Apple Watch : Apple est-il arrivé trop tard dans les smartwatches ?

Par Aurélien Duthoit, Precepta  |   |  595  mots
Xerfi Canal présente l'analyse d'Aurélien Duthoit, directeur des synthèses, Precepta
Apple est-il arrivé trop tard sur le marché des montres connectées ? Encore naissant mais déjà turbulent, ce marché est d’ores et déjà occupé par des géants de l’électronique comme Samsung et Sony, et par une constellation de start-ups comme Fitbit ou Pebble. Dit autrement, est-ce que le fait d’arriver le premier donne un avantage aux opérateurs déjà en place ?

L'avantage du pionnier est une certitude sur certains marchés, un mythe sur d'autres. Arrêtons-nous sur quatre questions permettant d'évaluer si, oui ou non, le retard d'Apple lui sera préjudiciable. Si l'on répond plutôt oui à ces questions, alors Apple n'a aucun souci à se faire. Si l'on répond non en revanche, Apple aura du mal à percer et devra vite gagner en parts de marché.

Le contrôle de certains actifs rares est une question secondaire ou non pour réussir ?

La réponse est clairement oui : aucune ressource critique n'a été préemptée par les opérateurs en place.

Côté distribution, Apple est son propre distributeur et dispose d'une force de frappe redoutable auprès de tous les distributeurs tiers majeurs. Côté main d'œuvre, Apple dispose d'équipes ayant fait leur preuve dans l'introduction de produits innovants, et peut attirer à lui n'importe quel talent. Ce qu'il a fait d'ailleurs en débauchant des cadres d'entreprises comme LVMH dans le luxe.

Côté attention enfin, aucun opérateur n'a encore frappé les esprits avec sa montre et imprimé son empreinte sur le marché. Au contraire, c'est bien Apple et sa marque qui pourraient contribuer le plus à évangéliser le marché.

La demande présente un caractère d'instabilité du fait de la transformation des usages et de modes ?

Concrètement, les positions sont-elles figées sur un marché atone ou au contraire mouvantes sur un marché croissance ? La réponse est ici plutôt oui.

Certes, les volumes écoulés ne pas encore très élevés et Samsung est le seul opérateur à se détacher de la concurrence en termes de volume, mais les nouveaux entrants affluent, les fonctionnalités s'affinent et les produits se démodent rapidement. En un mot, les avantages bâtis ne seront pas durables.

L'offre, du fait de la technologie, présente un caractère d'instabilité ?

Est-ce que le design dominant reste à trouver, est-ce que les nouveaux produits apportent de nouvelles fonctionnalités, est-ce que la possibilité d'un grand bond en qualité est envisageable ?

La réponse, comme dans tous les segments du marché des objets connectés, est clairement oui. Empiriquement, la possibilité d'une amélioration forte et continue de l'offre par la technologie conduit à une émulation et une concurrence rendant le marché instable.

D'éventuels effets de réseau en place sont négligeables ?

On parle d'effets de réseau quand la valeur d'un bien ou d'un service pour un utilisateur dépend du nombre des autres utilisateurs ou d'autres parties prenantes présents sur cette même plateforme. Si les effets de réseau sur un marché sont non-négligeables, alors le premier à les déclencher partira avec un fort avantage. La réponse ici est plutôt non : Apple doit vite riposter pour ne pas laisser Google capturer tout un écosystème de développeur d'applications, de fabricants d'accessoires, de concepteurs de solutions technologiques publicitaires et d'annonceurs s'installer, pour de bon, sur des montres utilisant Android.

Si l'on reprend notre matrice et que l'on répond à ces quatre questions, il apparaît ainsi assez nettement que le retard relatif d'Apple n'est pas du tout rédhibitoire, mais que le groupe a raison de se presser. Reste alors à déterminer si le mouvement d'Apple était défensif, visant à ne laisser aucun espace libre à la concurrence, ou au contraire offensif, visant à transformer ce qui n'est qu'une niche en marché de masse.

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