PS : le Désir, c'est maintenant

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  772  mots
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Harlem Désir a finalement été désigné par Martine Aubry et Jean-Marc Ayrault comme premier signataire de la motion majoritaire déposée au prochain congrès de Toulouse. Il succèdera donc comme Premier secrétaire du parti à Martine Aubry. Le grand perdant est Jean-Christophe Cambadélis, député de Paris. Mais les conditions de cette désignation ont créé un fort tumulte dans le parti, habitué à davantage de démocratie depuis les primaires de l'automne 2011.

Fin du psychodrame au sein du parti majoritaire. L'eurodéputé Harlem Désir (52 ans) a été choisi par la Première secrétaire Martine Aubry et le Premier ministre Jean-Marc Ayrault pour devenir le prochain Premier secrétaire à l'issue du congrès de Toulouse (du 26 au 28 octobre).
L'actuel numéro deux du Parti socialiste, 52 ans, ex figure légendaire de Sos Racisme,  l'emporte donc sur le député de Paris Jean-Christophe Cambadélis, qui lui disputait la place de premier signataire de la motion à vocation majoritaire préparée dès juillet par Martine Aubry et Jean-Marc Ayrault. Quant à Guillaume Bachelay (un proche de Laurent Fabius et l'une des têtes pensantes de la dernière campagne présidentielle), député de Seine-Maritime, il est proposé à 38 ans pour devenir numéro deux du parti. "Au terme d'une consultation des responsables de notre parti, signataires de notre motion, dans une volonté de rassemblement et de renouvellement, notre choix s'est porté sur Harlem Désir comme premier signataire, et Guillaume Bachelay comme deuxième signataire de notre motion "Mobiliser les Français pour réussir le changement"", écrivent le Premier ministre et la Première secrétaire dans un communiqué. "Si les militants y adhèrent le 11 octobre, et votent pour notre candidat le 18 octobre, Harlem Désir sera le Premier Secrétaire du Parti socialiste conformément à nos règles. Guillaume Bachelay en sera le numéro deux".

Une seule vraie motion...

Ce vote ne devrait être qu'une formalité: car cinq mois après l'élection de François Hollande, les 175.000 adhérents du PS se prononceront pour la motion Aubry-Ayrault et son premier signataire. Reste à connaître le niveau de participation à ce vote réservé aux seuls adhérents du PS. De nombreux militants devraient en effet voter avec leurs pieds en ne se rendant pas aux urnes, une façon de contester la manière dont s'est organisée la succession de Martine Aubry.
Certes, après le congrès de Reims, les militants avaient accepté les modifications des statuts du parti. Selon cette réforme, seuls les premiers signataires des motions déposées dans le cadre de la préparation du congrès pouvaient postuler au poste de Premier secrétaire. Pourquoi pas, la tradition au sein du PS étant la présentation de plusieurs motions. Mais, cette année, à la suite de l'élection de François Hollande à l'Elysée, pour éviter d'afficher trop ouvertement d'éventuelles dissonances au sein du parti, Martine Aubry et Jean-Marc Ayrault ont décidé de verrouiller les débats en demandant à ce qu'il n'y ait qu'une seule motion. Ceci a fait grincer des dents, y compris au sein du gouvernement ou plusieurs ministres comptaient déposer une motion - les ministres de l'Education Vincent Peillon et de l'Economie Solidaire Benoît Hamon, par exemple - pour se "compter" à l'occasion du congrès. On a su les faire renoncer à leur projet. Résultat, face à la motion officielle, seules restent deux autres motions déposées par la gauche du parti:  la motion "Redistribuer les richesses", soutenue par par la sénatrice Marie Noëlle Lienemann et le vice-président du Conseil régional d'Ile-de-France Emmanuel Maurel qui en est le premier signataire; la motion "Le social au coeur", présentée par l'ancien inspecteur du travail, Gérad Filoche. Les deux  pourront donc postuler - sans aucune chance - au poste de Premier secrétaire face au candidat officiel, Harlem Désir. Selon le site Mediapart, le polémiste Stephane Essel envisageait aussi déposer une motion de témoignage.


... Un an après des primaires remarquées

C'est cette motion unique et le fait que, in fine, le choix de son premier signataire soit entièrement laissé à Martine Aubry et au Premier ministre qui a fait grincer des dents. Peu de leaders socialistes l'ont dit à haute voix - Gaétan Gorce, sénateur de la Nièvre a lui mis les pieds dans le plat - mais ce processus de désignation est mal passé dans le parti. Certain faisant la comparaison avec la Corée du Nord, ou l'époque de l'Union soviétique... Et ce d'autant plus qu'il y a tout juste un an, avec son processus des primaires, le PS était salué pour son sens de la démocratie interne, y compris par une partie des hommes forts de l'UMP comme François Fillon ou Jean-Pierre Raffarin.
Au nom de l'efficacité, dans une période économiquement difficile où le PS doit apparaître soudé derrière le gouvernement, la démocratie a cette fois était mise entre parenthèses.