SFR remonte sur le ring du mobile

Par Delphine Cuny  |   |  1228  mots
Stéphane Roussel, le nouveau PDG de SFR, veut prouver que l'opérateur a un coup d'avance. DR.
Le deuxième opérateur français a refondu sa grille tarifaire et contre-attaque sur la qualité et la rapidité réseau. Il lancera dans un mois une nouvelle marque 100% en ligne qu'il annonce comme une vraie révolution face à Free Mobile.

Perçu comme moins réactif que Bouygues Telecom et Orange à l'assaut de Free Mobile, un sentiment renforcé par le départ brutal de son PDG Frank Esser fin mars puis de son remplaçant par interim Jean-Bernard Lévy, l'ex-patron de Vivendi, SFR revient dans la bagarre avec une série d'initiatives censées montrer que l'opérateur renoue avec «son esprit pionnier» et va «reprendre ce coup d'avance, ce quart d'heure d'avance» selon le nouveau PDG, Stéphane Roussel, ex-DRH de Vivendi. Simplification et refonte de la grille tarifaire, lancement d'une version turbo de la 3G puis de la 4G fin novembre à Lyon, en attendant une nouvelle marque «100% digitale» qui sera présentée dans un mois, voici ce qu'il faut retenir des annonces de la conférence de presse de lundi midi.

Des forfaits moins chers et plus généreux
«C'est une grosse offensive», selon le directeur général grand public et professionnels de SFR Frank Cadoret. L'opérateur aux 20,79 millions de clients a remis à plat toute sa grille tarifaire, ramenée de 38 offres il y a deux ans à 13 en mars dernier et 6 aujourd'hui. Les nouvelles formules Carrées* sont moins chères que les actuelles qui comptent 6 millions d'abonnés, même si SFR ne précise pas de combien. Le nouveau forfait 1heure à 14,99 euros (avec un téléphone et un abonnement sur 24 mois) est 2 euros moins cher que le Carré Mini équivalent qui existait jusqu'ici, le forfait 2heures et 500Mo à 24,99 euros est 4 euros moins cher que le carré Connect avec seulement 250 Mo. En revanche le forfait appels illimités et à 500 Mo à 39,99 euros est 99 centimes plus cher que le Connect Illimité d'avant ! Le forfait phare à 49,99 euros (appels illimités et 2 Go) est 20 euros moins cher que le Carré Absolu International mais sans les appels vers l'étranger. Enfin, SFR crée de nouveaux forfaits pour les très gros consommateurs de données, 4Go à 69,99 euros et 6Go à 89,99 euros, qui n'existaient pas auparavant. Il leur ajoute des services que devraient apprécier les technophiles: une deuxième carte SIM pour une tablette dont la consommation est soustraite du forfait smartphone, un abonnement au service de stockage à distance Dropbox pour 2Go supplémentaires (en plus des 2 Go gratuits en standard de ce service de «cloud») et l'accès à un réseau plus rapide selon la technologie «Dual Carrier» à 42 Mégabits par seconde, contre 21 Mbps pour la 3G+ actuelle. Car «le réseau reste notre priorité», martèle Stéphane Roussel.

