Comment le Sénat compte colorer en rose le budget 2012

Par Clarisse Jay  |   |  601  mots
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Consciente de ne pouvoir proposer un contre-budget, la nouvelle majorité du Sénat compte cependant faire amender le projet de loi de finances et faire valoir ses arguments.

Si l'examen en séance du projet de loi de finances (PLF) pour 2012 se poursuit à l'Assemblée nationale sans surprise particulière, celui au Sénat, nouvellement passé à gauche, s'annonce tout autre. Le vote dans la nuit du 19 au 20 octobre au Sénat du troisième projet de loi de finance rectificative pour 2011, celui consacré à Dexia, en est un avant-goût. Sans bloquer le plan de restructuration, les sénateurs ont ainsi adopté par amendement le principe d'une contrepartie des banques, provoquant jeudi un accord avec les députés sur cette contrepartie en commission mixte paritaire.

Dans la même veine, si le Sénat ne compte pas présenter un contre-budget, le débat sur le PLF et avant lui, celui sur les prélèvements obligatoires, seront "l'occasion de présenter une stratégie budgétaire et fiscale", indique Nicole Bricq, la nouvelle rapporteure (PS) du budget au Sénat. Elle devra pour cela composer avec le nouveau président UMP de la commission des finances, Philippe Marini, auquel le PS a concédé le poste.

Nicole Bricq va donc dérouler en commission des finances le 26 octobre deux scenarii de croissance pour 2012, bien plus proches de ceux des économistes que celui du gouvernement (1,75 % du PIB) : l'un basé sur 1,2 %, l'autre, plus sombre, sur 0,9 %. Ce qui implique de trouver au bas mot 5 milliards d'euros d'économies supplémentaires. Alors que le gouvernement accumule des taxes diverses dans son plan de rigueur, "une vision globale d'une réforme fiscale est nécessaire, en agissant principalement sur les recettes", insiste Nicole Bricq, plaidant pour des amendements qui « ont un sens politique » et défendant un rééquilibrage capital-travail.

Amendements

Au menu, la suppression de la taxe sur les mutuelles et de l'exonération des heures supplémentaires, le rabotage de la niche Coppé sur les cessions de filiales, le relèvement du taux du prélèvement libératoire forfaitaire (revenus financiers) ou encore le plafonnement des niches. Celui-ci pourrait être "abaissé de 18.000 euros et 6 % du revenu imposable à 15.000 euros" en tout et pour tout, ce qui dégagerait "des sommes conséquentes", envisage Nicole Bricq. La rapporteure du budget évoque aussi le plafonnement de l'avantage fiscal lié aux emplois à domicile, qui ne bénéficie pas aux ménages les plus défavorisés, et la suppression de la TVA à 5,5 % dans la restauration.

Sur les hauts revenus, les amendements sur une tranche marginale supplémentaire à l'impôt sur le revenu vont bien entendu être repris et pourquoi pas, une refonte de l'impôt sur le revenu proposée (avec une assiette plus large et une plus grande progressivité).

Pas de concession sur les collectivités locales

"L'idée est de montrer le chemin possible", plaide Nicole Bricq. Tout au moins le chemin qu'il est possible de suivre avec la droite. Mais aucune concession ne sera faite sur les 200 millions d'euros d'efforts demandés aux collectivités locales, dont la dotation globale de fonctionnement est déjà gelée. La majorité sénatoriale veut "au contraire, leur redonner un peu d'air" en augmentant notamment l'impôt local qui remplace depuis 2010 la taxe professionnelle (CVAE) de 3 % à 3,5 % et en remodelant les critères de péréquation horizontale, actés en 2011 et précisés dans le cadre du budget 2012. "La lutte au Sénat va être chaude", promet Nicole Bricq. Un beau duel en perspective entre la sénatrice et la ministre du Budget Valérie Pécresse.

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