Hadopi, deux ans d'activité... 14 dossiers transmis au parquet

Par Sandrine Cassini  |   |  743  mots
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Selon la Haute Autorité de protection des œuvres, 95 % des internautes obtempèrent après le 1er avertissement. Les plus indomptables risquent une coupure de leur accès Internet pour avoir téléchargé et mis à la dispositions trois ou quatre films.

A quoi ne sert pas Hadopi ? A faire de la répression à grande échelle. Car en deux ans d?activité, la Haute Autorité pour la Protection des droits sur Internet (Hadopi) n?a transmis au parquet "que" 14 dossiers d?internautes qui téléchargent illégalement. Sur les millions d?internautes, seuls 14 sont susceptibles d?être condamnés par la justice, autrement dit de voir leur accès Internet coupé pendant trois mois et d?écoper de 1.500 euros d?amende.

Visiblement, la dissuasion suffit. "Nous avons envoyé 1,15 million de premiers mails d?avertissement. On s?aperçoit que 95 % des personnes averties ne font pas l?objet de pratiques illicites après la première recommandation", s?est félicitée la présidente de la Commission de protection des droits (CPD) de l?Hadopi, Mireille Imbert Queretta.

340 dossiers instruits

En effet, l?Hadopi n?a eu besoin d?envoyer que 100.000 lettres, faisant office d'un deuxième avertissement, aux récalcitrants. La quasi-totalité est revenue dans le droit chemin. En bout de course, l?Hadopi n?a eu à instruire que 340 dossiers. Au lieu comme le prévoit le texte d?avertir par lettre les abonnés que cette fois, leur dossier allait être transmis au parquet, l?Autorité a décidé de les convoquer pour leur expliquer la situation. "Nous voulions provoquer une réaction. 75 % ont répondu. Nous avons procédé à plus de 30 auditions. Nous nous sommes rendus compte qu?il y avait une forte méconnaissance du droit d?auteur", a défendu Mireille Imbert Queretta.

Pourquoi certains mettent-ils du temps à se plier à l?injonction de l?Autorité ? "En général, à la première recommandation, il y a un conseil de famille pour dire qu?on arrête. Mais au lieu de désinstaller, ils mettent le logiciel à la corbeille, qui continue à fonctionner", complète la présidente du CPD. L?Autorité a in fine promis de stopper la procédure à tous ceux qui promettaient de ne pas récidiver. A qui l?Hadopi a-t-elle eu affaire ? Le plus souvent, il semble que ce soit le jeune qui vit toujours chez ses parents qui soit l?auteur des faits. "Nous avons eu notre première coupure Internet de trois mois. Elle a été prononcée en juillet par un père de famille exacerbé par le comportement de son fils", a plaisanté Mireille Imbert Queretta.

Les plus indomptables ont téléchargé 6 ou 7 oeuvres

Une chose est sûre, les plus indomptables, dont les dossiers ont été transmis au parquet, sont loin d?avoir le profil de "l?internaute glouton", qui, pire, pourrait faire du commerce de son activité de téléchargement. L?un d?entre eux risque de voir sa connexion coupée pour 3 morceaux de musique (dont "Les Yeux de mon Père" de Michel Sardou et "Caravane" de Raphaël), et 4 films ("Il reste du jambon", "The Green Hornet" et "Very Bad Trip 2"...). Un autre va faire l?objet d?une procédure judiciaire pour 6 ?uvres (dont "Robin des bois", "600 kilos d?or pur", "Rien à déclarer" et "Expendables : Unité Spéciale"?

30 % des téléchargements concernent un seul fichier

Dans tous les cas, et contrairement à l?idée reçue, le téléchargement à tout va ne semble pas être une généralité. "30 % des échanges concerne un fichier téléchargé et mis à disposition", a précisé Mireille Imbert Queretta. Elle a aussi rappelé que c?était les ayants-droits qui saisissaient l?Hadopi pour lui indiquer quel fichier il fallait repérer. "Nous ne connaissons même pas le catalogue auquel ils se réfèrent. On a juste remarqué qu?en général, cela suivait la chronologie des médias [le calendrier des fenêtres d?ouverture des films à la VOD, au DVD?]". Evidemment, l'Hadopi ne comptabilise pas le streaming, et ne peut voir les stratégie de contournement mises en place par les internautes...

"Mission accomplie"

Si c'était la sanction qui était visée, il n'y aurait pas eu besoin de mettre en oeuvre ce dispositif, car le délit de contrefaçon existe. L'objectif était de faire en sorte que ce genre de délit ne relève pas du tribunal correctionnel. On ne peut pas dire qu'il n'y ait pas d'impact, même si nous sommes modestes", a conclu la présidente.


Repères :

> VOIR notre DIAPORAMA : les 10 films les plus téléchargés illégalement depuis 2006