Partenariat public-privé : une "bombe à retardement budgétaire" (Sénat)

Par latribune.fr  |   |  451  mots
Le paiement différé peut conduire la personne publique "à surestimer ses capacités d'investissement. De surcroît, au gré de l'exécution du contrat, le coût final du projet peut évoluer", regrette le Sénat. (Photo: Reuters)
Dans un rapport publié mercredi, la commission des Lois dénonce la formule qui consiste à échelonner la rémunération de la personne privée sur toute la durée de l'exploitation et à ne pas la prédéfinir integralement. Elle souligne aussi l'effet d'"infantilisation" de la personne publique découlant de ces contrats.

Ils présentent "plusieurs effets néfastes, notamment pour les générations futures" et constituent "une bombe à retardement budgétaire souvent ignorée par des arbitrages de court terme". Ce sont les contrats de partenariat public-privé tels qu'ils sont vus par le Sénat, qui s'est penché sur la formule dans un rapport publié mercredi.

Un outil "concurrençant les marchés publics classiques"

Ces accords, par le biais desquels le secteur public confie au secteur privé l'ensemble d'un projet, de son financement et sa construction à son exploitation, ont été créés en 2004, à l'origine pour un usage dérogatoire. Ils sont toutefois devenus un outil contractuel parmi d'autres, "concurrençant les marchés publics classiques ou les délégations de service public", note la commission des Lois du Sénat.

Pourtant, ils présentent une particularité sensible. La rémunération de la personne privée est échelonnée sur toute la durée de l'exploitation et n'intervient pas, d'un seul bloc, après constat d'un service fait ou après réception des travaux. De surcroît, elle "n'est pas nécessairement forfaitaire et intégralement prédéfinie", fait remarquer le Sénat.

Un coût final qui peut évoluer

Cette formule présente le défaut de "rigidifier la dépense publique", en imposant des loyers sur sa durée : des frais obligatoires qui provoquent "un effet d'éviction sur les autres dépenses de fonctionnement, parfois pour des projets en maîtrise d'ouvrage publique", expliquent les sénateurs. Et d'ajouter :

"De même, le paiement différé est une facilité pour la personne publique qui peut la conduire à surestimer ses capacités d'investissement. De surcroît, au gré de l'exécution du contrat, le coût final du projet peut évoluer, malgré l'évaluation préalable."

"Une formule infantilisante"

Autre défaut des contrats de partenariat public-privé, selon la commission des Lois (qui cite une expression utilisée par la Gazette des communes en novembre 2012) : ils représentent "une formule 'clés en mains' rassurante, mais aussi infantilisante".

En concentrant la maîtrise d'ouvrage et la maîtrise d'oeuvre entre les mains du partenaire privé, ils conduisent "d'une certaine manière à un renoncement par la personne publique à sa compétence de maîtrise d'ouvrage", expliquent les sénateurs.

Un "effet d'éviction des PME et des TPE"

Le rapport souligne par ailleurs un autre travers : conclus essentiellement avec des grands groupes (comme Bouygues, Eiffage et Vinci), les contrats de partenariat public-privé provoquent de surcroît un "effet d'éviction des petites et moyennes entreprises et des très petites entreprises".

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