La Slovaquie donne un net coup de barre à gauche

Par Romaric Godin  |   |  562  mots
Robert Fico. Copyright AFP
Le parti de l'ancien premier ministre de centre-gauche Robert Fico a obtenu la majorité absolue aux élections de samedi. Son programme se dit pro-européen, mais il veut augmenter les impôts sur les plus riches et sur les entreprises.

 C?est un retour triomphant pour l?enfant terrible de la politique slovaque. Robert Fico, 47 ans, sera probablement le prochain premier ministre de ce pays de 5,4 millions d?habitants membre depuis 2009 de la zone euro. Son parti de centre-gauche, le Smer, a obtenu 44,4 % des suffrages. Mais avec 83 députés, il dispose désormais d?une majorité absolue de 8 sièges au parlement. Il pourra du reste s?appuyer sur une véritable volonté de changement du peuple slovaque. Malgré les scandales de corruption qui éclaboussent la classe politique depuis noël dernier, la participation s?est affichée stable à 59,11 % contre 58,83 % en 2010, alors que les observateurs l?attendait en forte baisse. Et le parti conservateur du premier ministre sortant Iveta Radicova n?aura que 11 députés contre 28 jusqu?ici.


Un parcours chaotique
Robert Fico a déjà été premier ministre slovaque de 2006 à 2010. Ancien dissident du parti social-démocrate issu de l?ex-parti communiste, il avait alors pris pour modèle le réformisme de Tony Blair ou de Gerhard Schröder. En 2006, pourtant, il avait effrayé les partenaires de la Slovaquie en s?alliant avec les nationalistes de l?ancien premier ministre autoritaire Valdimir Meciar qui avait dominé la vie politique du pays dans les années 1990. Mais il avait su également contenir les prétentions de ces derniers. En 2010, Smer était encore le premier parti du pays avec 35 % des voix, mais une coalition conservatrice avait exclu Robert Fico du pouvoir. Cet attelage délicat a cependant éclaté en octobre dernier lorsque le parti libéral SaS avait refusé de voter la motion de confiance sur la création du Fonds européen de stabilité financière, le FESF. Des élections anticipées avaient alors été convoquées.


Coup de barre à gauche
Signe des temps, le programme de Robert Fico est beaucoup plus à gauche que les précédents. En 2006, la Slovaquie sortait de plusieurs années de réformes libérales qui lui avait permis de retrouver la croissance et de se qualifier pour l?euro avant même les cousins tchèques. Le taux unique d?imposition était le symbole de cette politique et Smer n?entendait pas y renoncer. Cette fois, Robert Fico veut mettre fin à ce taux unique aujourd?hui fixé à 19 %. Les revenus annuels supérieurs à 33000 euros paieront ainsi 25 % d?impôts et les sociétés 22 %. « Les bénéfices record doivent entraîner des impôts record », a-t-il proclamé. Une petite révolution dans un pays qui avait été le symbole des vertus de la « flat tax ». Autre signe de la volonté de rééquilibrage de Robert Fico : il ne veut pas faire une politique de consolidation budgétaire « au détriment des plus pauvres ». Le succès de Smer repose donc sur un véritable coup de barre à gauche.


Pro-européen
Quant à l?Europe, qui pouvait encore s?inquiéter de ses alliances passées, Robert Fico a tenté ce dimanche de rassurer en affirmant que son « programme est nettement pro-européen ». « Nous sommes pour la sauvegarde de la zone euro, pour la sauvegarde de l?euro en tant que monnaie européenne forte », a-t-il insisté. Les leaders européens pourront du moins compter sur un gouvernement slovaque stable, ce qui n?était pas le cas du gouvernement de coalition précédent, comme l?ont prouvé les événements de l?automne dernier.