Les avertissements de Laurence Parisot au gouvernement

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  734  mots
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Intervenant publiquement pour la première fois depuis l'élection de François Hollande, la présidente du Medef demande au gouvernement de ne pas augmenter le poids des prélèvements obligatoires sur les entreprises, sinon le "pays risque de décrocher". Elle souhaite aussi une diminution des dépenses publiques et craint un dérapage financier sur le dossier de la retraite.

Ce n?est pas encore l'affrontement  en bonne et due forme... Mais, manifestement, la présidente du Medef, Laurence Parisot, est en alerte après ses premiers échanges avec Marisol Touraine, Arnaud Montebourg et Michel Sapin, respectivement ministre des Affaires sociales, du Redressement productif et du Travail. Certes, Laurence Parisot partage l?objectif du gouvernement de renouer avec la croissance. Mais, premier message : "celle-ci ne se décrète pas, il faut y arriver et pas question de passer par la croissance des dépenses publiques. L?objectif de réduction du déficit budgétaire ne doit pas être abandonné. L?outil de la croissance c?est la compétitivité. Nous voulons la discipline budgétaire et la croissance".


La crainte d'une hausse des prélèvements obligatoires

Deuxième avertissement : la dirigeante patronale exhorte l?équipe Hollande à ne pas augmenter les "prélèvements obligatoires qui pèsent sur les entreprises ", sinon il y a "un risque de décrochage du pays et un risque de voir se multiplier les plans sociaux"? Le message est clair. Et d?estimer qu?il " pourrait y avoir 27 milliards d?euros de charges fiscales et sociales (dont 15,2 milliards en amont de la production et 7,4 milliards sur les résultats) en plus si le programme du candidat Hollande était totalement appliqué". Un chiffrage qui additionne plusieurs projets de François Hollande comme la remise en cause des exonérations sociales sur les "heures sup", la modulation de l?impôt sur les sociétés, l?alignement de la fiscalité des revenus du capital sur celle des revenus du travail, etc. Mais Laurence Parisot a "bon espoir" que ce ne sera pas le cas. Et de rappeler la différence qui existe déjà entre le taux de marge moyen des entreprises françaises et allemandes. 30,1% en 2010 pour les premières et 41,3% pour les secondes, selon les données de l'Insee.


Baisser les cotisations et augmenter la CSG

Troisième avertissements : Laurence Parisot demande au gouvernementde persévérer dans la voie du "désendettement compétitif". Pour elle, cela  "passe par de grandes réformes", notamment sur le financement de la protection sociale. Regrettant l?abandon de la piste TVA  sociale, la présidente du Medef se dit prête à discuter avec le gouvernement "d?une hausse de la CSG" en contrepartie d?une baisse des cotisations sociales des salariés et employeurs.


Inquiétudes sur le financement de la retraite

Quatrième avertissement : la retraite. Laurence Parisot s?interroge sur le coût et la portée du projet de François Hollande de rabaisser à 60 ans l?âge du départ à la retraite pour les personnes ayant commencé à travailler à 18 ans et ayant cotisé 41 annuités. S?agira-t-il in fine des trimestres cotisés ou le gouvernement va t-il également admettre les trimestres validés?  "Attention à l?impact financier", s'inquiète la dirigeante patronale. Et de prévenir que, déjà, ce retour à 60 ans pour cette catégorie de la population se traduira par cinq milliards de dépenses supplémentaires pour la Caisse nationale d?assurance vieillesse. De fait, il s?agit là de l?ordre de grandeur avancé par François Hollande lui-même durant la campagne. Une somme qui sera financée par une augmentation de 0,1 point de la cotisation vieillesse (pour les salariés et les entreprises) chaque année durant cinq ans.
Mais Laurence Parisot s?interroge sur le fait de savoir si les autres régimes, et notamment les fonctionnaires, seront aussi concernés. Le coût grimperait alors.
Surtout, la présidente du Medef craint les conséquences de cette réforme sur les régimes complémentaires Arrco et Agirc, gérés par le patronat et les syndicats, qui devront automatiquement s?aligner. Elle estime le surcoût à "deux milliards d?euros à compter de 2017". Insupportable pour le Medef qui rappelle que, déjà, l?Agirc [ régime complémentaire des cadres] "n?aura plus les moyens de se financer dès 2014"?
Enfin, ultime avertissement du Medef : il compte mettre sur la table de la grande conférence sociale qui se tiendra à la mi juillet, la question du "marché du travail et de l?employabilité compétitive". Avec l?idée d?aborder le thème de la "simplification et la sécurisation des dispositifs d?ajustement des effectifs". Bref, les dispositions légales concernant notamment les licenciements?