Le Pacte d’avenir pour la Bretagne suscite la polémique

Par Fabien Piliu  |   |  891  mots
Le Pacte d'avenir pourla Bretagne ne séduit pas toute le monde
Présenté ce mercredi en Conseil des ministres, le Pacte d’avenir suscite de nombreuses réactions. Sans surprise, l’enthousiasme de la classe politique varie selon les sensibilités. Sur le terrain, la circonspection demeure.

C'était le morceau de choix du  Conseil tenu ce mercredi. Elaboré collectivement pour permettre à la Bretagne de rebondir et pour encourager les initiatives, le Pacte d'avenir de la région repose sur cinq axes stratégiques majeurs : positionner la Bretagne comme grande région productive, conforter sa vocation de grande région maritime européenne, renforcer son investissement dans l'intelligence, affirmer son identité culturelle et améliorer son accessibilité et soutenir les dynamiques de territoire.

Pour mener cette politique, le gouvernement a débloqué une enveloppe d'aides dont le montant s'élève à deux milliards d'euros.

A gauche, sans surprise, on salue cette initiative.

" Le Premier ministre avait pris l'engagement de travailler à un pacte d'avenir pour la Bretagne. Moins de deux mois après, la promesse est tenue ! Notre pacte breton a un triple mérite. Il répond par des moyens importants aux urgences sociales et aux enjeux immédiats sur l'agriculture et l'agroalimentaire, la méthanisation, le logement, l'aménagement du territoire, l'enseignement supérieur et la pêche ; il met en œuvre des moyens inégalés pour les infrastructures et poursuit le travail pour la ligne à grande vitesse au Nord et au sud de la Bretagne.Sur le moyen terme, pour la réorganisation des filières et sans renoncer aux progrès sur l'environnement, il accompagne la métamorphose du modèle agricole notamment par le doublement du Fonds européens au développement rural (FEADER). Enfin, les spécificités culturelles sont reconnues par de futures délégations de compétences. (…) Finalement, la République a bien fonctionné : les députés ont fait leur travail et le Conseil régional a fait le sien, en lien avec le gouvernement ", explique Richard Ferrand, le député PS du Finistère.

Un tour de passe-passe ?

Dans l'opposition, la critique est vive, là aussi sans surprise. Député UMP des Côtes d'Armor, Marc Le Fur, député UMP , ne voit  "rien de positif" dans le Pacte d'avenir, estimant notamment que "le doublement à 368 millions d'euros du FEADER est compensé par la baisse de l'aide directe aux agriculteurs. "On est loin de ce que touche par exemple l'Auvergne avec 1,3 milliard d'euros", avance-t-il.

" On peut s'interroger sur le financement, en période de crise économique et de fortes contraintes budgétaires, et sur la façon dont le plan va être mis en œuvre dans les mois à venir. (…) Améliorer l'accessibilité de la région implique une accélération du calendrier et un renforcement des moyens pour atteindre l'objectif de mettre Brest et Quimper à trois heures de Paris en TGV. Le principe de la gratuité des routes doit être réaffirmé, et la Bretagne doit être exclue du dispositif d'application de l'écotaxe poids lourds ", estime de son côté Agnès Le Brun, la députée européenne et maire UMP de Morlaix (Finistère).

De l'enfumage pour les Bonnets rouges

Qu'en pensent les Bonnets rouges, à l'origine de la révolte contre l'écotaxe ?

" Ce pacte, c'est de l'enfumage et une coquille vide que seule la mobilisation des Bonnets Rouges (...) devrait permettre de remplir. Le moins qu'on puisse dire, c'est que le compte n'y est pas et que ce texte, marqué de l'empreinte de la technostructure administrative parisienne, ne répond nullement aux attentes de la société bretonne exprimées de différentes manières ces dernières semaines ", écrit Christian Troadec, l'un des principaux porte-parole du mouvement des Bonnets rouges, dans un communiqué.

Et d'ajouter :

" Ce texte n'apporte rien de plus, ou très peu, qu'un contrat de plan classique État-Région et ne contient aucune initiative réelle, aucune innovation institutionnelle, aucune réponse aux élus régionaux qui avaient voté et rédigé une contribution à la loi de décentralisation ".

Pour Olivier Le Bras, délégué central FO de l'abattoir Gad, interrogé par l'AFP, le plan du gouvernement " trop flou " et

" il ne répond pas aux vrais problèmes comme celui de la concurrence avec l'Allemagne, dont les abattoirs emploient des travailleurs payés très en-deçà des salaires français.Ce n'est pas avec ça qu'on va permettre à la Bretagne de se redresser, de s'en sortir. C'est un effet d'annonce comme d'habitude. On a l'impression que le gouvernement a eu peur que le mouvement en Bretagne se propage au reste du pays, il est donc allé un peu trop vite, comme pour dire aux Bonnets rouges: 'c'est bon, on a fait ça pour la Bretagne, maintenant vous arrêtez' ", a-t-il déclaré.

Un bon test pour François Hollande

A de son retour de Chine, où il sera encore ce week-end, Jean-Marc Ayrault pourrait se déplacer à Rennes. Selon une source proche du gouvernement citée par Le Monde, le Premier ministre pourrait faire "des annonces qui ne sont pas dans le Pacte".

En soutien de son gouvernement, François Hollande, qui est resté longtemps silencieux sur le dossier breton, pourrait aussi faire le déplacement dans les prochaines semaines pour vanter les mérites du Pacte d'avenir. S'il voulait tester sa popularité auprès des Français, le président de la République a choisi le bon moment et le bon endroit. Le Premier ministre n'avait-il pas été très chahuté lors de ses deux derniers déplacements en Bretagne, en septembre et en novembre ?