De la fraude au chômage aux contrôles fiscaux, les nouvelles perles de la Cour des comptes

Par latribune.fr (avec Reuters)  |   |  1043  mots
Le rapport public annuel de la Cour des comptes, édition 2010, préparé sous l'autorité du Premier président Philippe Séguin qui vient de décéder, a déniché de nouveaux écarts dans la gestion de l'argent public. Il souligne aussi la situation tendue des finances publiques françaises.

Le rapport public annuel de la Cour des comptes est présenté ce mardi dans des circonstances particulières, puisqu'il a été préparé sous l'autorité du Premier président Philippe Séguin qui vient de décéder.

Ce rapport est présenté en deux parties. La première est consacrée aux observations des juridictions financières résultant de nouveaux contrôles. Cette année, les remarques de la Cour concernent notamment :

- la situation des finances publiques avec cette analyse de l'agence Reuters : la Cour des comptes s'inquiète d'un risque de dégradation de la notation souveraine de la France si des réformes structurelles d'ampleur ne sont pas menées dans la deuxième économie de la zone euro. En l'absence de réformes, la dette publique pourrait atteindre 100% du produit intérieur brut à brève échéance, générant une charge d'intérêt équivalente à 4% du PIB en 2013, prévient l'institution dans son rapport annuel publié mardi.

"A un niveau égal à 4% du PIB, cette charge ne serait plus très loin du seuil de 10% du produit des prélèvements obligatoires, au-delà duquel il existe un risque, certes non automatique, de dégradation de la notation des dettes souveraines", ajoute-t-elle dans son rapport. La dégradation des notes de plusieurs pays de la zone euro, dont la Grèce et le Portugal, entraîne un renchérissement du coût du financement de leur dette et provoque une crise d'une ampleur inégalée depuis la naissance de la monnaie unique.

Dans son programme de stabilité transmis la semaine dernière à la Commission européenne, le gouvernement français prévoit un recul de la dette en 2013 à 86,6% du PIB, grâce à une réduction historique du déficit public sous l'effet d'une forte croissance et de la maîtrise des dépenses. Pour l'heure, "le déficit public atteint un niveau sans précédent en temps de paix et la dette s'emballe", note la Cour dans ce rapport rédigé sous la direction de Philippe Séguin, son premier président décédé début janvier.

L'effondrement des recettes lié à la crise économique et les mesures de relance expliquent l'essentiel du creusement du déficit mais, ajoute-t-elle, le gouvernement n'a pas réussi à contenir la hausse des dépenses. Le déficit structurel, c'est-à-dire hors variation conjoncturelle du PIB, a ainsi progressé de 0,6 point l'an dernier pour dépasser 4% du PIB, selon les données disponibles au moment de l'examen des comptes par la Cour. Dans ces conditions, prévient elle, "sauf mesures structurelles appropriées, la reprise de la croissance ne permettra pas de ramener durablement le déficit au-dessous de 4%".

RÉDUIRE LES NICHES

Le gouvernement prévoit de ramener le déficit public à 3% du PIB en 2013 contre 8,2% prévu cette année, soit le plus haut niveau depuis au moins le début de la Vème République, si la croissance économique est de 2,5% par an de 2011 à 2013. Si la croissance n'est que de 2,25%, le déficit atteindrait 3%, la limite du Pacte de stabilité et de croissance européen, en 2014. Face à un déficit et une dette à des niveaux records, "les ajustements nécessaires devront être réalisés quand l'activité sera suffisamment soutenue, mais aussi avant que la politique monétaire européenne ne soit resserrée", déclare la Cour. Comme le gouvernement, elle juge que "la réduction du déficit structurel doit passer en priorité par le ralentissement des dépenses publiques".

"Mais, même si d'ambitieuses réformes allant bien au-delà de la Révision générale des politiques publiques sont menées à bien, l'ampleur des déficits rend difficilement évitable une augmentation des ressources publiques", prévient elle. Dans la ligne des annonces faites dans le cadre de la conférence sur le déficit récemment ouverte par le chef de l'Etat, la Cour estime qu'il ne faut pas créer de nouvel impôt mais supprimer ou réduire "une partie substantielle des dépenses fiscales et niches sociales".

Dans l'immédiat, elle plaide pour une diminution systématique des plafonds associés à ces niches. Le gouvernement a pour l'instant annoncé une réduction des niches de 2 milliards d'euros par an de 2011 à 2013. Selon la Cour des comptes, "l'augmentation des prélèvements sociaux est plus particulièrement nécessaire". "Le traitement dérogatoire accordé à certains revenus au regard des prélèvements sociaux devrait aussi être remis en cause, au -delà des mesures déjà prises", ajoute-t-elle.

Le rapport traite aussi :

- des politiques publiques (lutte contre le surendettement des particuliers, certaines niches fiscales en Nouvelle Calédonie et à Wallis et Futuna, la politique en faveur des services à la personne, la formation professionnelle en alternance financée par les entreprises, la décristallisation des pensions des anciens combattants issus de territoires anciennement sous la souveraineté française, la politique de lutte contre le VIH/Sida, les instruments de la gestion durable de l'eau).
 - de la gestion des services de l'Etat et des organismes publics (conduite des programmes d'armement, de la gestion du personnel de la navigation aérienne  - à suivre avec les grèves chez les contrôleurs aériens et les polémiques sur leur temps de travail -, de la gestion du produit des amendes de circulation routière, des inspecteurs de l'académie de Paris, de la transaction des Bons-Enfants, de la caisse de retraite des anciens membres du Conseil économique, social et environnemental, du parc automobile des services centraux de la police nationale, des méthodes et résultats du contrôle fiscal, la lutte contre la fraude dans l'indemnisation du chômage, du contrôle des aides au développement rural, le système des cartes de l'assurance maladie, le domaine national de Chambord, du bilan financier de la RATP, des réformes sociales de la SNCF, du fonds d'épargne).

La seconde partie dresse un large bilan des suites données à des recommandations antérieures des juridictions financières. Elle présente en particulier les suites de deux précédents rapports publics thématiques : les ports français face aux mutations du transport maritime, la qualité de service d'Aéroports de Paris.