La presse européenne critique Nicolas Sarkozy après le discours de Villepinte

Par Marina Torre et Sylvain Rolland  |   |  768  mots
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Offensif sur l'Europe, notamment avec la remise en cause du traité de Schengen, le discours de Nicolas Sarkozy à Villepinte de dimanche a été suivi de près par la presse européenne. Tour d'horizon.

En Allemagne, la presse note une "tactique" électorale

En Allemagne, le Frankfurter Allgemeine Zeitung se montre particulièrement critique ce lundi à l'égard de Nicolas Sarkozy, au sujet de son discours de Villepinte. "Le président français courtise les eurosceptiques, alors qu'il est lui même un européen convaincu" écrit la correspondante du quotidien de Francfort Michaela Wiegel. Sa proposition de revoir l'accord de Schengen si des mesures contre l'immigration ne sont pas prises par l'Union européenne est plutôt considérée comme une tactique politique. Celle-ci viserait à convaincre les "nonistes" de 2005, ceux qui avaient dit non au traité constitutionnel en 2005. Très critique, au lendemain de ce discours, le quotidien conservateur dépeint Nicolas Sarkozy comme un "candidat des riches" qui "se bat désespérément contre sa réputation" et "qui n'a pas tenu ses promesses de campagne" de 2007. Certes, cette diatribe s'étend à l'ensemble de la campagne, les candidats étant renvoyés dos à dos devant leurs "tactiques électorales transparentes" visant à rechercher les voix des extrêmes. Mais le candidat-président en prend particulièrement pour son grade à l'issu de son meeting de Villepinte. Le "Faz" rappelle que Nicolas Sarkozy est le seul président de la Ve République a avoir atteint un niveau aussi bas dans les sondages.

Même constat pour le Zeit qui voit dans la proposition du candidat de l'UMP, une façon de "mobiliser les électeurs de droite". Le Süddeutche Zeitung y voit, quand à lui, une mesure populiste.

En Grande-Bretagne : "Nicolas Sarkozy risque d'énerver ses partenaires européens"

Outre-Manche, The Guardian livre également un regard critique sur les déclarations de Nicolas Sarkozy sur l'espace Schengen. "Les poings serrés, dégoulinant de sueur", le président "qui se traîne derrière son rival François Hollande a prononcé un discours "hautement théâtral" dans un "style de film d'action", commente le journal, qui voit dans la prestation présidentielle une "démonstration de politique spectacle". Sur le fond, le quotidien britannique estime que le président "a maintenu sa ligne très droitière, mais l'a orientée sur l'Europe". "Cibler Schengen n'est pas nouveau chez Sarkozy", rappelle le journal, qui se souvient des tensions franco-italiennes, l'an dernier, à propos des migrants tunisiens qui rejoignaient en masse Lampedusa. Nicolas Sarkozy avait alors pressé son homologue aujourd'hui destitué, Silvio Berlusconi, à renforcer les contrôles aux frontières. The Guardian conclut son analyse sur une mise en garde : "Sarkozy risque d'énerver les partenaires européens de la France en brandissant des ultimatums, non seulement sur le contrôle de l'immigration mais aussi sur une approche plus protectionniste vis-à-vis de l'importation de produits" en provenance de produits hors-Europe.

Pour le Financial Times, qui rapporte avant tout les grands moments du meeting,le discours du candidat UMP s'apparente à une "poussée populiste".

En Espagne, El Pais relève une attaque contre la "technocratie de Bruxelles"

Le quotidien El Pais estime que le "président-candidat tente désespérement de voler des voix au Front national". Il rappelle la cette réforme du traité de Schengen évoqué dimanche par Nicolas Sarkozy "est déjà en cours à Bruxelles", et ce depuis juin 2011 avec, pour objectif de "trouver un 'gouvernement politique' tel qu'a exigé Sarkozy à Villepinte". Comme le britannique Guardian, El Pais précise que l'ouverture de ces discussions date du moment où la France avait repris les contrôles aux frontières au moment où de nombreux immigrants tentaient de rejoindre l'Europe via l'île Italienne de Lampedusa.

Par ailleurs, cette analyse relève une "attaque contre la technocratie de Bruxelles", lorsque Nicolas Sarkozy affirme que les décisions commerciales devraient être prises par les Etats avant que la Commission finisse par en "prendre acte". Réponse amusée du quotidien espagnol : "Ce qui est curieux, c'est que le processus de décision européen se réalise de cette manière : la Commission négocie les accords avec un mandat du Conseil (composé des Ministres ou chefs d'Etats européens NDLR)".

En Italie : "Paris risque l'isolement"

La Stampa souligne que "la véritable nouveauté de la proposition sarkosiste n'est pas sur le fond, mais dans la méthode". Pour le  quotidien turinois "la vraie nouvelle" c'est l'ultimatum. Ces douze mois pour donnés à l'Europe pour qu'elle réduise l'immigration. "Ensuite, Paris sera seule lorsqu'elle suspendra unilatéralement sa participation aux accords de Schengen, qu'elle appliquera sa propre législation sur les petites entreprises et taxera les grandes entreprises la base de leur chiffre d'affaires dans le monde et commencera peut-être à taxer les exportations chinoises".