Le chômage coupe l'Europe en deux

Par Robert Jules, Florence Autret à Bruxelles et Frank Paul Weber à Berlin  |   |  492  mots
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Dans les pays du sud européen, le nombre de sans emploi explose sous l'effet des politiques d'austérité, de la récession économique et de l'absence de réforme des marchés du travail. Malgré la crise, les pays du nord réussissent à créer des emplois en recourant à des mesures qui favorisent l'adaptation à un marché mondialisé.

En Europe, les chiffres du chômage illustrent mieux qu'aucune autre statistique une Europe à deux vitesses, particulièrement entre le nord et le sud. Ainsi l'Allemagne affiche son plus bas taux depuis 1991 tandis que l'Espagne s'envole vers des sommets à quelque 23 %. Et la publication vendredi de l'estimation de la Commission européenne de décembre pour la zone euro devrait confirmer cet écart.

Cette dichotomie européenne reflète en premier lieu l'état des économies du Vieux Continent. Les uns s'enfoncent dans la récession (Grèce, Portugal, Espagne...), les autres parviennent à maintenir un rythme de croissance, même modeste. La France, elle, voit son taux de chômage se hisser à des niveaux inédits depuis douze ans, sur fond de contraction de l'activité.

Lors de ses voeux à la Nation, le président de la République, Nicolas Sarkzozy, l'a d'ailleurs souligné : « Ceux qui ont perdu leur emploi doivent être l'objet de toute notre attention », ajoutant qu'il faut « faire en sorte que la formation des chômeurs devienne la priorité absolue, afin que chacun puisse se reconstruire un avenir ». En attendant de voir quelles pistes seront proposées pour concrétiser cette « attention », certains pays, comme la Grèce, le Portugal, l'Espagne ou encore l'Italie, doivent procéder, notamment sous la contrainte de Bruxelles et de la difficulté ou l'impossibilité d'emprunter, à des réformes structurelles de leurs marchés du travail, qui plus est, sur fond d'austérité et de crise sociale. L'urgence concerne notamment les jeunes (- 25 ans), même diplômés. Selon la Commission, 1 jeune sur 5 est au chômage dans l'UE, et il en coûte 2 milliards d'euros chaque semaine.

Dichotomie

Mais la crise n'explique pas tout. En Allemagne, et contrairement à la France, les employeurs, soutenus par les pouvoirs publics, préfèrent garder leurs employés, comme ils l'avaient fait durant la récession de 2009, quitte à les placer provisoirement en chômage technique ou en vacances forcées via l'usage des heures stockées dans leur « compte épargne de temps de travail » alimenté par leurs heures supplémentaires. Dans un contexte de compétition mondialisée, cette solution permet de garder intacte la force de travail pour répondre rapidement à la demande dès que s'amorce une reprise.

Cette dichotomie est illustrée par la Belgique. Son chômage moyen est de quelque 7 %. Toutefois, la Flandre vit sur le mode allemand : sa population sans emploi a baissé de 6 % entre octobre 2010 et octobre 2011, à 6,5 %. En revanche, la Wallonie est à la peine avec 13,7 % de sans emploi. La troisième région, Bruxelles-Capitale, reste sinistrée avec environ 20 % de sans emploi, un chiffre qui a légèrement baissé grâce au dynamisme de la Flandre dans le territoire de laquelle Bruxelles est encastrée. De quoi rallumer le débat sur l'indemnisation des chômeurs. Le régime national d'indemnités, faibles mais illimitées dans le temps, entretient une classe de pauvres assistés, en particulier dans la capitale.