Biodiversité : comment Nicolas Hulot espère "changer d'échelle"

Par latribune.fr  |   |  559  mots
L'artificialisation des sols a fait perdre depuis 2006 à l'agriculture et aux milieux naturels une surface équivalente au département de la Seine-et-Marne, selon l'Observatoire national de la biodiversité.
Le ministre de la Transition écologique et solidaire a lancé vendredi à Marseille l'élaboration d'un plan ministériel, accompagné d'une consultation citoyenne. Il a aussi déclaré la volonté du gouvernement de porter le sujet au niveau international.

La biodiversité "très sincèrement, tout le monde s'en fiche, à part quelques-uns", s'était emporté devant les députés Nicolas Hulot en mars. Le ministre de la Transition écologique et solidaire veut désormais tenter de mettre un terme à ce désintérêt. Vendredi 18 mai, à Marseille, il a annoncé l'élaboration d'un Plan interministériel pour la biodiversité, censé constituer le 2e pilier de sa politique, après le Plan climat lancé en juillet 2017. Construit autour de cinq axes, conjuguant protection et restauration, pédagogie et changement des modes de production et de consommation, dimensions nationale, européenne et internationale, il sera accompagné d'une consultation citoyenne, visant à mobiliser l'ensemble de la population. Il devrait aboutir en juillet et couvrira la fin de la Stratégie nationale de la biodiversité 2011-2020, en anticipant la période 2021-2030.

Un calendrier diplomatique international

"C'est vraiment un sujet que je veux faire monter au même niveau que l'enjeu climatique", a commenté Nicolas Hulot, cité par l'AFP:

"On va lancer toute une initiative sur la biodiversité, et surtout lancer tout un calendrier diplomatique international qui va jalonner les trois prochaines années".

Sur ce dernier point, le ministère met notamment en avant plusieurs événements qui devraient contribuer au "changement d'échelle" souhaité : la tenue en France, en avril-mai 2019, de la séance plénière de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), puis d'un G7, présidé par Emmanuel Macron, "dont le sujet principal sera la biodiversité". L'horizon, pour Nicolas Hulot, est le 7e Congrès mondial organisé par l'Union internationale pour la conservation de la nature en juin 2020 à Marseille (seule ville candidate), puis de la COP15 de la Convention sur la diversité biologique en Chine en 2020. Autant d'opportunités pour la France de devenir leader sur le sujet, afin "d'inscrire la biodiversité dans une stratégie nationale et mondiale au même titre que le climat" et "d'appuyer l'adoption d'un cadre international ambitieux".

Des "outils reglémentaires"

Quant au niveau national, "l'idée est que la France prenne sa part de responsabilité, qu'on protège les écosystèmes, qu'on arrête d'empoisonner la nature, qu'on arrête d'artificialiser les sols", a expliqué Nicolas Hulot, toujours cité par l'AFP, évoquant "un certain nombre d'outils réglementaires". Alors que le patrimoine français compte plus de 16.500 espèces endémiques (dont 80% en outre-mer), il est menacé. L'artificialisation des sols a par exemple fait perdre depuis 2006 à l'agriculture et aux milieux naturels une surface équivalente au département de la Seine-et-Marne, selon l'Observatoire national de la biodiversité. En mars, une étude choc du CNRS et du Muséum d'histoire naturelle avait montré un déclin "vertigineux" des oiseaux des campagnes.

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Les ONG accueillent toutefois ce plan avec prudence. Elles réclament en effet des politiques particulièrement volontaristes, impliquant aussi d'autres ministères parfois hésitants, tels que celui de l'Agriculture. Or, l'interdiction du glyphosate en France, promise par Macron le 27 novembre 2017, n'a toujours pas été adoptée. Et le compromis finalement trouvé entre Nicolas Hulot et Total concernant l'utilisation d'huile de palme pour sa bioraffinerie de La Mède dans les Bouches-du-Rhône ne satisfait pas les ONG... précisément en raison de ses impacts sur la biodiversité.