Russie : Le FMI sonne l'alarme sur l'éclatement de la bulle du crédit

Par Emmanuel Grynszpan, à Moscou  |   |  545  mots
Vue de Moscou. Copyright AFP
Le vice-ministre des finances russe Sergueï Stortchak s'est entendu dire au dernier G20 de Washington que son économie était menacée de surchauffe. Les experts du FMI voient un risque dans l'emballement de l'activité de crédit en Russie.

 

Les statistiques du premier trimestre 2012 montrent une croissance impressionnante (41%) des prêts aux particuliers. Sur l?ensemble de l?année 2011, la croissance était de 36%, parmi les plus élevées du monde. « Il est probable que ce rythme élevé se poursuive grâce à la croissance rapide des revenus des ménages », prédit Natalia Orlova, économiste en chef à la chez Alfa Bank. « Par ailleurs, le niveau de chômage reste faible à 6,5% tandis que les salaires réels ont augmenté de 11% pendant le premier trimestre ». L?économiste note aussi que jusqu?ici les revenus supplémentaires atterrissaient dans l?épargne, ils ont désormais tendance à stimuler l?activité de crédit. Or, selon Orlova, l?économie croît à un rythme lent et nous n?avons aucune certitude sur la qualité des crédits émis par les banques. Le ministre de l?économie a annoncé lundi que la croissance russe a été d?exactement 4% durant le premier trimestre 2012, conformément aux prévisions du FMI.

Crise de 2008-2009

 

Les inquiétudes du FMI se basent sur un constat simple : sur 10 ans, le PIB russe a doublé tandis que le volume des crédits a triplé. D?où une double menace sur la dette souveraine et sur la capitalisation du secteur bancaire. On se souvient que le système bancaire russe a subit un coup d?arrêt brutal en 2008 et 2009 à cause de la crise globale. Les taux d?impayés avaient bondit et les banques les moins prudentes ont vu apparaître des trous dans leur bilan. Le caractère « cyclothymique » du système financier russe fait que les variations y sont toujours plus abruptes que sur les marchés développés. La politique de crédit de certains organismes bancaires divise aussi la communauté financière. « De toute évidence, certaines banques russes avaient l?habitude de fournir des crédits au tout venant et à des taux franchement usuriers » raconte un banquier français installé en Russie depuis plus de dix ans. « Malgré les claques reçues en 2008, il me semble que certaines banques adoptent encore ces pratiques ». Un danger reconnu par le vice ministre des finances Stortchak. « La croissance du volume des crédits que nous observons, en particulier les crédits aux particuliers et les crédits immobiliers, provoquent des craintes. Il ne faut pas que cela mène à un affaiblissement de la stabilité des banques ».

Banque centrale rassurante

 

Néanmoins, A la banque centrale on tempère les inquiétudes en soulignant que la taille totale du portefeuille de crédit est de 50% du PIB russe, ce qui est inférieur à la moyenne de l'Europe centrale et orientale. Pour le directeur pour la Russie de la Banque Mondiale Michal Rutkowski, il n?existe pas actuellement de bulle du crédit ni de risque sérieux lié à la croissance de l?activité de crédit. Il ajoute que la Russie doit cependant prendre garde à trouver d?autres sources que le crédit pour stimuler la croissance des investissements. Pour marquer sa divergence avec le FMI, Rutkowski a déclaré à RIA Novosti que « certaines délégations tentent de confronter la Russie à cette problématique avec plus d?ardeur qu?elles ne le font avec d?autres pays. Or, ce n?est certainement pas justifié ».