Berlin accusé de jouer solo dans la lutte contre la spéculation sur les dettes souveraines

Par latribune.fr  |   |  492  mots
L'annonce mardi soir de l'interdiction en Allemagne des ventes à découvert des produits financiers portant sur les emprunts d'Etats de la zone euro suscite des critiques indirectes. Le commissaire européen Michel Barnier considère que ces mesures seront "d'autant plus efficaces qu'elles seront coordonnées au niveau européen". La ministre française de l'Economie, Christine Lagarde, estime, elle, qu'il aurait fallu "solliciter l'avis des Etats considérés et concernés par la mesure". Berlin se défend.

En décidant mardi soir d'interdire dès minuit dans son pays la vente à découvert de certains produits financiers spéculatifs (dont les CDS, les credit default swaps, assurances contre le risque de défaut d'un emprunteur) et notamment ceux qui portent sur les emprunts d'Etats de la zone euro, la chancelière allemande Angela Merkel a mis le feu aux poudres.

Avec une prudence toute diplomatique, Paris et Bruxelles ont vivement réagi à ce solo de l'Allemagne dans la lutte contre la spéculation sur les dettes souveraines. "Il me semble qu'il faudrait quand même solliciter l'avis des Etats considérés et concernés par la mesure" a ainsi déclaré ce mercredi Christine Lagarde. La ministre de l'Economie a précisé dans la foulée que la France n'avait pas l'intention d'imposer les mêmes restrictions en France.

La commission européenne critique, elle aussi à demi-mot, le fait que Berlin se soit engagé seul sur cette voie. Michel Barnier, le commissaire européen en charge du Marché intérieur et des services financiers, souligne que "ces mesures seront d'autant plus efficaces qu'elles seront coordonnées au niveau européen". Avant d'ajouter : "Il est important que les Etats membres agissent ensemble et que nous mettions en place rapidement un régime européen qui permette d'éviter les arbitrages réglementaires et la fragmentation, à l'intérieur de l'Union Européenne (UE) mais aussi au niveau global ».

Londres n'a pas réagi directement. L'autorité nationale des marchés financiers (FSA) s'est contenté d'indiquer que l'interdiction allemande "concernent les agents de marché allemands ou les activités se déroulant en Allemagne et ne s'étendent pas au succursales des institutions allemandes hors d' Allemagne et/ou le Royaume-Uni".

Face aux critiques à peine voilées de ses partenaires européens, Angela Merkel reste impavide. Devant les députés qui doivent autoriser Berlin à débloquer les fonds prévus par le plan européen de soutien à l'euro, la chancelière allemande a, ce mercredi matin, non seulement exhorté l'UE (Union euà accélérer la supervision des marchés et à mettre en place une nouvelle taxe sur les transactions financières, mais elle a expliqué que l'Allemagne était prête à agir seule sur l'interdiction des ventes à découvert.

Pour la chancelière, il est impératif que les dirigeants européens veillent à ce que les banques ne puissent pas "extorquer" davantage d'argent aux Etats. "L'euro est en danger, et si nous ne parons pas à ce danger, les conséquences pour l'Europe sont incalculables et les conséquences au-delà de l'Europe sont incalculables (...) Si l'euro échoue, l'Europe échoue" a-t-elle lancé aux députés allemands.

Un porte-parole du ministère allemand des finances a également répondu aux critiques en soulignant que Berlin avait clairement indiqué que des mesures seraient prises à 'l'échelon national pour contrer les exagérations des marchés. Il a affirmé que le moment choisi était approprié.