Trois propositions pour accélérer la mue numérique de l'école

Par Delphine Cuny  |   |  631  mots
Gilles Babinet, président du Conseil national du numérique Copyright Reuters
Dans un rapport publié vendredi, le Conseil national du numérique dresse une liste de recommandations pratiques pour aller du seul équipement matériel. En résumé, plus de coordination au niveau régional et plus de dialogue avec le privé.

L?Internet et les technologies encore trop souvent oubliés dans le système éducatif ? C?est l?avis du Conseil national numérique, qui vient de publier vendredi un rapport sur le sujet, à l?issue de plusieurs mois de travail et l?audition d?une cinquantaine de personnalités des mondes de l?éducation, de l?édition et du numérique. Selon Gilles Babinet, le président du CNN, un organe consultatif installé en avril 2011 par le Président de la République pour éclairer les choix de l?Etat en la matière, « le numérique bouleverse notre façon d?apprendre, de vivre et de travailler, et pourtant l?Ecole fait quasiment l?impasse dessus ». Malgré des « moyens considérables consacrés au numérique à l?école », le CNN déplore que « près de 100.000 écoliers sortent tous les ans du CM2 sans maîtriser les compétences de bases » de l?usage des technologies et de l'Internet et estime que « le potentiel offert par le numérique reste encore très peu exploité. »

Des agences régionales pour piloter les projets

Dans son rapport, qui comporte trois propositions concrètes pour accélérer la mue de l?école, le CNN relève que si « 300 millions d?euros sont dépensés chaque année par les collectivités dans l?acquisition des manuels scolaires papier, auxquels il faut ajouter 100 millions de dépenses annuelles en photocopies, seulement 20 millions d?euros ont été consacrés à des dépenses en ressources numériques (logiciels et manuels) en 2010, soit en moyenne 2 euros par an et par élève. » Par ailleurs, les départements investissent chaque année 250 millions d?euros dans le numérique pour le collège, mais essentiellement en équipements. L?éclatement des responsabilités entre les collectivités (région pour les lycées, département pour les collèges, mairie pour les écoles primaires) est un des freins identifiés. La première proposition est ainsi la création d?agences régionales, des « structures de mutualisation », sous forme de GIP par exemple, sur la base du volontariat des collectivités, afin de garantir la cohérence et la pérennité des projets numériques au niveau d?une académie.

Plus de collaboration avec le monde des entreprises

Deuxième recommandation : créer un organe consultatif indépendant, sur le modèle du Haut conseil de l?éducation, composé de personnalités des mondes de l?enseignement et des entreprises du numérique, auquel serait confiée une mission d?animation, de réflexion et de coordination des projets portant sur l?école numérique. Il s?agit de développer un écosystème public-privé dans ce domaine. Troisième suggestion : mettre en place un portail unique destiné aux enseignants rassemblant toutes les ressources pédagogiques numériques disponibles, qui sont aujourd?hui « foisonnantes mais sans visibilité ». Doté d?un moteur de recherche et d?un système d?indexation collaboratif, ce portail permettra un accès centralisé et simplifié sans se substituer aux « innombrables » sites existants. Sa création serait placée sous la responsabilité du Centre national de documentation pédagogique (CNDP) et du CNED (centre national de l?enseignement à distance), mais en faisant appel au « savoir-faire développé par des acteurs privés réputés en matière d?ergonomie et d?architecture pour la réalisation et l?exploitation d?une telle plateforme. » Si le rapport ne se penche pas sur les usages pédagogiques du numérique ni sur la formation des enseignants, son ambition est d?éviter l?apparition d?une « fracture 2.0 », car l?absence de maîtrise des outils numériques est indéniablement un « facteur de reproduction voire d?aggravation des inégalités sociales. »