Le programme Fillon augmenterait le chômage

Par Dominique Villemot  |   |  590  mots
La réduction du déficit public à marche forcée aurait un effet récessif. Le programme économique de François Fillon casserait la reprise. Par Dominique Villemot, Avocat, Président d’honneur de Démocratie 2012*

Le programme économique et social de François Fillon peut se résumer en quatre points : 100 milliards d'économies budgétaires, 50 milliards de baisses d'impôts, le passage de 62 à 65 ans de l'âge minimal pour prendre sa retraite et la suppression de la durée légale du travail. Ces mesures seront très dures sur le plan social, mais leur radicalité, serait toutefois acceptable si elles permettaient de résoudre le principal problème de la France, c'est-à-dire le chômage.

Hélas on peut craindre qu'il n'en soit rien, voire qu'au contraire un tel programme ne fasse repartir le chômage à la hausse.

 50 milliards d'euros de baisse du déficit, un choc récessif

Le déficit budgétaire aura baissé de 2,3% du PIB durant le quinquennat de François Hollande, de 5,2% en 2011 à, selon les prévisions de la Commission européenne, 2,9% en 2017, ce qui permettra de respecter le pacte de stabilité européen et de stabiliser le taux d'endettement public. La hausse du chômage durant les trois premières années du quinquennat s'explique en grande partie par cette politique. Aujourd'hui, les trois membres de la Troïka, le FMI, la BCE et même la Commission européenne, disent qu'il faut soutenir la croissance via une relance budgétaire. Une nouvelle baisse du déficit, de 50 milliards (différence entre les 100 milliards d'économies budgétaires et les 50 milliards de baisse d'impôts), soit 2,5% du PIB, créerait un nouveau choc récessif qui pèserait sur notre croissance déjà pas si élevée et entrainerait une remontée du chômage.

 Et ce d'autant plus que les deux autres mesures auront elles-aussi un impact négatif sur l'emploi.

 Hausse du chômage des seniors

La décision en 2010 de porter à 62 ans l'âge légal de départ en retraite a en effet amené de nombreux seniors à rester sur le marché du travail augmentant mécaniquement le taux de chômage les années suivantes. Alors que les effets de cette décision sont désormais à peu après absorbés, une nouvelle augmentation de ce seuil, à 65 ans, recréerait de nouvelles tensions sur le marché du travail.

 De même, la fixation de la durée du travail, non plus par la loi mais par accord collectif, avec pour objectif de mettre fin aux 35 heures, aura pour conséquence de relever la durée effective du travail et donc de réduire automatiquement les besoins en emplois des entreprises. François Fillon l'admet d'ailleurs, puisqu'il explique que les suppressions d'emplois dans la fonction publique seront compensées par l'augmentation de la durée du travail des fonctionnaires.

 Un programme qui casse la reprise

L'application du programme de François Fillon casserait donc le double mouvement de reprise de la croissance et de baisse du chômage que nous connaissons depuis la mi-2015, grâce notamment aux baisses de charges (CICE et pacte de responsabilité). Cela consisterait à asséner à notre pays une cure d'austérité comme celle qu'ont subie l'Espagne et la Grèce depuis 2012. La conséquence en a été une hausse du taux de chômage à 25%. L'Espagne s'en remet à peine et la Grèce ne redémarre toujours pas. Comme indiqué ci-dessous, aujourd'hui les trois membres de la Troïka ne préconisent plus de telles purges.

 Le programme de François Fillon est donc daté et nocif pour l'emploi.

* Dominique Villemot, Avocat, Président d'honneur de Démocratie 2012,
Auteur de « François Hollande : le courage de réformer » (Privat)