"Nous doutons de la volonté du gouvernement de favoriser l’émergence de jeunes entreprises innovantes"

Par Fabien Piliu  |   |  375  mots
Philippe Pouletty, le président d'honneur de France Biotech
Alors que la commission Lauvergeon "Innovation 230" dévoile ses travaux, Philippe Pouletty, le directeur Général de Truffle Capital et président d’honneur de France Biotech dénonce dans un entretien accordé à La Tribune, l'attitude du gouvernement dans le dossier de la Jeune entreprise innovante. Alors que le gouvernement martèle que ce statut a retrouvé ses attraits d’antan, il estime que le travail n’a pas été fait.

La Tribune - Le gouvernement ne cesse de répéter que le statut de jeune entreprise innovante (JEI) est redevenu attrayant et efficace. Qu'en pensez-vous ?

Philippe Pouletty - Ce sont des sornettes ! Lors de la campagne présidentielle, François Hollande avait promis de rétablir ce statut qui avait été bridé pour des raisons budgétaires parle gouvernement de François Fillon en 2011. Il n'y a rien de plus insupportable que les promesses électorales qui ne sont pas tenues !

Mais le gouvernement n'a-t-il pas décidé de supprimer la dégressivité des cotisations sociales ?

C'est exact, mais l'essentiel n'a pas été fait. Le plafonnement des salaires et du nombre de salariés est maintenu dans le statut JEI. C'est pourtant LA mesure à prendre en urgence. Le but n'est pas de multiplier les toutes petites JEI, mais de faire grossir rapidement les JEI en ETI. Par ailleurs, l'intégration de la JEI au régime général des plus-values, des bons de souscription de parts de créateurs d'entreprise BSPCE à la « taxe 75% », du carried interest  [la part de la plus-value réalisée par un fonds d'investissements qui revient à ses dirigeants] au régime général des plus-values, nous font aussi sérieusement douter de la volonté du gouvernement de favoriser l'émergence de jeunes entreprises innovantes en France.

On peut imaginer que le coût de cette mesure reste trop élevé compte tenu de la situation des finances publiques.

Ces mesures ne coûteraient que 50 millions d'euros. Au regard des bénéfices que l'économie française pourrait en retirer, le jeu en vaut la chandelle.

Globalement, que vous inspire la politique du gouvernement en faveur des entreprises ?

Elle est totalement incohérente. D'un côté, il lance le crédit d'impôt pour la compétitivité, l'emploi et les filières industrielles, de l'autre, il bride le développement des entreprises innovantes par une fiscalité punitive. Les chefs d'entreprises en ont assez des décisions à l'emporte-pièce dont l'impact n'est absolument pas évalué. Il faudrait que l'Elysée et Matignon s'entoure enfin de personnalités ayant une véritable connaissance de l'économie de l'entreprise et de la dynamique de l'investissement. Sinon, appeler au patriotisme économique est un non-sens.