Immigration légale : Lagarde et Guéant en désaccord

Par latribune.fr  |   |  560  mots
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Le ministre de l'Intérieur veut réduire l'immigration légale tandis que la ministre de l'Economie s'oppose à la limitation de cette immigration. De son côté, le parti socialiste parle d'atteinte aux droits fondamentaux.

Mésentente entre deux ministres sur l'immigration légale. L'idée du ministre de l'Intérieur Claude Guéant de réduire l'immigration légale a été critiquée jeudi, fait rare, par Christine Lagarde, autre ministre d'envergure du gouvernement. Interrogée sur France 3, la ministre de l'Economie a souligné que l'économie française aurait besoin d'immigration dans l'avenir.
"Il faut évidemment réfléchir au court terme mais aussi au long terme. Dans le long terme on aura besoin de main d'oeuvre, on aura besoin d'effectifs salariés formés", a-t-elle dit. "Je ne sais pas quelles sont les raisons qui ont amené (ndlr, Claude Guéant) à dire cette phrase (...) mais en ce qui concerne l'immigration qui est légale, évidemment il faut qu'elle soit protégée et sécurisée", a-t-elle ajouté.

Dans un entretien à paraître vendredi dans Le Figaro Magazine, Claude Guéant annonce son intention de réduire le nombre de personnes admises en France au titre de l'immigration du travail (20.000 par an). "Et nous allons continuer à réduire le nombre d'étrangers venant en France au titre du regroupement familial (15.000)", précise le ministre de l'Intérieur.

Cette déclaration de l'ancien secrétaire général de l'Elysée, très proche de Nicolas Sarkozy, semble rompre avec les idées jusqu'ici défendues par le chef de l'Etat et avec des constats économiques généraux.  S'il a toujours affirmé sa volonté de combattre l'immigration illégale, Nicolas Sarkozy affirmait jusqu'ici la nécessité pour la France d'une "immigration choisie", de travail, idée dont il avait fait un cheval de bataille.

La gauche proteste


La gauche a estimé que cette déclaration de Claude Guéant s'inscrivait dans la continuité de propos précédents présentant comme un problème l'accroissement du nombre de musulmans et estimant que les Français avaient le sentiment de n'être plus "chez eux".

Le PS estime que ces discours font partie d'une stratégie visant à séduire l'électorat d'extrême-droite. Le Front national, dont le sujet favori a toujours été la critique de l'immigration sous toutes ses formes, vient de remporter un succès aux cantonales et progresse au point de menacer Nicolas Sarkozy, selon certains sondages, d'une élimination au premier tour en 2012.

Pour Sandrine Mazetier, secrétaire nationale à l'immigration au PS, le ministre de l'Intérieur fait "diversion" pour masquer, selon elle, l'échec du gouvernement en matière de lutte contre le chômage.  "Je voudrais que le ministre de l'Intérieur réduise le nombre des provocations et des diversions. Je voudrais aussi qu'il propose à ses collègues qu'ils augmentent le nombre d'emplois", a-t-elle déclaré sur France Info.

L'ancien Premier ministre socialiste Laurent Fabius déplore pour sa part "une vision rabougrie de la France". "Dire qu'il faut réduire, et pourquoi pas même supprimer toute immigration légale, (...) c'est évidemment flatter le côté le plus médiocre, c'est un contresens économique, c'est une attaque contre les valeurs humanistes", a-t-il estimé sur i-télé et Radio classique.

Dominique Sopo, président de SOS Racisme, estime que "le message que veut faire passer M. Guéant, c'est que les problèmes dans ce pays viendraient de l'immigration, des musulmans, des immigrés et de leurs enfants". "C'est un discours de stigmatisation", a-t-il dit sur LCI.