Le « son parfait » de Devialet s’invite à bord des automobiles du futur

Par Sylvain Rolland, à Las Vegas  |   |  857  mots
(Crédits : iStock)
En partenariat avec l’équipementier Faurecia, la startup française d’électronique grand public a dévoilé au CES un prototype d’Audi équipé d’un système sonore bluffant. Une étape importante dans sa stratégie de diversification.

Après la box Delta de Free et les dernières enceintes intelligentes de Huawei et d'Altice USA, le son ­Devialet arrive dans les voitures. La start-up parisienne a dévoilé au CES 2020 de Las Vegas le fruit de son partenariat, annoncé un mois plus tôt, avec l'équipementier français ­Faurecia. Devant le Las Vegas Convention Center, les deux entreprises ont dévoilé avec fierté leur prototype, une voiture Audi dont le système audio a été entièrement remplacé par la technologie Devialet. La Tribune a pu comparer « l'avant-après » et le résultat est bluffant.

« Faurecia a apporté son expertise en conception électronique et en intégration de systèmes ; et de notre côté, nous leur fournissons sous licence notre technologie brevetée SAM [pour ­Speaker Active Matching, ­protégée par plus de 160 brevets, Ndlr], que nous utilisons pour nos enceintes Phantom », explique Franck ­Lebouchard, le CEO de Devialet.

Les deux entreprises n'ont eu besoin que de quelques semaines pour concevoir leur prototype, c'est-à-dire remplacer intégralement le système audio d'une voiture Audi par celui de Devialet, qui se caractérise par une amplitude et une profondeur de son exceptionnelles. Le cockpit et l'emplacement des enceintes dans l'habitacle ont été modifiés pour intégrer dix haut-parleurs dans la voiture.

Mais à quoi peut bien servir un son parfait dans une voiture, un environnement bruyant où il suffit d'ouvrir la vitre pour constater sa déperdition spectaculaire ? « Il est vrai que la voiture aujourd'hui est bruyante et c'est pour cela que le son actuel n'est pas entièrement satisfaisant et a besoin d'être optimisé », réagit une porte-­parole de Faurecia, qui cite des études qualité montrant l'importance qu'accordent les consommateurs aux options audio dans un véhicule. Mais surtout, l'équipementier anticipe le coup d'après, quand les voitures seront électriques et autonomes, donc beaucoup moins bruyantes, et que le conducteur devra s'occuper pendant les trajets.

« L'habitacle d'une voiture a vocation à devenir un lieu de détente et de travail. Proposer un son d'une grande qualité sera crucial », affirme Franck Lebouchard.

À l'affût de cette évolution des usages, Devialet a fait entrer Renault à son capital dès 2016, lors d'une levée de fonds spectaculaire de 100 millions d'euros, menée par le constructeur français avec le japonais Sharp, le taïwanais Foxconn et le fonds de capital-­risque Korelya Capital, de Fleur Pellerin. Devialet et Renault ont ensuite réalisé ensemble, fin 2017, un concept car baptisée ­Symbioz, présentée comme « la voiture de demain ».

Apporter une image haut de gamme

Pour l'heure, Devialet, qui emploie 400 employés dont la moitié en France, reste avant tout une start-up d'électronique grand public. « 80% de notre chiffre d'affaires vient de nos enceintes Phantom et de ses déclinaisons », rappelle Franck Lebouchard. Avec une croissance des revenus de « plus de 50 % en 2019 », cette activité se porte très bien, au point que ­Devialet a été sélectionné pour intégrer l'indice Next40 de la French Tech, dont l'un des critères est une hypercroissance de plus de 30 % par an sur les trois dernières années.

Mais si les enceintes Phantom sont amenées à rester le cœur de métier de Devialet, l'entreprise s'est trouvé un relais de croissance extrêmement prometteur : la vente de licences d'exploitation de sa technologie à des acteurs industriels de différents secteurs. « L'idée est de garder notre identité grand public, mais d'ajouter aussi la brique professionnelle, car proposer une excellente qualité de son devient un enjeu majeur dans de nombreux secteurs d'activité, à commencer par la maison intelligente et l'automobile », estime l'entrepreneur.

À ce jour, ce business est embryonnaire, mais il pèse déjà 20 % du chiffre d'affaires. Il prend la forme de partenariats dans lesquels la marque Devialet vient apporter son image haut de gamme à un produit intégrant du son. Xavier Niel, le PDG de Free, a été le premier à franchir le pas avec sa box Delta, annoncée en décembre 2018. Dans la foulée, ­Devialet a signé en août 2019 avec Altice USA pour équiper son enceinte domotique intelligente Amplify, puis en novembre avec Huawei, également pour une enceinte.

Conquérir l'industrie automobile

Le partenariat avec Faurecia marque ainsi la volonté de Devialet de conquérir l'industrie automobile, même si aucun projet concret de modèle de voiture intégrant la technologie Devialet n'a pour l'instant été annoncé. Mais ce secteur est perçu comme une mine d'or potentielle, d'autant plus que, malgré l'entrée au capital de Renault, la start-up est libre de signer avec n'importe quel équipementier.

« L'intégration de notre technologie dans la voiture équipée par Faurecia a été rapide et simple. C'est très important, car cela signifie qu'on peut révolutionner l'expérience du son dans la voiture, y compris dans les modèles existants et sans grand chambardement dans le hardware de la voiture », se réjouit Franck ­Lebouchard.

L'entrepreneur s'autorise du coup de grandes ambitions. « Nous voulons que le son Devialet devienne un standard de qualité dans les voitures. Chaque modèle qui revendique un certain standing doit être équipé de notre son. »