«Nous serons les premiers à lancer la 4G»
«Vous allez voir, la 4G, nous serons les premiers à la lancer», s'est targué le nouveau PDG de SFR. Le directeur des réseaux, Pierre-Alain Allemand, a annoncé «l'ouverture commerciale de la 4G à Lyon le 28 novembre», pour les clients grand public et entreprises. Et SFR promet que les tarifs seront les mêmes que les nouvelles offres Carrées dévoilées ce lundi. Orange et Bouygues Telecom ont lancé fin juin leurs services 4G à Marseille pour l'un et Lyon pour l'autre mais il s'agit encore d'expérimentations à grande échelle sans offre commerciale. SFR indique qu'il proposera «une gamme complète de terminaux» compatibles (5 à 6 tablettes et smartphones). Le lancement commercial dans d'autres villes (notamment Montpellier) sera échelonné entre fin 2012 et début 2013. Quant à Paris, plus difficile à couvrir malgré le déblocage de la situation avec la mairie, il faudra sans doute attendre plus longtemps, vraisemblablement un an, même si des quartiers périphériques comme La Défense pourraient goûter à la 4G plus tôt.
Au sujet de la réutilisation des fréquences GSM pour la 4G réclamée par Bouygues Telecom (dans la bande de 1.800 Mhz), et qui aurait permis de faire de la 4G avec l'iPhone 5, Stéphane Roussel rappelle que SFR a «dépensé plus de 1 milliard d'euros» pour ses fréquences 4G et qu'il serait donc «juste de respecter au moins un an, à partir de maintenant, soit 2 ans après les enchères 4G» avant de procéder à ce «refarming» des fréquences selon le terme employé dans le jargon des télécoms.
En attendant, SFR roule des muscles avec sa technologie «Dual Carrier» (gageons que les consommateurs vont adorer cette appellation limpide), qui couvre actuellement «plus de la moitié de la population» et 60% à la fin de l'année. «Vous avez déjà la vitesse 4G avec la Dual Carrier, environ 8 à 10 Mbps en téléchargement, ça change complètement l'expérience client, on n'attend plus pour les vidéos, c'est instantané», plaide Frank Cadoret. Or la «H+» d'Orange commence à 21 Mbps, se plaît à souligner SFR. «Nous avons fait le pari de cette technologie il y a deux ans et les fabricants de terminaux la mettent en avant aujourd'hui, comme Apple et son iPhone 5», relève Pierre-Alain Allemand.

La marque en ligne Red engrange 160.000 clients en deux mois
Souvent jugé plus timoré que Bouygues Telecom avec sa marque en ligne B&You, qui s'est aligné sur les tarifs de Free Mobile, ou qu'Orange avec Sosh, SFR reconnaît avoir accéléré avec sa gamme Red sur le segment d'entrée de gamme («low-price»). Red, qui reste plus chère que Sosh, Free et B&You, revendique 460.000 clients contre 300.000 à fin juin annoncés à la publication des résultats de Vivendi le 30 août, soit 160.000 conquis en deux mois. Frank Cadoret reconnaît que ce sont à 80% des abonnés de SFR susceptibles de partir à la concurrence et que l'opérateur a été «très proactif» à l'égard de cette cible durant l'été. Red est clairement un outil de rétention, un moyen de garder des clients dans le giron de SFR, qui prépare en parallèle une offre de conquête, baptisée pour l'instant «Joe Mobile».

SFR fait du teasing sur sa future marque «digitale»
Le PDG Stéphane Roussel a fait un peu de teasing sur «une autre surprise le 23 octobre», la présentation d'un «projet 100% digital» qui serait lancé en deux temps: nom de code «joemobile.fr», au logo à ronds bleus dans l'esthétique de Pacman. Un petit film résume la philosophie de cette future marque, sur fond de musique psychédélique (la fameuse «Messe pour le temps présent» de Pierre Henry): «à notre époque où les superlatifs vont bon train, il suffit de promettre plus grand, plus petit, ou moins cher pour être qualifié de révolutionnaire. Mais la révolution ce n'est pas cela», selon SFR, qui promet de «renverser notre rapport à l'opérateur. Et si c'était le client qui avait le pouvoir?» Ce nouvel opérateur «porterait mon nom» (en l'occurrence Joe), dans la ligne du slogan maison «SFR carrément vous». Un pied de nez à Free Mobile dont SFR a raillé au lancement le manque d'innovation autre que tarifaire, donc simple à répliquer. Sauf pour la structure de coûts. D'ailleurs, Stéphane Roussel a indiqué que le plan de départs volontaires, qui sera détaillé et négocié avec les partenaires sociaux en novembre, a «plus à voir avec la réorganisation, axée sur l'expérience client "multicanal", que par une quelconque difficulté économique», l'opérateur expliquant en substance : «on a moins d'offres, donc on a besoin de moins de personnes, dans une logique d'autonomie du client.»

* tous les prix mentionnés s'entendent avec un téléphone et un abonnement sur 24 mois.