Sarkozy-Hollande, la bataille des hausses d'impôts

Par Ivan Best  |   |  870  mots
Nicolas Sarkozy veut limiter les annonces de hausses d'impôts, François Hollande conteste par avance la crédibilité de son programme copyright AFP
Nicolas Sarkozy présentera ce jeudi son programme économique. Il veut limiter à 8 milliards d'euros les nouvelles hausses d'impôts permettant d'atteindre l'équilibre des comptes publics en 2016. Les proches de François Hollande, qui prévoient 44 milliards d'euros de recettes nouvelles, contestent ce chiffrage. Ils évoquent des "hausses d'impôts cachées".

Comment Nicolas Sarkozy a-t-il l'intention, s'il est réélu, de financer les différentes promesses qu'il a formulées depuis le début de la campagne? Celles-ci seront chiffrées jeudi lors de la présentation de son programme, et ces promesses ne seraient pas à l'origine, a priori, de hausses d'impôts. Car, à entendre la ministre du Budget, Valérie Pécresse, les nouvelles recettes attendues seraient consacrées à la réduction du déficit, dans le cadre d'un plan de 115 milliards d'euros, visant à aboutir à l'équilibre des finances publiques en 2016. Un plan en fait déjà mis en ?uvre, puisqu'il court sur les années 2011 à 2016. Un plan qui repose sur l'hypothèse de nouvelles hausses d'impôts limitées (8 millards d'euros à l'horizon 2016). Sa crédibilité est contestée par le PS.

Le programme Sarkozy basé sur un chiffrage de 115 milliards
Ce chiffrage de 115 milliards a été établi dès l'an dernier, et devrait être confirmé par la prochaine programmation des finances publiques, que le gouvernement transmettra à Bruxelles avant la fin du mois. Le programme de Nicolas Sarkozy, s'agissant du retour à l'équilibre budgétaire, sera basé sur ce chiffrage.
La ministre rappelle que, sur ces 115 milliards d'euros de mesures de redressement, 74 correspondent à des économies sur les dépenses et 41 milliards à des hausses d'impôt.

Sur ces 41 milliards, 32 sont déjà votés par le parlement, selon les calculs de Bercy : les nouvelles recettes votées depuis la fin 2010 n'ont rapporté que 12 milliards en 2011, mais leur rendement, en année pleine, atteindrait 27,8 milliards en 2012, avant de grimper spontanément à 32,6 milliards en 2016. Ce calcul intègre donc toutes les hausses d'impôts mises en ?uvre à compter de 2011. Le PS conteste la réalité des 32 milliards d'euros de hausses déjà votées, mais le chiffrage détaillé établi par Bercy est difficile à mettre en cause, sauf à la marge.

Une réduction des niches fiscales
Restent donc, selon le gouvernement, 8 à 9 milliards d'euros de hausses d'impôt à venir. "Nous réduirons les niches (fiscales) de 4,5 milliards sur quatre ans", a affirmé Valérie Pécresse sur France Info. Ce qui correspond à une politique mise en ?uvre depuis 2011. La ministre explique également que le programme Sarkozy prévoit "3,5 milliards d'impôts minimum sur les très grands groupes, ceux qui paient moins d'impôts en France parce que souvent ils défiscalisent leurs bénéfices à l'étranger", et "500 millions d'euros sur les évadés fiscaux", contre lesquels Nicolas Sarkozy propose de durcir la fiscalité.

Hausse des prélèvements obligatoires
La programmation du gouvernement actuel table sur une hausse des prélèvements obligatoires, qui grimperaient de 43,8% du PIB en 2011 à 46% en 2016. Soit une hausse de 2,2 points, équivalente à 44 milliards d'euros. Cette estimation repose sur une addition: celle des 8 milliards d'impôts nouveaux, auxquels il faut ajouter la montée en puissance des mesures votées (+20 milliards par rapport à 2011), et un pari fait par Bercy sur de très bonnes rentrées fiscales spontanées : celles-ci progresseraient plus vite que le PIB, contribuant à hauteur de 16 milliards à cette hausse du taux de prélèvements obligatoires.

Ce schéma est contesté par les proches de François Hollande. Selon l'ancien ministre de l'Economie PS, Michel Sapin, ces hypothèses de progression spontanée des recettes sont trop optimistes au regard de la croissance : il s'agit du "plus gros des mensonges utilisé par toute administration lorsqu'elle veut équilibrer un budget", dit-il. D'où l'affirmation du PS selon laquelle Nicolas Sarkozy cache des hausses d'impôts. François Hollande prévoit, lui, 44 milliards d'euros d'augmentation des prélèvements, à travers, principalement, la remise en cause de niches fiscales, qui touchent surtout les entreprises et les ménages aisés. François Hollande a affirmé à plusieurs reprises que Nicolas Sarkozy sera contraint d'augmenter tout autant les recettes fiscales.

Dépenses: la poursuite des réformes entreprises

Pour ce qui concerne les 75 milliards d'efforts sur les dépenses que prévoit Nicolas Sarkozy, Valérie Pécresse affirme que cela implique la poursuite des "réformes entreprises". "On continue de réduire le nombre des fonctionnaires, on continue de réformer l'Etat, on continue de réformer l'hôpital", affirme-t-elle, faisant valoir que "ce sera un quinquennat où il faudra faire des efforts" en raison des 1.700 milliards d'euros de dette de la France.
Cette politique permettrait de ramener à 0,4% par an, en volume, la hausse des dépenses publiques, alors qu'en tendance, elles augmentent de plus de 2% l'an. Une rigueur prononcée sur les dépenses, donc. Le PS la juge impraticable, prévoyant notamment un « saccage de l'assurance-maladie », selon les termes de Michel Sapin.

Des réductions de dépenses "cachées", selon Sapin

"Vous avez 25 milliards d'euros d'augmentations d'impôts cachées", "20 milliards de dépenses nouvelles" pour financer les propositions faites depuis le début de la campagne et "il y aura des réductions de dépenses cachées", affirme Michel Sapin. Nicolas Sarkozy « ne nous a pas dit un mot pour l'instant sur la manière dont il les finançait », déclare le responsable socialiste, évoquant une différence "radicale" de méthode entre la "cohérence dans la durée" attribuée à François Hollande et "l'improvisation dans l'impulsion" reprochée au président sortant.