Pour gagner plus, ne soyez pas sympa !

Par Céline Tcheng  |   |  471  mots
Le (presque) toujours très souriant Silvio Berlusconi - ici avec sa fille - est-il devenu l'homme le plus riche d'Italie grâce à son sourire, en étant aimable ? A priori non estiment des chercheurs...
Une étude de chercheurs nord-américains présentée cette semaine démontre que les hommes peu aimables gagneraient plus que ceux qui sont affables. Chez les femmes, cette tendance est moins marquée.

"Les mecs sympas finissent derniers" (en version originale: "nice guys finish last").

Cette expression, attribuée au joueur américain de baseball Leo Durocher, est moins anodine qu'il n'y paraît et recèle peut-être une part de vérité.

C'est en tout cas ce que révèle l'étude intitulée "Est-il rentable d'être gentil ? Les effets de l'amabilité sur l'écart salarial entre les deux sexes" qui a été présentée cette semaine lors de la 71ème réunion annuelle de l'Academy of Management à San Antonio (Texas). 

Si les  "mecs sympas" ne finissent pas toujours derniers, ils figurent rarement premiers.

Les chercheurs Beth A. Linvingston (Université de Cornell), Timothy A. Judge (Université de Notre Dame, Indiana) et Charlice Hurst (Université de Western Ontario, Canada) montrent dans cette étude que l'amabilité a un effet négatif sur les revenus et que ce phénomène est beaucoup plus présent chez les hommes que chez les femmes.

A premier abord, cela paraît presque illogique de se dire que les hommes moins aimables seraient mieux payés. Une personne aimable n'a-t-elle pas un avantage pour le travail en équipe et les relations humaines utiles au bon fonctionnement de l'entreprise ?

L'étude souligne que  les personnes très aimables ont tendance à privilégier "l'harmonie sociale". Elles sont donc moins enclines à remettre en questions les normes sociales et cherchent à éviter le conflit, et sont plus susceptibles de faire des concessions qui pourraient nuire à leurs intérêts.

A titre d'exemple, "dans les négociations, les personnes peu aimables obtiennent des règlements individuels plus favorables.", indiquent ces chercheurs.

Du point de vue de l'employeur, "les comportements peu aimables, notamment dans les milieux où la compétitivité et l'agressivité sont évalués, peuvent montrer des capacités prometteuses", précisent-ils.

Mais que signifie "être aimable" au juste ?

Les chercheurs ont repris les six facettes de l'amabilité identifiés par les chercheurs Paul T. Costa et Robert R. McCrae : confiance, franchise, altruisme, respect, modestie et la tendresse d'esprit.

Quant à être "peu aimable", il ne s'agit pas de personnes égoïstes qui n'ont aucun respect pour les autres : de manière générale, elles sont plutôt "amiables" (sic), mais à la différence des personnes aimables, elles "deviennent désagréables selon les circonstances, comme par exemple lorsqu'elles défendent agressivement leur position pendant les conflits."

Quant aux femmes, la différence de revenus entre celles qui sont aimables et celles qui ne le sont pas est beaucoup moins importante.

Mais l'inégalité salariale entre les hommes et les femmes persiste: de manière générale, les femmes gagnent toujours moins que les hommes.

"Les femmes fort peu sympathiques ne gagnent pas autant que les hommes extrêmement aimables" relèvent avec une pointe de malice les trois universitaires.