Russie : l'armée s'arroge la part du lion dans le budget 2012

Par Emmanuel Grynszpan, à Moscou  |   |  433  mots
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La priorité de Poutine va au réarmement dans le budget triennal présenté mardi, qui a coûté son poste au ministre des Finances. Les dépenses concernant la santé, l'éducation et le soutien à l'économie baissent par rapport au PIB du pays.

Les paramètres du budget triennal russe (2012, 2013 et 2014) ont été rendus publics mardi, au lendemain du limogeage de l'homme qui les a définis. Alexeï Koudrine a été remercié après onze années à la tête des Finances russes pour avoir exprimé son mécontentement de voir les dépenses de défense augmenter.

Le budget de l'armée va passer de 3% à 4% du PIB russe d'ici à trois ans. Un poste auquel il faut encore ajouter les dépenses pour la "sécurité intérieure" (police, FSB) soit presque 30% du budget total (3% du PIB). La hausse de 20% entre 2011 et 2012 en termes nominaux est la plus forte jamais enregistrée. En termes absolus, les dépenses militaires russes s'élèveront à 42,16 milliards d'euros l'année prochaine. A l'inverse, l'aide à l'économie tombe de 3,1% à 2,3% du PIB. La ligne finançant la construction et l'entretien de logements sociaux perd une décimale par an, même chose pour l'éducation (de 1% en 2012 à 0,7% en 2014), pour les dépenses de santé et pour la politique sociale, qui restent d'une courte tête (30,8% du budget total) devant les dépenses de sécurité (armée et police).

L'autre problème de ce budget tient dans l'évolution des ressources, dont les deux tiers sont alimentés par les taxes à l'extraction et l'exportation de matières premières. Le budget sur les trois années à venir est calculé sur la base d'un baril à 100 dollars. Or, selon l'économiste Sergueï Gouriev, l'équilibre budgétaire ne peut être obtenu qu'avec un baril à 125 dollars.

Le gouvernement compte aussi sur un vaste programme de privatisations qui pourrait lui rapporter 30 milliards d'euros sur trois ans, grâce à la réduction de sa participation dans les banques VTB et Sberbank, le pétrolier Rosneft et toute une série d'actifs allant de l'agriculture à l'armement et aux infrastructures de transport.

Réformes indispensables

En 2012, les dépenses totales vont atteindre 288 milliards d'euros (soit 15% d'augmentation par rapport à cette année) contre des recettes de 268 milliards d'euros. Le déficit atteindra 1,5% cette année, et doit en principe diminuer jusqu'à 0,7% du PIB en 2014, a insisté Vladimir Poutine. Il a enjoint son cabinet de "ne pas gonfler les dépenses".

Dans leur ensemble, les observateurs sont sceptiques. Charles Robertson, de Renaissance Capital, note que le successeur de Koudrine devra se coltiner "des réformes indispensables, comme les privatisations, la réforme des retraites et une réforme fiscale car le budget 2012 équilibré à 115 dollars le baril, est très optimiste". Le budget sera examiné avant le 1er octobre et naturellement adopté par cette chambre d'enregistrement qu'est devenu le parlement russe.