Prix Nobel d'Economie : "La nomination de Fama est une excellente nouvelle" (Hamon)

Par Mounia Van de Casteele  |   |  451  mots
Le docteur en gestion et professeur d'Economie Jacques Hamon approuve le trio de chercheurs distingués par le prix Nobel d'Economie. Il se réjouit particulièrement de celle d'Eugène Fama dont il estime que la pensée est souvent "mal comprise".
Trois questions au docteur en gestion et professeur d'économie à l'université de Paris-Dauphine Jacques Hamon qui approuve le trio de chercheurs distingués par le prix Nobel d'Economie.

Que peut-on dire de la nomination de Fama, Shiller et Hansen comme prix Nobel d'Économie ?

Pour moi la nomination d'Eugène Fama est une excellente nouvelle. On pouvait l'attendre depuis de nombreuses années d'ailleurs. Celle de Hansen et Shiller également. Ce dernier est assez connu pour son indice immobilier, l'indice Case-Shiller, qui est un très bon indicateur, dont on n'a pas mal entendu parler lors de la crise immobilière américaine de 2006-2007 notamment.Et Shiller a été fait Docteur Honoris causa de Dauphine en 2010.

Pour revenir à Eugène Fama, son flux de travaux est assez impressionnant. S'il y en avait un à retenir, selon moi, ce serait "My life in Finance", publié en 2010. Âgé de 74 ans, il continue à publier. Et, ce depuis 1965 ! Fera-t-il comme Ronald Coase, l'ancien prix Nobel décédé en septembre à l'âge de 103 ans et qui avait publié son dernier ouvrage à 102 ans ?

N'est-il pas contradictoire d'avoir distingué simultanément Eugène Fama et Robert Shiller dont les pensées sont assez divergentes ?

C'est typiquement une bonne blague que l'on se plaît à raconter en économie. A savoir, dire que deux personnes peuvent obtenir le Prix Nobel en même temps en disant des choses complètement opposées. Alors s'agit-il d'une illustration de cette blague ?

Plus sérieusement, cela montre que l'économie et la finance ne sont pas des sciences exactes. Il s'agit de rapports humains. Ce n'est pas aussi objectif que la physique ou l'astronomie.

Cela dit, la pensée de Robert Shiller est souvent mal interprétée.C'est à partir de son article en 1981 sur les cours trop volatiles par rapport  aux dividendes que l'on commence à l'opposer à la théorie d'efficience du marché. Mais de mémoire, je n'ai jamais entendu Shiller exprimer les choses de cette façon. Certes, dans une interview qu'il avait accordée à Libération, il avait l'air de s'opposer lui-même à la théorie de l'efficience...à moins qu'il ne s'agisse d'un raccourci ou d'une mauvaise interprétation? Il disait en effet que la Bourse n'avait jamais reflété l'économie. Mais je pense que sa pensée est un peu plus fine que ça.

 Si vous aviez été le jury, quel aurait été votre verdict ?

Sans enlever aucun mérite à ceux qui ont été choisis, j'aurais peut-être ajouté Jensen à la liste. Il faut dire que Fama et Jensen ont beaucoup travaillé ensemble. Je pense qu'ils partagent des vues assez similaires.

Mais l'essentiel est que cela éclaire la pensée du "Français moyen" sur les marchés financiers, auxquels il ne semble pas beaucoup s'intéresser. Il suffit pour s'en rendre compte de regarder les récentes publications de patrimoine des ministres: aucune action !