Pour la BCE, embaucher des superviseurs ne sera pas aisé

Par latribune.fr  |   |  541  mots
Le niveau des salaires à la BCE est bien inférieur à ceux du privé. Un problème pour l'institution qui a besoin d'attirer 770 nouveaux superviseurs compétent pour surveiller les banques européennes. (Photo : Reuters)
La mise en place du Mécanisme de supervision bancaire unique au niveau européen par la BCE suppose d'embaucher des superviseurs. Mais recruter du personnel qualifié n'est pas aisé.

Efficacité, mise en place, faisabilité, l'Union bancaire soulève de nombreuses questions. Mais en voici une à laquelle on n'avait pas encore pensé : celle du recrutement de cadres pour gérer au jour le jour le Mécanisme de supervision unique, l'un de ses piliers. Pour la Banque centrale européenne (BCE), il sera en effet compliqué d'y attirer des banquiers chevronnés en raison de salaires proposés pas assez élevés.

Faire de la BCE l'organisme unique de supervision bancaire es pourtant une étape ambitieuse vers l'intégration européenne depuis le lancement de la monnaie unique voici 15 ans. Embaucher les bonnes personnes dès le départ est donc vital pour la réussite du projet et la BCE se repose beaucoup sur les autorités locales pour trouver les 770 superviseurs qu'il lui faut d'ici novembre.

Besoin de hautes compétences

Depuis le déclenchement de la crise financière, qui a mis au jour des carences criantes en matière de réglementation, les compétences requises pour être un bon superviseur ont changé, explique à Reuters Julie Dickson, du Conseil de stabilité financière, organe de coordination de la réglementation financière au sein du Groupe des Vingt (G20).

"On attend dorénavant des superviseurs qu'ils aient des discussions solides avec les directeurs généraux et les conseils d'administgration et qu'ils creusent des questions telles que la chaîne de succession des banques d'importance systémique et la culture du risque", explique-t-elle. "Ces compétences étaient rares dans les organismes de supervision il y a quelques années", ajoute-t-elle.

Des salaires bien inférieurs à ceux du privé

La rémunération minimale des superviseurs de la BCE est de l'ordre de 55.000 euros par an. Elle peut atteindre 120.000 euros. Par comparaison, la rémunération moyenne de la Deutsche Bank en 2013 était de 120.000 euros environ et pour la banque suisse UBS elle se montait à un peu plus de 275.000 euros.

Avec un bémol toutefois. La fiscalité européenne, avec un taux qui varie de 8% à 45%, est souvent inférieure à celle des Etats membres.

Mélanger des experts de la supervision bancaire et des banquiers venant du secteur privé pourrait pourtant s'avérer une combinaison gagnante pour le MSU. Mais avec deux limites : que l'intégration se passe bien et que la situation n'aboutisse pas à des conflits d'intérêts.

Réussir l'intégration

S'agissant des conflits d'intérêts, la BCE met en place des procédures visant à empêcher les personnes ayant travaillé durant au moins deux ans en son sein de se retrouver dans une position de nature à les compromettre.

 En revanche, s'agissant de l'intégration, c'est plus compliqué. Un conflit "culturel" était ainsi patent au sein de l'Autorité des services financiers (FSA) britannique, remplacée en 2013, après 12 ans d'exercice, par un nouvel organisme. "Il y avait des tensions entre la culture du secteur public et la culture de la City", explique à Reuters un ancien de la FSA, faisant référence au centre financier de la City de Londres.

De fait, l'arrivée de nouveaux venus du secteur privé provoque un certain malaise chez certains salariés de la BCE. "Vont-ils nous manger ou allons-nous les manger?", se demandait une source de la BCE.