CGT : une journée d'action pour un triple avertissement

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  906  mots
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La CGT organise ce mardi 9 octobre une journée de mobilisation. Un message adressé autant au gouvernement qu'au Medef, alors que se sont ouvertes des négociations sur l'emploi. Bernard Thibault ne voulant absolument pas entendre parler de davantage de flexibilité prônée par le patronat. Mais, cette journée a aussi pour vocation de ressouder les militants de la CGT fatigués de l'interminable querelle interne pour savoir qui va succéder à Bernard Thibault au poste de secrétaire général.

C?est une sorte d?avertissement que cherche à adresser la CGT en organisant mardi 9 octobre une "journée de mobilisation pour la défense de l?emploi et de l?industrie". Un triple avertissement même. Le premier à l?encontre du gouvernement et de sa politique, le deuxième à destination du Medef, alors que se sont ouvertes les négociations sur la sécurisation de l?emploi. Et le troisième à destination? des militants de la CGT, troublés par la guerre de succession qui règne au sommet de l?organisation pour préparer l?après Bernard Thibault.
L?action nationale de la CGT ?qui devrait se traduire par des défilés dans huit villes, dont Paris, et des arrêts de travail dans quelques secteurs comme la métallurgie, la chimie et les transports-, se place dans le cadre d?une journée de mobilisation décidée par la Fédération européenne de l?industrie (l?une des fédérations syndicales sectorielles européennes) "pour le développement de l?industrie et de l?emploi".

Un message adressé au gouvernement et au Medef

Mais, comme l?a dit le secrétaire général Bernard Thibault hier, lundi 8 octobre sur France Inter, ce mouvement "s?adresse à tout le monde, au patronat et au gouvernement". L?idée de la CGT serait de "contrebalancer une pression forte des employeurs qui cherchent à obtenir par ce gouvernement ce qu?ils auraient pu obtenir d?une ancienne majorité". A cet égard, la CGT n?a pas apprécié la reculade du gouvernement Ayrault, après le mouvement des "pigeons", sur la taxation des entrepreneurs revendant leur entreprise. En outre, pour la centrale de Montreuil, "le débat sur la compétitivité porte souvent le coût du travail comme responsable de la crise conduisant à une pression sur les salaires, à déréglementer le marché du travail, à un transfert de cotisations vers la solidarité et les ménages pour financer la protection sociale ". Or, la CGT préconise d?utiliser une autre voie: "le travail n?est pas un coût mais le seul levier de création de la richesse par les salariés or, sur 100 euros, 25 vont aux actionnaires. Diviser par deux les dividendes libèrerait 120 milliards d?euros en France pour les investissements productifs, la création d?emplois, le financement de la protection sociale et la diminution du déficit de l?Etat". Ce sont ces revendications que la centrale de Bernard Thibault veut porter mardi 9 octobre. Le message s?adresse certes au gouvernement ?c?est la première fois que la CGT est dans la rue sur des questions sociales depuis l?élection de François Hollande? , accusé de vouloir ratifier un traité européen qui, pour la CGT, va imposer une austérité conduisant "à 300.000 chômeurs de plus en France en 2013". Mais le patronat, Medef en tête, n?est pas oublié. Dans le cadre de la négociation sur la sécurisation de l?emploi, Bernard Thibaut refuse toute idée de flexibilité supplémentaire. Pas question pour lui d?accepter un raccourcissement des procédures de licenciement ou de négocier d?éventuels accord "compétivité/emploi". Sur ce point, la CGT est sur la même longueur d?ondes que FO mais pas du tout sur celle de la CFDT qui, elle, se dit ouverte au dialogue.


Remobiliser des militants fatigés des querelles internes

Mais c?est peut-être à l?endroit de ses propres militants que la journée d?action du mardi 9 octobre est la plus importante pour la CGT. La guerre de succession de Bernard Thibault ?qui abandonnera ses fonction au congrès de Toulouse en mars 2013- dure depuis des mois. Les instances de la confédération peinent à se mettre d?accord sur le nom du prochain secrétaire général. C?est normalement en novembre, lors de la tenue du Comité confédéral national (sorte de parlement de la CGT) que le suspens devrait prendre fin. Un nom devrait émerger, peut-être celui de Thierry le Paon, ancien responsable de la CGT du Calvados et actuel chef de file des représentants CGT au Conseil économique social et environnemental. A moins que Eric Aubin, secrétaire confédéral chargé des retraites, maintienne, encore, sa candidature, fort du soutien de plusieurs fédérations. Mais les militants sont las de ces querelles. "Il est certain qu?il y a des raisons objectives au mouvement de la CGT", analyse Jean-Dominique Simonpoli, directeur de l?association "Dialogues" qui réunit des syndicalistes et des chefs d?entreprise. "Le syndicat est dans son rôle quand il manifeste contre la flambée des plans sociaux et la crainte du chômage. Mais il est exact aussi qu?il y a des raisons internes. La CGT a besoin de sortir de ses querelles internes et de montrer qu?elle existe, notamment face aux autres syndicats. C?est aussi pour ça qu?elle organise seule cette journée: pour marquer son territoire et ressouder ses militants".
Donc, peu importe en vérité le succès ou non de la mobilisation. La centrale de Montreuil, qui s?est fait souffler sa place d?interlocuteur numéro un du gouvernement par la CFDT, veut montrer qu?elle existe encore? Surtout à quelques semaines des élections de représentativité dans les très petites entreprises.