Sommet de Bruxelles : Merkel impose l'Europe allemande

Par Florence Autret, à Bruxelles, mis à jour par Latribune.fr  |   |  715  mots
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D'ici le sommet de mercredi, les Européens doivent finaliser les discussions entamées dimanche pour sortir de la crise de la dette. Grèce, banques, fonctionnement du FESF, gouvernance économique : c'est la vision allemande qui semble l'emporter à Bruxelles. Les banques européennes recevront environ 100 milliards annonce ce lundi François Baroin.

En sortir, oui, mais comment ? Le round de négociations ouvert vendredi par les ministres des Finances de la zone euro se poursuivra au moins jusqu'à mercredi soir, où une nouvelle rencontre des chefs d'État et de gouvernement de la zone euro est prévue, à Bruxelles. « Nous n'avons pas décidé, mais nous avons fait d'importants progrès », a expliqué dimanche Angela Merkel. « Nous voulons apporter des réponses communes, ambitieuses et durables », a surenchéri Nicolas Sarkozy.

L'accord qui pourrait être signé mercredi par les pays européens prévoira que les banques du continent seront recapitalisées à hauteur de 100 milliards d'euros, a déjà déclaré ce lundi le ministre français de l'Economie, François Baroin.

La négociation est rendue particulièrement délicate par l'entremêlement des différents sujets. Le deuxième plan d'aide à la Grèce, celui du 21 juillet, qui prévoit une plus grande participation du secteur privé, conditionne la recapitalisation des banques, laquelle dépend de la solution apportée à la crise de liquidité qui menace désormais l'Italie et l'Espagne. Pour être endiguée, cette contagion nécessite de renforcer le FESF, le fonds de soutien européen, ce qui ne peut se faire, prévient l'Allemagne, sans renforcer la discipline budgétaire, revoir profondément la gouvernance européenne et remettre le traité européen sur le métier. Signe d'une pression accrue sur les gouvernements des pays en difficulté, Silvio Berlusconi a été vivement tancé par la Commission, mais aussi l'Allemagne et la France, pour ne pas tenir ses engagements de rigueur et de réformes économiques.

Du côté des financiers, le lobbying s'organise. Josef Ackermann, patron de Deutsche Bank et président de l'International Institute for Finance, était à Bruxelles pendant le week-end pour parler des paramètres de la recapitalisation. Le directeur de l'IIF, Charles Dallara, a tenté de limiter la casse sur le défaut des obligations grecques. Un accord sur une décote de 50 à 60 %, au lieu des 21 % négociés en juillet, est néanmoins prévisible. « Nous voulons un résultat qui assure la solvabilité à long terme de la Grèce », a dit Angela Merkel. La diffusion vendredi soir du rapport alarmiste de la troïka sur la situation de la Grèce (lire pages 4 et 5) a accru la pression sur le secteur bancaire. La dette grecque culminerait à 186 % en 2013, selon les experts européens et du FMI, pour ne décroître ensuite que très lentement, rendant « nécessaires de nouvelles remises de dettes ».

Muscler le FESF

Les discussions avec les banques portent aussi sur leur participation à ce qui se profile comme l'une des deux seules options restant sur la table pour muscler la capacité d'intervention du Fonds de stabilité : un véhicule spécial (SPV) ayant vocation à garantir et à racheter la dette des pays européens en difficulté. Outre le secteur privé, le Fonds monétaire international ou même certains États disposant d'importantes réserves, comme la Chine, le Brésil ou la Norvège, pourraient participer à ce SPV.

La seconde option, défendue par l'assureur Allianz, consisterait à garantir directement les émissions des pays en difficulté via le FESF actuel, à concurrence de 20 ou 30 %, afin de les aider à rester sur le marché. La proposition française consistant à transformer le FESF en banque pour avoir accès directement au guichet de la Banque centrale européenne a été écartée explicitement par Angela Merkel. « C'est contraire aux traités », a-t-elle répété dimanche.

Signe que les positions allemandes se renforcent à Bruxelles, mercredi, juste avant le deuxième sommet de la zone euro, Herman Van Rompuy - qui sera officiellement nommé président du Conseil de l'eurozone - présentera une réforme du traité européen. La conditionnalité attachée aux aides accordées par le Fonds ou son véhicule spécial soulève, comme l'a admis le président Sarkozy, « des problèmes démocratiques ». « Nous devons prendre des décisions envers des pays où nous n'avons pas été élus. Notre mandat n'est pas de les gérer et pourtant nous devons leur demander des efforts », a-t-il dit. Franco-allemande ou bien simplement allemande, la nouvelle vision de la gouvernance économique de l'Europe ne plaira pas à tout le monde. Mais a-t-on vraiment le choix ?