De plus en plus de Portugais refusent la politique d'austérité

Par Marie-Line Darcy, à Lisbonne  |   |  599  mots
Le 15 septembre, près de 700.000 personnes descendaient dans les rues de 40 villes portugaises pour réclamer le départ du FMI et la démission du gouvernement. Pedro Passos Coelho, le Premier ministre, a retiré les nouvelles mesures d'austérité et a révisé sa copie. Copyright Reuters
Après avoir temporisé face à une opinion publique en colère, le gouvernement portugais prépare de nouvelles mesures d'austérité. Une nouvelle manifestation est prévue à Lisbonne samedi prochain.

Pedro Passos Coelho, le Premier ministre portugais, avait jusqu'a présent bénéficié d'une relative passivité des Portugais face aux mesures d'austérité qui s'enchaînent depuis 2011. Mais il a lui-même allumé la mèche qui a mis le feu aux poudres en annonçant abruptement une majoration de 7 % des cotisations sociales (TSU-Taxe Sociale Unique) des travailleurs, assortie d'une diminution de 5,75% des cotisations du patronat.

700.000 personnes dans les rues

La réaction a été à la hauteur de l'incrédulité : le 15 septembre, près de 700.000 personnes descendaient dans les rues de 40 villes portugaises pour réclamer le départ du FMI et la démission du gouvernement. Plus que le nombre impressionnant de manifestants pour un tout petit pays de 10 millions d'habitants, c'est bien la détermination nouvelle des Portugais et leur ton  revendicatif qui a frappé. Conspué dans la rue, lâché par le parti des chrétiens démocrates, partenaire de la coalition opposé à la mesure, confronté à une crise politique, le premier ministre a dû reculer : il reverra sa copie sur la question de la TSU et la fera valider par les partenaires sociaux.

Pour financer la baisse de la TSU patronale, mesure maintenue car figurant dans le Mémorandum signé avec la troïka représentant les institutions qui fournissent l'aide internationale (FMI, UE, BCE), la CIP-Confédération Industrielle préconise l'imposition d'une taxation de 30 % sur le tabac et les cigarettes, avec pour objectif une recette escomptée de 485 millions d'euros. De son côté, la CGTP- Confédération des travailleurs recommande la taxation des dividendes (recette escomptée de 1,2 milliard d'euros).

Nouveau tour de vis

Le gouvernement prépare un budget de l'État pour 2013 qui sera lui aussi dominé par l'austérité. Car si le FMI et l'Union européenne ont bien accordé un délai supplémentaire d'un an pour ramener le déficit public à 3 % du PIB  - 2014 au lieu de 2013 -, il n'en reste pas moins que le Mémorandum d'ajustement appliqué au Portugal contre un prêt de 78 milliards d'euros n'a pas changé d'une virgule. Outre la délicate question de la TSU, le gouvernement doit pouvoir compenser par de nouvelles recettes la réintroduction d'une partie des primes dans la fonction publique, dont la suppression a été considérée comme inéquitable par la Cour constitutionnelle.

Il faudra passer par une réforme du système fiscal incluant une diminution des échelons intermédiaires de l'impôt sur le revenu, mais également par l'augmentation de ce même impôt. Par ailleurs, le gouvernement envisage de mettre à contribution le secteur privé, en opérant une nouvelle ponction des primes de fin d'année, pour rétablir le principe d'égalité des citoyens. L'impôt exceptionnel a déjà été levé en décembre 2011 sur une partie des revenus. Vitor Gaspar, le ministre des Finances, a évoqué un possible relèvement de la taxe sur les biens immobiliers, et sur le patrimoine.

Manifestation syndicale le 29 septembre

Très prudent, le gouvernement s'est bien gardé de faire des déclarations à l'issue du conseil extraordinaire des ministres qui a duré sept heures ce mercredi. Il est vrai qu'une autre manifestation est prévue samedi 29 septembre à Lisbonne, à l'appel de la CGTP, la Confédération Générale des Travailleurs, proche du Parti Communise. Les organisateurs des manifestations « civiles » précédentes ont appelé à rejoindre ce mouvement à Lisbonne. Une manifestation à laquelle devraient prendre part égalemetn policiers et militaires. Nul ne sait combien de temps les Portugais resteront pacifiques, alors qu'en Espagne et en Grèce la tension ne cesse d'augmenter.