Balladur a-t-il présenté en 1995 des comptes de campagne irréguliers ?

Par latribune.fr  |   |  480  mots
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Le site Mediapart affirme qu'Edouard Balladur a sous-évalué de l'équivalent de 2 millions d'euros ses comptes de campagne pour la campagne présidentielle de 1995.

Selon le site internet Mediapart es comptes de la campagne présidentielle d'Edouard Balladur en 1995 ont été sous-évalués de plus de 13 millions de francs (2 millions d'euros) et auraient pu donner lieu à de lourdes pénalités, selon des pièces saisies par la police publiées mercredi.

Citant un rapport d'experts du Conseil constitutionnel, le site assure que les dépenses totales de la campagne du rival de Jacques Chirac ont atteint 97,2 millions de francs et non 83,8 comme l'avait déclaré le trésorier. Ce rapport sur les comptes d'Edouard Balladur a été saisi et placé sous scellés avec les pièces comptables par la police en mai dernier, dans une enquête pénale sur un supposé financement de la campagne par une corruption en marge d'une vente de sous-marins au Pakistan.

Le total de 97,2 millions de francs excédait le plafond légal de 7,2 millions de francs (1,09 million d'euros), somme qui aurait donc dû être remboursée au Trésor public, selon le code électoral. Par ailleurs, Edouard Balladur n'étant plus éligible aux aides publiques pour ses dépenses, il aurait aussi dû rembourser beaucoup d'argent.

Les rapporteurs faisaient par ailleurs mention de versements en espèces de 13 millions de francs aux caisses de campagne, non justifiés, car l'explication d'Edouard Balladur parlant de vente de T-shirts et de gadgets était jugée peu crédible, selon des éléments déjà publiés dont Reuters a eu connaissance.

Au vu de tous ces éléments, les rapporteurs ont proposé au Conseil constitutionnel de rejeter les comptes mais l'institution, sous la présidence du socialiste Roland Dumas, l'a refusé après une réunion à huis clos le 3 octobre 1995, selon la décision finale officielle.

Selon un récit de la réunion publié par plusieurs médias et que Roland Dumas ne conteste pas, il a été retenu qu'un rejet était impossible car les comptes de campagne du candidat élu, Jacques Chirac, présentaient des irrégularités similaires. Il ne pouvait selon Roland Dumas être question de faire annuler sa victoire, et le président a fait adopter ce point de vue.

Le Conseil n'a donc réintégré dans les comptes officiels de la campagne Balladur qu'une partie des dépenses "oubliées", pour rester en dessous de la limite légale des 90 millions.

Les pièces publiées par Mediapart montrent que le trésorier d'Edouard Balladur n'avait pas déclaré des dépenses telles que 4,2 millions de francs pour les permanences électorales, 1,5 million de sondages, 2,2 millions pour des affiches, 2,4 millions pour des réunions publiques, ainsi que des factures de grands hôtels.

L'affaire est aux mains du juge d'instruction Renaud Van Ruymbeke, qui a demandé une extension de sa saisine visant le marché pakistanais à un autre marché d'armement en Arabie saoudite, qui a aussi donné lieu à versement de commissions.