Dans le match de la croissance, l’Ile-de-France fait mieux que la France

Par Jean-Pierre Gonguet  |   |  782  mots
Le dynamisme des activités immobilières a été à peu près inexistant (3%) et les services spécialisés à haute valeur ajoutée ont été en recul (-3%).
Il y a bel et bien eu croissance dans la région capitale en 2014 et elle a été de 2%. C’est ce que révèlent les statistiques du tout nouvel Obervatoire de l’économie francilienne mis au point par l’ordre des experts comptables et l’économiste Nicolas Bouzou. Mais, deuxième surprise, cette croissance n’est pas forcément dans les secteurs où on l’attendait

Sur la base des données recueillies par les experts comptables l'Ile de France a eu en 2014 une croissance deux fois supérieure à la croissance nationale. Un résultat tout à fait étonnant. Pas dans le sens de la pensée mainstream sur le sujet. Certes il faut nuancer. D'abord parce que la croissance en Ile de France n'a été que de 2% en 2014 et la croissance nationale de, très vraisemblablement, 1%. Ensuite parce ce que les données statistiques ne concernent que les PME et les TPE. Celles-ci ont beau être le moteur de la croissance il manque les grandes entreprises qui pullulent dans la région. Mais « L'observatoire de l'économie francilienne » que vient de mettre au point l'ordre des experts comptables d'Ile de France devrait pouvoir y faire quelque chose.

Des données fraiches et incontestables

L'idée est simple : ils sont les seuls à avoir aujourd'hui en temps réel l'activité des entreprises. Chaque mois, chaque trimestre ils collectent les déclarations de TVA et les déclarations de cotisations sociales. Soit le chiffre d'affaires et l'activité de toutes les TPE et PME, les grandes entreprises ayant généralement une comptabilité interne. Et, comme chaque année, ils constituent les liasses fiscales, ils peuvent corriger les éventuels distorsions mensuelles ou trimestrielles. Ce sont donc, à côté des données des URSSAF et de l'ACOSS, les seules données qui permettent aujourd'hui de saisir la conjoncture économique d'une région, d'un département ou d'une ville. Jamais l'INSEE, malgré les demandes répétées de tous les économistes du territoire comme des élus locaux, n'a en effet mis au point de systèmes statistiques permettant de saisir avec finesse la réalité d'un PIB par régions ou grands territoires. C'est donc de la donnée fraiche et incontestable que réunissent les experts comptables.

« On va enfin connaitre l'impact des politiques publiques en temps réel »

Comme l'explique Nicolas Bouzou, économiste et fondateur d'Asteres le cabinet qui a travaillé à la mise en place de la base et de l'exploitation des données :

« On va enfin pouvoir s'attaquer au problème majeur de l'évaluation des politiques publiques et voir, en temps quasi réel, ce qui fonctionne ou pas. Depuis des années on parle de tout et de rien sur les politiques publiques mais en fait on ne sait rien. Il faut que cette base serve à cela ».

Et les premiers résultats qui portent sur les entreprises entre 20 000 et 50 millions d'euros de CA sont assez précieuses et vont permettre avec les prochaines publications dans l'année, d'alimenter sérieusement le débat pour les élections régionales. Evolution favorable de l'activité des entreprises en 2014 avec, pour principaux leviers, les secteurs du commerce et de la construction. D'abord selon l'Observatoire, le chiffre d'affaires des 5000 entreprises franciliennes ayant déclaré leur TVA en 2014 est en hausse de 2% sur un an. Ensuite les secteurs du commerce et de la construction, qui représentent un quart des entreprises d'Ile-de-France, contribuent le plus à la croissance de l'économie régionale. L'activité dans ces deux secteurs clés, qui comptent respectivement pour 25% et 13% du chiffre d'affaires des entreprises franciliennes a progressé de 5% sur un an.

Les secteurs traditionnels sont en croissance, pas les services à haute valeur ajoutée

En revanche le dynamisme des activités immobilières a été à peu près inexistant  (3%) et les services spécialisés à haute valeur ajoutée ont été en recul (-3%). Or « ces deux secteurs constituent le cœur de l'économie francilienne, ils représentent plus du tiers des entreprises de l'échantillon, réalisent 10% du chiffre d'affaires total et regroupent 15% des effectifs ». En clair, la croissance n'a pas été là où on pouvait l'attendre et a été portée par des secteurs très traditionnels.


«C'est d'ailleurs essentiellement à cause de l'implantation des centres commerciaux, explique Nicolas Bouzou, qu'un département comme la Seine Saint Denis affiche une forte croissance de 6%  ou que, à cause de la construction, le Val de Marne est le n'°1 de la croissance en Ile de France avec 14% »

Pour l'instant les données des experts comptables n'ont pas encore été toutes exploitées et cela devrait être réalisé pour le prochain baromètre de conjoncture d'ici 3 mois. Mais elles permettent de dégager une première conclusion : «l'Ile de France a une question essentielle à résoudre, assure Nicolas Bouzou, celle de l'innovation en liaison avec l'attractivité résidentielle ». Il a d'ailleurs réalisé deux focus dans l'étude l'un sur l'innovation, l'autre sur la construction, qui montrent que la question essentielle pour l'Ile de France est d'attirer encore plus de créatifs et de leur permettre d'habiter sur le territoire.