Bayrou récuse Sarkozy, mais ne peut se prononcer pour Hollande

Par Ivan Best avec AFP  |   |  698  mots
Copyright Reuters
François Bayrou se prononce clairement contre Nicolas Sarkozy. Mais appellera-t-il à voter François Hollande? Ce ne sera probablement pas le cas. Car il s'aliènerait alors les centristes de l'UMP, alors qu'il espère à l'avenir jouer un rôle majeur dans le recomposition de la droite

Ne pas insulter à l'avenir. Après ses déclarations, qui laissent clairement comprendre que François Bayrou n'appellera pas à voter Nicolas Sarkozy, on pourrait penser que François Bayrou penchera pour François Hollande. Ce dernier fait semblant de le penser, mais ce ne sera probablement pas le cas : pencher ainsi à gauche, ce serait renoncer pour l'ancien de ministre de l'Education à jouer tout rôle majeur dans les années à venir.
« Aborder la question de l'immigration en validant la thèse du Front national et en prétendant que les déséquilibres des comptes sociaux étaient dus aux immigrés, c'est un reniement d'un demi-siècle de politique sociale en France » a déclaré François Bayrou. « C'est un reniement du gaullisme aussi bien que des démocrates-chrétiens et humanistes. Cette course ventre à terre derrière les thèses du Front national est humiliante. Elle est de surcroît vouée à l'échec parce que la France est un pays construit autour de principes qui ne se laisseront pas entacher », a-t-il martelé. Quant aux « propos de Nicolas Sarkozy tendant à confondre les électeurs qui ont voté pour moi et ceux de Marine le Pen, ils sont absurdes et offensants" tranche le député du Béarn.

Hollande souligne les points d'accord avec Bayrou
Difficile d'appeler à voter pour le président sortant après de tels propos. Mais pour Hollande ? "Je pense qu'il (François Bayrou ) a compris que l'attitude de Nicolas Sarkozy depuis le premier tour de l'élection présidentielle est une fuite en avant, une vraie fuite en avant, c'est-à-dire une espèce de course derrière les thèses et les mots du Front national", a déclaré le leader socialiste sur France Info.
François Hollande a par ailleurs souligné avoir plusieurs points d'accord avec des "éléments" de la lettre que François Bayrou lui a adressée : "d'abord il y a le modèle social". François Bayrou "rappelle, et il a raison, le programme du Conseil national de la résistance" qui a posé "les principes d'une protection sociale, l'accès pour tous à la santé, le droit à la retraite".
Ensuite "l'objectif de faire une réforme de l'Education, de faire en sorte que nous puissions y mettre davantage de moyens", même si François Bayrou veut aussi "de la rigueur budgétaire". "Enfin, il y a un dernier point sur lequel, moi, je serai très ferme qui est la moralisation de la vie politique", a affirmé le député de Corrèze, précisant qu'il n'excluait pas un recours au référendum, faute de majorité au Parlement, pour faire adopter une loi dans ce domaine, comme le préconise le président du MoDem.
Pour l'eurodéputé socilaiste Harlem Désir, François Baryou va pencher pour Hollande. "La cohérence pousse déjà beaucoup de personnalités du MoDem à faire le choix de François Hollande, non seulement pour sanctionner Nicolas Sarkozy, mais aussi pour appuyer la mise en oeuvre de nos engagements" dit-il.

Ne pas s'aliéner le centre droit
Le hic, c'est que le député des Pyrénées atlantiques n'a pas vraiment intérêt à appeler à voter pour François Hollande. Notamment parce qu'il s'attend à une recomposition à droite, dans laquelle il pourrait jouer un rôle non négligeable : si l'UMP éclate, ce qui est un scénario possible compte tenu de la montée en puissance du Front national, qui veut désormais jouer un rôle majeur dans la structuration de la droite, un nouveau parti de centre droit, renforcé par tous les centristes quittant l'UMP, verra nécessairement le jour. François Bayrou pourrait en prendre à la tête. Mais pas après voir appelé à voter François Hollande, auquel cas il s'aliénerait tous ses ex UMP. François Bayrou pourrait adopter, la semaine prochaine, une position ambiguë, récusant Nicolas Sarkozy, sans appeler à voter François Hollande. Un appel à l'abstention ? Une position bien sûre intenable. Ses supporters comptent sur lui pour trouver une position apparemment tenable. Pas facile car, rappelons qu'il avait dit en son temps qu'il exprimerait clairement son choix entre les deux tours.