Aux Pays-Bas, les héritiers de Tintin perdent leur premier procès

Par latribune.fr  |   |  606  mots
Moulisart est souvent critiquée pour défendre de manière très agressive l'héritage laissé par le dessinateur.
Attaquée en justice par Moulinsart S.A., une association de Tintinophiles a obtenu un document datant de 1942 dans lequel le dessinateur cède le droit exclusif de publication des albums des aventures de Tintin à l'éditeur Casterman. Les deux groupes se sont pourvus devant l'équivalent de la Cour de cassation.

| Article publié le 08/06 à 18h38, mis à jour le 10/06 à 14h30.

Une victoire de taille pour les Tintinophiles : les héritiers de Hergé ne peuvent pas réclamer de droits pour l'utilisation d'extraits d'albums de Tintin, a décidé la justice néerlandaise, et cela, grâce à un document signé en 1942 par le dessinateur du célèbre reporter à la houppe. Dans leur décision, prise fin mai et envoyée lundi 8 juin à l'AFP, les juges de la Cour d'appel de La Haye indiquent que, au vu du document en question :

"Moulinsart n'est pas celui qui peut décider de qui peut publier des images tirées des albums et ne dispose donc pas des droits d'auteurs pertinents dans cette affaire."

Obtenu grâce à un expert de Hergé - resté anonyme -, le document précise en effet que le dessinateur cède le droit exclusif de publication des albums des aventures de Tintin à l'éditeur Casterman. Il n'est pas contesté par la société Moulinsart et les héritiers de Georges Rémi, alias Hergé, selon les juges.

Souvent critiquée pour défendre de manière très agressive l'héritage laissé par le dessinateur, Moulinsart SA, la société chargée de l'exploitation commerciale de l'oeuvre de Hergé (produits dérivés, multimédia, applications...), avait attaqué en justice début 2012 une petite association néerlandaise de fans de Tintin, la "Société Hergé". Celle-ci édite un magazine tri-annuel destiné aux membres intitulé "Duizend Bommen" et dont les articles sur l'œuvre et la vie de Hergé y sont illustrés de vignettes tirées des albums en question.

À Casterman de décider s'il veut interdire ou non

Ce jugement pourrait coûter cher à Moulinsart, s'il faisait jurisprudence : "La grande question, c'est de savoir s'ils (d'autres sociétés de fans) doivent continuer à payer Moulinsart", a affirmé à l'AFP Stijn Verbeek, le secrétaire de la Société Hergé. Une association belge similaire, les "Amis de Hergé", a affirmé qu'il était néanmoins "trop tôt" pour pouvoir dire quelles seront les conséquences du jugement de La Haye.

Interrogé par Le Figaro, Emmanuel Pierrot, avocat parisien spécialiste du droit de l'édition, explique que Moulinsart peut toujours "demander des recours devant l'équivalent d'une cour de cassation", mais également "mettre au clair la situation avec Casterman" car c'est désormais à eux que revient le choix d'interdire ou non la publication de vignettes. Ajoutant:

"Casterman mène une politique plus cool vis-à-vis des Tintinophiles que Moulinsart et est plus à même de comprendre que le marché des albums de Tintin et la longévité de l'œuvre passent aussi par l'amour que l'on voue aux bandes dessinées."

Un sentiment que la société Moulinsart n'a vraisemblablement jamais compris.

Un jugement contesté

Face à ce jugement largement en sa défaveur, la société chargée de l'exploitation commerciale de l'oeuvre d'Hergé au nom de ses héritiers a décidé le 10 juin  de saisir la Cour suprême des Pays-Bas.

"De manière laconique, la cour semble avoir fait une totale confusion entre les droits sur Tintin détenus respectivement par Moulinsart SA et les Éditions Casterman", estiment les deux groupes, se disant "étonnés" de la décision de la Cour d'appel de La Haye.

S'ils reconnaissent bien que Casterman possède les droits d'édition en toutes langues et pour le monde entier des albums papier Tintin, ils ajoutent que "tous les autres droits sont restés propriété d'Hergé, y compris les vignettes et autres dessins des albums exploités séparément", contre-disant ainsi la décision de justice.

(Avec AFP)