Alerte : les Allemands envahissent les institutions européennes !

Par Florence Autret, à Bruxelles  |   |  447  mots
Horst Reichenbach, patron de la task force Europe "tutelle" de la Grèce Copyright Reuters
En quelques mois, Berlin a considérablement renforcé sa présence à la tête des institutions : BEI, Conseil et Parlement. Cela dirait-il quelque chose sur les rapports de force entre pays européens ?

Les délicats équilibres entre nationalités dans les nominations aux postes plus ou moins clés sont un grand classique de la négociation européenne. Ils participent de ces règles à la fois implicites et inviolables qui soudent des institutions. Un peu de Polonais par-là, quelques Français par-ci, une dose d'Allemands, un bon équilibre Nord-Sud, ou entre petits et grands pays : le dosage est subtil.

Pourtant depuis quelques mois, la barque s'est mise à sévèrement pencher... du côté de l'Allemagne. Berlin n'est certes pas un poids léger. Bien naturellement, elle a droit comme Paris à quelques places de choix.

C'est ainsi qu'un Allemand, Johannes Laitenberger, occupe le poste stratégique de chef de cabinet (l'équivalent bruxellois d'un directeur de cabinet à Paris) du président de la Commission. Il y a remplacé un Portugais.

Au Conseil de l'Union européenne, l'organe mi-législatif mi-exécutif chargé de représenter les gouvernements nationaux, Uwe Corsepius, un économiste natif de Berlin, a remplacé récemment le Français Pierre de Boissieu, à la tête de l'administration, au poste convoité de secrétaire général.

Thomas Mirow, un francophone averti, ancien élu de Hambourg, dirige depuis 2008 la Banque européenne de reconstruction et de développement, à Londres.

Depuis peu il a été rejoint dans le club des argentiers européens par un autre ancien secrétaire d'Etat à Berlin, Werner Hoyer, qui a pris le 1er janvier la succession du Belge Philippe Maystadt à la tête de la Banque européenne d'investissement.

Depuis 2010, Klaus Regling, économiste natif de Lübeck, préside aux destinées du Fonds européen de stabilité financière, créé pour stopper la contagion dans la zone euro. Il est basé, tout comme Werner Hoyer, à Luxembourg.

Horst Reichenbach, le patron de la task force Grèce, l'équipe de super-fonctionnaires chargés d'assister Athènes dans ses réformes, est également un allemand.

Enfin, le moins visible des compatriotes de Goethe n'est pas Martin Schulz, l'impétueux président du Parlement européen, arrivé à ce poste le 1er janvier 2012 en vertu de l'accord entre le Parti socialiste européen, dont il est membre, et le Parti populaire européen, auquel appartenait son prédécesseur polonais Jerzy Buzek.

Heureusement qu'Axel Weber a refusé de prendre le poste - qui lui semblait pourtant offert - de président de la Banque centrale européenne, laissant la voie libre à l'Italien Mario Draghi, sans quoi le carton serait presque plein. Pour être juste, rappelons que le président de la Commission européenne , José Manuel Barroso, est portugais et que celui du Conseil de l'Union européenne, Herman van Rompuy, vient, lui, de Belgique.