Le compte personnel de formation verra bien le jour

Par latribune.fr  |   |  987  mots
L'accord prévoit que la contribution obligatoire des entreprises, qui allait jusqu'à 1,6% de la masse salariale, sera remplacée par un versement qui n'excèdera pas 1%.
Les représentants des syndicats, la CGPME et le Medef sont parvenus dans la nuit de vendredi à samedi à un projet d'accord sur la formation professionnelle, destiné notamment à la rendre plus accessible aux chômeurs. Un compte de formation sera lié à chaque salarié et le suivra lorsqu'il change d'entreprise ou perd son emploi.

Au terme d'une séance de négociation marathon, entamée jeudi matin, les partenaires sociaux ont acté dans la nuit de vendredi à samedi la création d'un compte personnel de formation qui suivra salariés et demandeurs d'emploi toute leur vie. C'est la mesure principale qui se dégage de ces négociations. Selon l'Insee, 49% des personnes en emploi ont suivi en 2012 une formation à but professionnel, contre 27% des chômeurs.

 

"Il ne s'agit pas moins que de redéployer 32 milliards d'euros", notamment "vers les demandeurs d'emplois, les salariés, les jeunes qui ont le moins de qualifications". "Nous avons franchi une étape très importante", a-t-il estimé.

 

"La politique économique que je mène depuis 19 mois n'a qu'un objectif: l'emploi", a rappelé François Hollande

 

Le ministre du Travail, Michel Sapin - qui avait rappelé vendredi "l'urgence, qui est de former les chômeurs et les salariés les plus en difficulté"-, s'est lui aussi réjouit de cette "nouvelle avancée du dialogue social", se félicitant que les partenaires fassent "vivre ainsi une véritable démocratie sociale", chère au président.

 

Du côté des partenaires sociaux, l'accord - qui doit encore être soumis à l'approbation des états-majors des syndicats-, n'a pas rallié tous les suffrages: la CGT s'y est opposée et il s'est heurté, dans le camp patronal, à la CGPME qui doit faire connaître sa position mercredi. FO a pointé aussi bien les "bons" comme les "mauvais points". Mais, pour le Medef, il s'agit d'une "réforme de grande ampleur".

 

La CFDT, à l'instar de la CFTC et de la CFE-CGC, a estimé que le projet "crée des droits essentiels pour les salariés" et "modifie de manière assez fondamentale" la formation professionnelle.

 

Les principaux points de la réforme de la formation professionnelle sont les suivants:

 
  • Un compte personnel de formation "universel"

Le compte personnel de formation, dont le principe avait été acté par la loi de sécurisation de l'emploi de juin 2013, est la pierre angulaire de cette réforme. Opérationnel à partir du 1er janvier 2015, il peut être ouvert dès l'âge de 16 ans et suit la personne tout au long de la vie, même si elle se retrouve au chômage ou change d'emploi (contrairement au dispositif précédent, le DIF). Il est alimenté dès lors qu'on a le statut de salarié.

 

Celui-ci bénéficie d'un nombre d'heures annuel crédité sur son compte, à hauteur de 150 heures maximum sur 9 ans. Au-delà de ces 150 heures, des abondements peuvent être effectués par l'employeur, le salarié, Pôle emploi ou encore via un accord d'entreprise.

 

Les formations éligibles sont "obligatoirement des formations qualifiantes correspondant aux besoins de l'économie à court ou moyen terme". Sauf exceptions, le salarié devra demander l'accord de l'employeur s'il souhaite effectuer sa formation sur son temps de travail. Pour les chômeurs, pas besoin d'autorisation de Pôle emploi.

 
  • Le financement réformé

Le financement émanant des entreprises, premiers contributeurs de la formation professionnelle (13,7 milliards sur les 32 dépensés) devant l'État, les Régions et Pôle emploi, est refondu.

 

Le projet prévoit la fin de la contribution légale qui allait, en fonction de leur taille, de 0,55% de la masse salariale à 1,6%. Dans les faits, les entreprises de plus de dix salariés dépensent en réalité 2,7% de leur masse salariale en moyenne pour la formation.

 

A la place, l'accord prévoit une contribution "unique et obligatoire" allant de 0,55% (pour celles de moins de dix salariés) à 1% (plus de 50), dont une partie sera mutualisée au bénéfice des petites entreprises.

 
  • Tous les salariés auront un entretien professionnel régulier

Cet entretien aura lieu dans toutes les entreprises, au minimum tous les deux ans, afin notamment d'envisager "les perspectives d'évolution professionnelle, notamment en termes de qualification et d'emploi".

 

Distinct de l'entretien d'évaluation, il sera proposé systématiquement aux salariés après une interruption de travail (congé parental, temps partiel, congé sabbatique etc.)

 
  • Création d'un "conseil en évolution professionnelle"

Toute personne pourra en bénéficier à titre gratuit afin de mieux identifier ses compétences, de l'aider dans son orientation et dans l'élaboration d'un projet professionnel. Il doit permettre aussi de repérer les personnes affectées par l'illettrisme.

 
  • Augmentation des bénéficiaires du CIF

Pour parvenir à augmenter le nombre de bénéficiaires du CIF (Congé Individuel de Formation) (45.000 à 50.000 par an aujourd'hui), les entreprises de 10 à 19 salariés, jusqu'alors exonérées, devront désormais cotiser pour le financer.

 
  • L'Observatoire des métiers devra anticiper les évolutions

Le rôle de l'observatoire prospectif des métiers, des qualifications et des compétences est renforcé: il permettra aux branches professionnelles d'anticiper l'évolution des métiers et des besoins, pour adapter l'offre de formation aux demandes du marché du travail. L'observatoire sera notamment chargé de la liste des formations éligibles au compte personnel de formation.

 
  • Mieux informer les conseillers Pôle Emploi

Les signataires demandent aux pouvoirs publics de "prendre les dispositions requises" pour que les conseillers de Pôle Emploi aient à accès à l'intégralité des offres de formation dans leur région.

 

Ces différents points d'accord seront transposés dans un projet de loi par le gouvernement. Ce dernier sera présenté au conseil des ministres le 22 janvier prochain, selon le ministère du Travail.

 

Avec ce projet, le ministère entend aussi clarifier le financement des organisations syndicales en dissociant le financement de la formation professionnelle de celui des organisations patronales et syndicales.

 

"Ce dernier passera désormais par un financement mutualisé spécifiquement dédié aux moyens du dialogue social, transparent et déconnecté de la collecte au titre de la formation professionnelle", indique un communiqué.

 

Actuellement, une petite partie des sommes dédiées à la formation professionnelle est distribuée entre patronat et syndicats pour financer leur gestion des organismes paritaires .