Fiscalité : pas d'impôt sur les successions jusqu'à 200.000 euros par enfant, propose Valérie Pécresse

Par latribune.fr  |   |  962  mots
(Crédits : Reuters)
Alors que la réforme de l'impôt sur les successions est un thème au coeur de la campagne présidentielle, la candidate LR à la présidentielle prévoit que chaque enfant puisse hériter de 200.000 euros de manière défiscalisée, contre 100.000 euros aujourd'hui. La semaine dernière, le Conseil d'analyse économique (CAE) a préconisé de taxer tous les flux successoraux perçus par un individu pendant sa vie et de réduire les nombreuses exonérations actuelle.

L'idée d'une réforme de l'impôt sur les successions, impôt détesté des Français revient dans le débat. Le sujet divise nettement les candidats à la présidentielle.

Ce lundi dans le Figaro, Valérie Pécresse, la candidate Les Républicains (LR) à la présidentielle, propose si elle est élue d'exonérer de taxes les successions jusqu'à 200.000 euros par enfant, et non jusqu'à 100.000 euros comme c'est le cas aujourd'hui. L'abattement serait aussi porté à 100.000 euros pour une transmission indirecte, par exemple dans le cas où "une personne hériterait de son oncle ou de sa sœur".

 "Je supprime les droits de succession pour 95 % des Français", assure-t-elle.

 La candidate LR veut également augmenter le plafond des donations du vivant des donateurs défiscalisées. Chaque parent pourrait ainsi donner 100.000 euros tous les six ans et non plus tous les quinze ans. La mesure concernerait également "chacun des petits-enfants pour permettre le saut générationnel", et serait encore de 50.000 euros pour les neveux et les fratries.

Un thème au coeur de la campagne présidentielle

 Le thème des droits de succession est au coeur des propositions de la plupart des candidats à la présidentielle, même si tous n'ont pas encore détaillé leur programme. Et avec des clivages nets.

A droite et à l'extrême droite, on défend plutôt un allègement de la fiscalité sur les donations. Un parent peut actuellement donner 100.000 euros sans payer d'impôt à ses enfants, et cela tous les 15 ans. De son côté, Marine Le Pen veut réduire les délais entre deux donations à 10 ans et les étendre aux grands-parents. Elle propose aussi d'exonérer de droits de succession les biens immobiliers jusqu'à 300.000 euros "pour favoriser l'enracinement et la transmission". Eric Zemmour souhaite, lui, supprimer les droits de succession sur les transmissions d'entreprises familiales.

A gauche, c'est le mouvement inverse et les propositions visent à davantage imposer les successions et donations. Jean-Luc Mélenchon veut notamment créer un héritage maximum pour les plus grandes fortunes. Anne Hidalgo n'a pas encore dévoilé de proposition précise, mais une proposition de loi signée par de nombreux députés socialistes, rejetée par la majorité, défendait une réforme partageant la proposition du Conseil d'analyse économique (CAE), organe chargé de conseiller le gouvernement, sur la prise en compte de toutes les sommes perçues par un individu tout au long de sa vie, en y ajoutant un abattement pour tous de 300.000 euros.

Le système actuel renforce les inégalités (CAE)

La semaine dernière, une note du CAE a apporté une nouvelle contribution sur ce sujet ultra sensible. Constatant, chiffres à l'appui, que l'héritage "revient en force" et que le système actuel de taxation renforce les inégalités de patrimoine et d'opportunités, ce document recommande une réforme "en profondeur". Il préconise de taxer tous les flux successoraux perçus par un individu pendant sa vie et de réduire les nombreuses exonérations actuelles.

"L'héritage redevient un facteur déterminant dans la constitution du patrimoine" en France, portant en lui "le risque d'un dérèglement profond de l'égalité des chances", d'où la nécessité d'une "réforme en profondeur" de sa taxation, écrivent les auteurs de cette note.

En cinquante ans, la part de la fortune héritée dans le patrimoine total est passée de 35% à 60% en France, relèvent-ils. Au sein d'une génération donnée, la moitié des individus auront hérité de moins de 70.000 euros de patrimoine tout au long de leur vie, quand le top 1% héritera en moyenne de plus de 4,2 millions d'euros.

Les inégalités de patrimoine sont ainsi bien supérieures à celles des revenus du travail, constatent les auteurs. En cause: un impôt sur les successions en principe progressif, mais "miné" par des exonérations et des exemptions (assurance-vie, biens professionnels, donations en nue-propriété, etc.), qui favorisent les plus grandes transmissions.

Au total, "40% du patrimoine transmis échappe au flux successoral" appréhendé par l'administration fiscale.

La note propose donc de réduire, voire de supprimer ces exemptions, afin d'améliorer la progressivité de l'impôt. Comme l'OCDE ou le rapport des économistes Olivier Blanchard et Jean Tirole remis récemment au président de la République, le CAE défend aussi l'idée de taxer les successions non plus au moment du décès d'une personne, mais sur l'ensemble des sommes ou biens reçus par un individu tout au long de sa vie, comme les donations par exemple.

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Un héritier payerait le même montant d'impôt s'il reçoit 700.000 euros d'un de ses parents à son décès, ou s'il reçoit durant sa vie trois donations de 100.000 euros (qui peuvent actuellement bénéficier d'abattements) et 200.000 euros de chacun de ses parents à leur décès.

Cette réforme, qui devrait être mise en place "au travers d'une période de transition longue (de 10 à 18 ans)", devrait aussi inclure une "garantie de capital" pour tous, versée à la majorité "pour limiter les inégalités les plus extrêmes" dans l'accès à la formation ou au logement notamment. Elle permettrait de percevoir entre 9 milliards et 19 milliards d'euros d'impôts supplémentaires, selon différentes simulations de mise en oeuvre, concluent les auteurs.

De son côté, l'ONG Oxfam plaide notamment pour un impôt sur les successions qui prendrait en compte tous les versements touchés par un héritier au long de sa vie et non plus seulement au moment de l'héritage, afin de supprimer les possibilités d'abattements qui profitent aux hauts patrimoines.