Charges sociales : le rêve envolé du Medef

Par Ivan Best  |   |  576  mots
Le coût du travail au Danemark atteint 41,6 euros de l'heure en moyenne, contre 35,2 euros en France (chiffres de 2012)
Le pays où les charges sociales ont été quasiment réduites à zéro, le Danemark, est aussi celui où le coût du travail apparaît le plus élevé. Quand le rêve du Medef de "zéro charge" tourne au cauchemar...

C'est le rêve du Medef : la fin des charges, avec des cotisations sociales ramenées à zéro ou presque. Un rêve fou, mais qui serait la clé du développement de l'emploi puisque le coût du travail s'en trouverait considérablement allégé, ainsi que l'affirment depuis des années les organisations patronales.

Un rêve dont on ne verra jamais le début de réalisation, tout au moins en Europe ?

Il est pourtant devenu réalité dans un pays européen, le Danemark. Dans ce petit pays, où les gens seraient les plus heureux du monde, selon certains classements,  les cotisations sociales (part patronale) ont été quasiment ramenées à zéro. Avec, comme heureuse conséquence, un coût du travail considérablement réduit ?

Le Danemark bat tous les records

Las, comme le relève l'Insee dans une note publiée ce mercredi, au Danemark, ce coût du travail est le plus... élevé d'Europe. Il atteint 41,6 euros de l'heure en moyenne, contre 35,2 euros en France (chiffres de 2012). Et pourtant, les prélèvements sur le travail, à la charge de l'employeur, sont limités au Danemark à 5,60 euros de l'heure, contre 11,90 euros en France.

Comment est-ce possible ? Avec des charges si faibles? Une erreur quelque part ? L'erreur serait peut-être de croire que c'est le mode de financement de la protection sociale qui est déterminant.

Ne serait-ce pas plutôt le niveau de celle-ci ? Car, au Danemark, pays où la dépense publique dépasse de peu le niveau français, en raison d'un filet de sécurité sociale encore plus serré, le financement de celle-ci apparaît beaucoup plus moderne qu'en France. En tous cas, conforme aux préconisations de la plupart des économistes.

Ainsi, il est largement fait appel à la TVA, dont le taux normal atteint 25% -avec très peu d'exceptions, contrairement à la situation française-, tandis que l'impôt sur le revenu est beaucoup plus lourd que dans l'Hexagone. Infiniment plus lourd !

L'impôt sur le revenu représente au Danemark 23,9% du PIB (selon l'OCDE), contre 7,9% en France, pour le total impôt sur le revenu-CSG.

Le résultat ? Les entreprises danoises, qui jouissent de cotisations très faibles, ont été contraintes d'augmenter les salaires, pour compenser ce niveau particulièrement élevé d'impôts sur les particuliers. Le salaire horaire moyen (brut) atteint 36 euros de l'heure au Danemark, contre 23,3 euros en France.

Pas de solution miracle

Cet exemple le montre, le "zéro charge" peut facilement virer du rêve au cauchemar, pour les employeurs. Il n'est en rien la solution miracle pour financer la protection sociale sans douleur aucune.

Le vrai moyen de baisser le coût du travail serait revoir drastiquement le niveau de cette protection sociale. L'Allemagne de Schröder l'a fait pour une part, en diminuant fortement les allocations chômage, tout comme le niveau des pensions. Cela explique largement l'écart croissant de dépenses publiques avec la France, où le poids des retraites, vieillissement de la population aidant, n'a cessé de croître.

En France comme en Allemagne, elles représentaient 10% du PIB au milieu des années 2000. Aujourd'hui, elles sont restées à 10% Outre-Rhin, mais ont grimpé à 14% de la richesse nationale dans l'Hexagone.

Mais c'est là, évidemment un choix de société : veut-on une proportion de retraités pauvres deux fois plus élevée qu'en France (cas allemand) ? Une assurance maladie réservée aux personnes âgées et aux indigents ?