les plus faibles et à empêcher des spéculations scandaleuses, tout comme l'expérimentation de formes nouvelles de finance destinées à favoriser des projets de développement sont des expériences positives qu'il faut approfondir et encourager, en faisant appel à la responsabilité même de l'épargnant. L'expérience de la microfinance elle aussi, qui s'enracine dans la réflexion et dans l'action de citoyens humanistes - je pense surtout à la création des Monts de Piété -, doit être renforcée et actualisée, surtout en ces temps où les problèmes financiers peuvent devenir dramatiques pour les couches les plus vulnérables de la population qu'il faut protéger contre les risques du prêt usuraire ou du désespoir. Il faut que les sujets les plus faibles apprennent à se défendre des pratiques usuraires, tout comme il faut que les peuples pauvres apprennent à tirer profit du microcrédit, décourageant de cette manière les formes d'exploitation possibles en ces deux domaines. Puisqu'il existe également de nouvelles formes de pauvreté dans les pays riches, la microfinance peut apporter des aides concrètes pour la création d'initiatives et de secteurs nouveaux en faveur des franges les plus fragiles de la société, même en une période d'appauvrissement possible de l'ensemble de la société.


Retrouvez ici le texte complet de l'Encyclique de Benoît XVI : Caritas in veritate. Sur le développement humain intégral dans la charité et la vérité.