A qui profite l'absence d'inflation ?

Par Fabien Piliu  |   |  648  mots
L'indice des prix n'a progressé que de 0,4% en août sur un an
Sur un an, les prix à la consommation n'ont augmenté de 0,4% en août. Pour le gouvernement, cette hausse des prix très limitée explique en partie ses difficultés à réaliser les économies programmes. Il se réjouit en revanche de son impact sur le pouvoir d'achat des ménages. Quels sont ceux qui en profitent le plus ? La hausse du pouvoir d'achat peut-elle durer ?

Pour Michel Sapin, le ministre des Finances, l'absence d'inflation explique en partie les difficultés du gouvernement à réaliser les économies budgétaires programmées. " Moins de croissance, c'est moins de recettes, mais c'est aussi moins d'économies réalisées. Certaines économies prévues ne rapportent pas autant qu'elles l'auraient dû ", a expliqué mercredi le ministre des Finances juste après avoir annoncé le dérapage du déficit public tricolore, citant le gel des retraites complémentaires et le gel des pensions au-dessus de 1.200 euros par mois.

" Certains y verront une bonne nouvelle pour les consommateurs. Et il est vrai que cette faible inflation a un impact sur le pouvoir d'achat des ménages puisque, pour la première fois depuis trois ans, le pouvoir d'achat progresse à nouveau ", s'est paradoxalement réjoui Michel Sapin. En effet, ces deux mesures d'austérité n'avaient-elles pas objectif de faire porter aux ménages le coût de l'austérité, sapant ainsi leur pouvoir d'achat, au risque de saper la consommation, le dernier pilier encore un peu vaillant de la croissance française ?

Les ménages les plus aisés moins touchés par l'inflation

Tous les ménages peuvent-ils se réjouir ? Loin s'en faut. Selon une étude réalisée par l'Insee, ce sont les ménages les plus modestes qui ont été le plus impacté par la hausse des prix entre 1998 et 2013. En moyenne, les prix à la consommation ont augmenté de 27,18% sur la période. Pour les ménages de la première tranche, c'est-à-dire les 10 % de ménages ayant le niveau de vie le plus modeste, et de la deuxième tranche, les prix ont respectivement augmenté de 29,15% et de 29,62%. En revanche pour les tranches intégrant les ménages les plus aisés, le niveau de l'inflation a été plus faible. Ainsi, pour les 10% des ménages les plus aisés, les prix à la consommation n'ont progressé que de 24,81%.

Pour l'Insee, ces écarts d'inflation mesurés selon le niveau de vie des ménages trouvent principalement leur origine dans la structure de consommation, propre aux différentes catégories de ménages. Ainsi, les dépenses de consommation de logement, eau, gaz, électricité et combustibles liquides sont, en proportion de leur budget, plus de deux fois plus élevées pour les ménages les plus modestes que pour les ménages les plus aisés. " Or, les prix de ces services ont été parmi les plus dynamiques depuis 1998, augmentant de 49,9 % contre 27,2 % en moyenne pour l'ensemble des prix à la consommation. En outre, les dépenses de consommation en boissons alcoolisées et en tabac pèsent plus lourdement dans le budget des ménages les plus modestes que dans celui des ménages aux niveaux de vie supérieurs. Or c'est pour ce groupe de produits que les prix ont le plus fortement augmenté au cours des quinze dernières années (+84,5 %) ", explique l'Institut.

En revanche, les ménages aisés consomment relativement plus de biens et services dont les hausses de prix ont été parmi les plus modérées depuis 1998. Il s'agit notamment des services de loisirs et culturels, des biens d'ameublement, d'équipement, d'entretien courant de la maison et de la santé.

Le pouvoir d'achat progressé au premier semestre

L'indice des prix ne progressant que modérément, le pouvoir d'achat des ménages progresserait donc actuellement, après avoir baissé de 0,9% en 2012 et stagné en 2013 ? C'est effectivement le cas. Selon l'Insee, il était en hausse de 0,8% à la fin juin. Mais cette tendance peut-elle se prolonger ? Pour compenser les deux milliards d'euros « évaporés » par la faible inflation, Bercy songe sérieusement à faire payer la note à la Sécurité sociale, via notamment la baisse de certaines prestations familiales et de nouvelles coupes dans les dépenses couvertes par l'assurance -maladie qui pèseront mécaniquement sur le pouvoir d'achat des Français.